Le programme de t�l�surveillance des sites du groupe Sonatrach a �t� lanc� officiellement en 2005. Le ministre de l�Energie et des Mines et le staff dirigeant de la compagnie p�troli�re ont suivi, �tape par �tape, le d�veloppement et la r�alisation d�une cinquantaine de projets. La d�sorganisation, la pr�cipitation, le client�lisme et les passe-droits ont min� ce programme de plus de 68 milliards de dinars et qui a abouti, dans sa globalit�, � un �chec. Depuis octobre 2009, la Sonatrach a �t� d�charg�e de la gestion de la t�l�surveillance, celle-ci �tant du ressort exclusif d�une entreprise plac�e sous tutelle du minist�re de la D�fense nationale. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - Initi� par le minist�re de l�Energie et des Mines, le programme de syst�me technologique de s�curit� (STS) de la Sonatrach avait pour objectif de doter l�ensemble des sites d��quipements de syst�mes de vid�osurveillance et de contr�le d'acc�s. L�ensemble des activit�s op�rationnelles (amont, aval et transport) de la compagnie nationale d�hydrocarbures �tait concern�, en plus des filiales Naftal et Naftec et de certaines administrations du groupe. Le processus d�bute en janvier 2005 par un �tat des lieux de la s�curisation des sites. L��tude, r�alis�e en interne, se d�roule sur plusieurs mois. Le dossier est examin� en octobre 2005 en comit� ex�cutif restreint. Pr�sid� par le Pdg de la Sonatrach, le CER est compos� des vice-pr�sidents et de certains responsables des directions fonctionnelles du groupe. Une s�rie de recommandations est prise lors de cette r�union. Elles ont trait notamment � la n�cessit� de veiller au strict �respect des proc�dures de passations de march� et � l��tablissement d�un reporting (rapport) mensuel afin de permettre au minist�re de l�Energie et � la direction g�n�rale de la Sonatrach de suivre tout le processus du programme. Pressions Mais au niveau de la tutelle, on estime que le lancement des projets n�est pas assez rapide. L�ann�e 2005 s�ach�ve par un rappel � l�ordre du minist�re de l�Energie. Ce dernier met en avant le caract�re d�urgence et d�cide d�opter pour des consultations restreintes. Un choix ent�rin� par le CER lors d�une session tenue le 8 janvier 2006. Pour ce faire, il est d�cid� de dresser une liste des entreprises sp�cialis�es en t�l�surveillance. A cette occasion, la direction ex�cutive strat�gie (SPE) pr�sente une premi�re �tude financi�re du programme. Un document de cette direction pr�cise que l�ensemble des projets � r�aliser est estim� � 3,7 milliards de dinars. Les choses s�acc�l�rent encore. Un autre comit� ex�cutif restreint est organis� le 23 janvier. Sur ordre de la tutelle, le programme de t�l�surveillance passe du statut d��urgent� � �extr�mement urgent�. Une nouvelle proc�dure de s�lection est mise en place � travers la cr�ation de comit�s inter-activit�s. Supervis�es par la direction de la s�ret� interne de l�entreprise (DSIE), ces structures ont �t� charg�es �en urgence� de r�viser, d�affiner et d�homog�n�iser les projets de cahier des charges pour le choix des prestataires. L�adoption de ces nouvelles proc�dures attire une multitude d�entreprises activant dans le secteur de la s�curisation �lectronique des sites. La plupart sont des op�rateurs �trangers. Tous souhaitent �tre retenus par les comit�s inter-activit�s qui jouissent d�une grande autonomie en mati�re de s�lection. C�est notamment le cas de l�activit� transport dont la liste de pr�s�lection est compos�e de 13 entreprises fran�aises et d�une entreprise alg�rienne sp�cialis�e dans le gardiennage. Le 3 f�vrier 2006, le comit� ex�cutif restreint tente de rectifier le tir en imposant de nouvelles r�gles. Les comit�s interactivit�s sont tenus d��tablir des listes �d�une dizaine de soci�t�s au maximum avec une r�partition �quitable des nationalit�s �, pr�cise le P-V. Le g�teau offert par la Sonatrach doit �tre partag� �quitablement ! Anomalies D�j� tr�s complexe, la situation devient ing�rable d�s le second trimestre de l�ann�e 2006. La direction g�n�rale du groupe ne parvient plus � contr�ler les actions des comit�s inter-activit�s. En plus de la large autonomie dont ont b�n�fici� ces structures, elles ont �galement la possibilit� de diviser les projets en lots et en sous-lots. Un saucissonnage qui va rajouter � la confusion. R�sultat : les premi�res anomalies ne tardent pas � appara�tre. Elles ont �t� consign�es par le directeur de la s�ret� interne de l�entreprise (DSIE) dans une longue s�rie de rapports adress�s au ministre de l�Energie et au P-dg de la Sonatrach. Voici un bref r�capitulatif des probl�mes � essentiellement d�ordre financier et s�curitaire � relev�s par ce responsable : �anomalies concernant les soci�t�s RPS, Lynx et SFP ; TRC (transport par canalisation) instruite de faire attention � TVI Lederer ; malgr� les recommandations du DSIE, l�EGZIK (zone p�troli�re de Skikda) a maintenu la consultation aupr�s des soci�t�s � probl�mes : TVI, Thales, Power Alstom Service et RPS suite aux instructions du vice-pr�sident Aval ; point d�alerte apr�s avoir re�u une correspondance de la chefferie (du gouvernement) au sujet d�une soci�t� isra�lienne de t�l�surveillance qui a propos� ses services � la Sonelgaz ��. Mais les recommandations du DSIE sont souvent rest�es lettre morte. Et certaines �soci�t�s � probl�mes� ont, malgr� tout, r�ussi � d�crocher des march�s. Interventions Outre les anomalies et la d�sorganisation, la gestion de ce programme de t�l�surveillance se caract�rise par de nombreux cas d�intervention de dirigeants de la Sonatrach au profit de certains op�rateurs. Un favoritisme flagrant facilit� par le mode de passation de march�. Le premier responsable a avoir us� de ce type de pratique n�est autre que le P-dg de la compagnie, Mohamed Meziane. Ce dernier aurait donn� son accord pour accorder des avenants au fran�ais Thal�s charg� du projet EGZIK et � l�allemand Funkwerk-Contel Plettac � qui a �t� confi�e la t�l�surveillance de la quasi-totalit� des sites de l�activit� amont. Il est utile de rappeler que R�dha Meziane, fils du P-dg de la Sonatrach, �tait un des cadres dirigeants de la filiale alg�rienne de cette entreprise. Le premier responsable du groupe p�trolier a �galement donn� son accord pour la demande d�avenants sur certains projets remport�s par l�op�rateur Martec. Fiasco La Sonatrach, malgr� les moyens financiers mis en �uvre, la souplesse des proc�dures et le caract�re d�urgence d�cr�t�, n�a pas r�ussi � achever son programme de t�l�surveillance. De janvier 2005 � novembre 2009, ce dossier a �t� inscrit � l�ordre du jour de dix CER. Sur le plan financier, la compagnie nationale a d�bours� plus de 68 milliards de dinars, 68 360 061 000 dinars pr�cis�ment. Le constat est sans appel : en novembre 2009, seuls seize projets ont �t� totalement r�ceptionn�s sur les quarante-deux inscrits ! Un fiasco suivi �tape par �tape par le ministre de l�Energie et des Mines et l�ensemble du staff dirigeant de la Sonatrach. Ces derniers ont, en effet, �t� tenus au courant gr�ce aux proc�dures de contr�le et de reporting internes. D�ailleurs, la lettre adress�e par le directeur g�n�ral de la s�ret� interne de l�entreprise (voir Le Soir d�Alg�rie du 6 juin 2010) est une preuve concr�te. Mais le comble est que la Sonatrach n�a plus aucun droit de regard sur la r�alisation de ses syst�mes de t�l�surveillance. En octobre 2009, le minist�re de la D�fense nationale reprend les r�nes � la faveur de la cr�ation de l�Etablissement de r�alisation de syst�mes de t�l�surveillance. �L��tablissement �value, pour le compte des pouvoirs publics, les dispositifs de vid�osurveillance d�ploy�s par les op�rateurs publics et priv�s dans l�espace public urbain. Il contribue, par son expertise, � l�adaptation de la r�glementation encadrant cette activit�. L��tablissement assure, en outre, pour le compte des pouvoirs publics, l�expertise et la r�alisation des syst�mes de vid�osurveillance au niveau des si�ges des institutions, des sites et points sensibles. Il m�ne toute action visant l�int�gration des syst�mes d�ploy�s par les op�rateurs publics et priv�s dans le dispositif global de vid�osurveillance des espaces publics�, pr�cise l�article 5 du d�cret pr�sidentiel portant cr�ation de cet organisme. Et c�est finalement l�ANP qui aura � g�rer la s�curisation de sites hautement sensibles que sont les infrastructures de la compagnie p�troli�re. T. H. Funkwerk et le fils du P-dg L�entreprise Funkwerk-Contel Plettac a-t-elle b�n�fici� d�un traitement de faveur dans la r�alisation du programme de t�l�surveillance de la Sonatrach? La r�ponse ne peut �tre qu�affirmative. Sinon comment expliquer que l�un des fils du P-dg de la compagnie p�troli�re figure parmi les gestionnaires de cette entreprise ? Ce n�est pas tout. Officiellement, Funkwerk- Contel Plettac est la seule entreprise engag�e dans ce programme � avoir d�croch� un march� de gr� � gr�. Initi� par la direction HSE (hygi�ne s�curit� environnement) de l�activit� amont, ce contrat concerne la s�curisation de la base du 24-F�vrier de Hassi-Messaoud. Mieux, il suffit de faire une simple comparaison des march�s attribu�s aux op�rateurs pour constater que Funkwerk-Contel Plettac a remport�, � elle seule, plus de 11 milliards de dinars. Pourtant, des documents de la Sonatrach prouvent que cette entreprise pratiquait des prix deux � trois fois sup�rieurs � ceux de ses concurrents. C�est notamment le cas du projet de t�l�surveillance du site LQS de l�activit� aval. Funkwerk-Contel Plettac �tait engag�e sur ce march� aux c�t�s de Cegelec et SNEF. Dans un rapport transmis au P-dg de la Sonatrach et au vice-pr�sident de l�activit� aval, le directeur de la s�ret� interne de l�entreprise (DSIE) rel�ve que les prix �lev�s sont dus �aux performances des �quipements qui d�passent les exigences du cahier des charges de la Sonatrach�. �Cette approche adopt�e par Funkwerk dans sa proposition commerciale explique le niveau de prix �lev� de son offre et montre que le caract�re concurrentiel de la consultation de Aval/LQS n�a pas �t� consid�r�. Funkwerk a expliqu� que les prix propos�s pour la consultation de Aval/LQS sont similaires � ceux pratiqu�s au niveau de l�activit� amont de Sonatrach�, soutient le DSIE dans ce rapport �labor� au terme d�une s�rie de rencontres avec les repr�sentants des trois entreprises. Mieux, le document pr�cise que l�offre de Funkwerk-Contel Plettac a �t� �tablie en dinars alg�riens en �incluant un facteur de risque de 25 % li� � la fluctuation du dinar par rapport � l�euro�.