Les Nations unies se sont mises de la partie en interpellant r�cemment le gouvernement alg�rien. Son Comit� des droits �conomiques, sociaux et culturels li� au Conseil �conomique et social de l'ONU vient de publier son rapport sur l'application par l'Alg�rie du �Pacte international sur les droits �conomiques, sociaux et culturels� (Pidesc). Le Comit� recommande notamment � l'Alg�rie �de lever l'�tat d'urgence mis en place en 1992 et qui a eu jusqu'� pr�sent des effets n�gatifs sur les droits �conomiques, sociaux et culturels dans le pays�. Le comit� note aussi qu�en Alg�rie �la corruption reste largement r�pandue malgr� les efforts r�cents pour endiguer le ph�nom�ne �, et recommande l�installation de �l�agence gouvernementale anti-corruption�. Pour rappel, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, avait fix� � la fin mars 2010 l'installation de �l'Observatoire de pr�vention de la corruption� : l'annonce avait �t� faite le 3 f�vrier dernier. Plus de deux mois plus tard, l��ch�ance n�a pas �t� respect�e et le Premier ministre n�en parle plus. RDV manqu�, encore une fois. Le ministre de la Justice avait �t� plus prudent : le 18 mars, devant les d�put�s, il avait pr�f�r� ne pas s'enfermer dans un calendrier, en se limitant � d�clarer la mise en place prochainement de �l�instance nationale de lutte contre la corruption�. Un jour, peut-�tre, ou jamais, certainement. Mais les lecteurs auront remarqu� que le Premier ministre et le ministre de la Justice ne parlent pas de la m�me chose. L'un �voque un �observatoire de pr�vention de la corruption�, qui, comme son nom l'indique, ne s'occuperait que de l'aspect pr�vention de la corruption, alors que pour le ministre de la Justice, le projet est plus vaste et engloberait toute la lutte contre la corruption avec son double volet, pr�ventif et r�pressif. La loi du 20 f�vrier 2006 relative � la pr�vention et � la lutte contre la corruption a pr�vu la cr�ation d'un �organe de pr�vention et de lutte contre la corruption� qui serait charg�, notamment, de proposer une politique globale de pr�vention de la corruption consacrant les principes d�Etat de droit et refl�tant l�int�grit�, la transparence ainsi que la responsabilit� dans la gestion des affaires publiques et des biens publics ; de dispenser des conseils pour la pr�vention de la corruption � toute personne ou organisme public ou priv� et recommander des mesures, notamment d�ordre l�gislatif et r�glementaire, de pr�vention de la corruption ainsi que de coop�rer avec les secteurs concern�s, public et priv�, dans l��laboration des r�gles de d�ontologie ; d��laborer un processus permettant l��ducation et la sensibilisation des citoyens sur les effets n�fastes de la corruption ; de collecter, centraliser et exploiter toute information qui peut servir � d�tecter et � pr�venir les actes de corruption notamment, rechercher dans la l�gislation les r�glements, les proc�dures et les pratiques administratives, les facteurs de corruption afin de recommander des r�formes visant � les �liminer (�) ; de recueillir, p�riodiquement, les d�clarations l�gales de patrimoine des agents publics, d�examiner et d�exploiter les informations qu�elles contiennent et de veiller � leur conservation ; de recourir au minist�re public en vue de rassembler les preuves et de faire proc�der � des enqu�tes sur des faits de corruption. Tout un programme. Il �tait une fois la loi du 20 f�vrier 2006 Or, la directive adress�e par le pr�sident de la R�publique � son Premier ministre en d�cembre dernier �voque notamment la cr�ation de deux instances diff�rentes et bien distinctes : l'une qui serait un �observatoire de pr�vention de la corruption� et l'autre, une �agence de r�pression de la corruption�. On est bien loin de ce qui est �nonc� dans la loi du 20 f�vrier 2006. 4 ann�es et 4 mois d'attente de l'installation de l��Organe national de pr�vention et de lutte contre la corruption � pour en arriver l� ? Le pouvoir aurait pu y mettre les formes, s�expliquer davantage et annoncer une r�vision de la loi n�06-01 du 20 f�vrier 2006 relative � la pr�vention et � la lutte contre la corruption, r�vision qui comprendrait notamment un �clatement de �l�organe� en deux entit�s, l�une de pr�vention, l�autre de r�pression. On ne peut pas installer un observatoire de pr�vention de la corruption sans modifier la loi du 20 f�vrier 2006 ! Tout �a ne fait pas s�rieux, et d�montre encore une fois, si besoin est, que du c�t� du pouvoir il n'y a jamais eu r�ellement de volont� politique � lutter contre la corruption. Mais plus grave encore, le 18 mars 2010, lors de cette s�ance de questions au gouvernement � l'Assembl�e nationale, le ministre de la Justice allait tenir des propos tr�s �tranges : le chef de l'Etat aurait des difficult�s � trouver 6 hauts fonctionnaires int�gres pour les nommer � �l�organe de lutte contre la corruption� En fait, selon le d�cret pr�sidentiel du 22 novembre 2006 (relatif � la composition et au fonctionnement de cet �organe�) il en faut 7 : 6 membres permanents et un pr�sident. Pour rappel, cet �organe� a �t� cr�� il y a un peu plus de 4 ans (loi du 20 f�vrier 2006 de pr�vention et de lutte contre la corruption), et pendant toute cette p�riode, les pouvoirs publics n'auraient pas trouv� de magistrats, de hauts fonctionnaires des finances et des officiers sup�rieurs de police judiciaire (toutes casquettes confondues) pour piloter cette �instance� ? Ce ne sont l� que contradictions gouvernementales, faux-fuyants et autres justificatifs peu cr�dibles pour essayer d'expliquer le retard de 4 ans pour l'installation effective de cette �instance�. Et maintenant que de grands scandales de corruption ont �clat� � sur fond de r�glement de comptes au sein du pouvoir �, on se rappelle qu'il existe une loi qui n'a jamais �t� appliqu�e et qui pr�voit notamment l'installation d'un �organe national de pr�vention et de lutte contre la corruption �. Pour la petite histoire, retour en arri�re de 14 ans : le 9 juillet 1996, le chef du gouvernement alg�rien, Ahmed Ouyahia, annon�ait la cr�ation de �l'Observatoire national de surveillance et de pr�vention de la corruption � (ONSPC), par d�cret pr�sidentiel de Zeroual, mais Ouyahia ne signa le r�glement int�rieur de l'ONSPC que le 1er f�vrier... 1998 ! Cet �Observatoire� n'aura m�me pas le temps d'observer quoi que ce soit, puisqu'il fut dissous par l'actuel chef de l'Etat le 12 mai 2000, au m�me titre que d�autres institutions consultatives, sous pr�texte que ces �excroissances de l�Etat, outre leur inutilit� et la dilution des responsabilit�s qu�elles entra�nent, se traduisent par des ponctions injustifi�es sur les ressources publiques�, ainsi que le d�clara officiellement Bouteflika. Alors cet �Observatoire� ou cet �Organe� ou cette Agence de pr�vention et/ou de lutte contre la corruption, encore une institution mort-n�e, ou gel�e � l�image de la Cour des comptes ? Le gouvernement a laiss� passer l�orage provoqu� par le rapport du Comit� des droits �conomiques, sociaux et culturels des Nations unies ; le minist�re des Affaires �trang�res a gard� le silence : il leur est difficile de s�en prendre ouvertement aux Nations unies. Laisser faire, laisser braire�.