Depuis quelques années, la municipalité de Hammadi, limitrophe de l'aéroport international de Dar-el-Beïda (Alger), mais située sur le territoire administratif de la wilaya de Boumerdès, a acquis, auprès des services de sécurité et des fonctionnaires de la Direction du commerce de la wilaya de Boumerdès (DC/WB) la mauvaise réputation d'être une plaque tournante de trafics de marchandises. Située dans une région stratégique à quelques minutes du plus grand port du pays, la ville de Hammadi et sa périphérie ne sont pas éloignées de l'un des dix ports secs que compte la wilaya de Boumerdès plus ceux implantés dans l'est de la wilaya d'Alger. L'ouest de la wilaya de Boumerdès compte également un nombre important d'unités de production. «Il n'y a pas moins d'un millier de hangars fermés à Hammadi», nous révèle un cadre de la DC/WB. Notre vis-à-vis ne se fait aucune illusion quant à la situation par rapport à la loi des marchandises se trouvant entre les murs de ces hangars. D'ailleurs, les deux dernières affaires qu'ont découvertes les contrôleurs de la DC/WB concernant la manipulation de la date de péremption de milliers de boîtes de concentré de tomate et la destruction illégale de lait pour bébés contaminé qui a été importé et payé en devises ont été localisées à Hammadi où ces produits ont été entreposés. Les agents de l'Etat ne sont pas à leur première affaire dans leur chasse constante aux affaires de marchandises importées ou produites dans des conditions douteuses et circulant, par ailleurs, illégalement dans cette région. Des Chinois et des entreprises chinoises impliqués Pour rappel, le Soir d'Algérie avait rapporté, en exclusivité, le 15 juin 2015, deux affaires d'importations frauduleuses de marchandises avant d'être emmagasinées dans des entrepôts à Hammadi. Dans la première affaire découverte toujours à Hammadi, étaient impliquées deux petites entreprises (Sarl Yachang et Sarl Zenwei Kessing Faw) appartenant à des ressortissants chinois et une filiale appartenant au holding ESCES, également chinois. Lors d'un contrôle routinier dans un garage de mécanique appartenant à la Sarl Yachang, dont le registre de commerce est établi pour les travaux de mécanique (prestations), les agents de contrôle de la DC/WB avaient découvert que cette Sarl détenait un énorme stock de marchandises importées frauduleusement comprenant pas moins de 69 types d'articles. Dans cette liste figuraient, en effet, des moteurs pour machines électriques, des perceuses, des scies électriques, des extincteurs, des machines de production de parpaing, de l'outillage à main, de la quincaillerie et même des articles de bureautique. Les agents de la DC/WB avaient évalué le stock du lot de marchandises importées illégalement à 55 233 663,01 DA (plus de 55 milliards de centimes). Pendant que les agents de l'Etat poursuivaient leurs investigations, voilà que le gérant de la Sarl Zenwei Kessing Faw, un autre Chinois, se présentait à la Direction du commerce de Boumerdès pour dire aux enquêteurs que la marchandise lui appartient et qu'il l'avait importée dans le cadre de son contrat de sous-traitance dans le projet de la Grande-Mosquée d'Algérie. Il semblerait qu'effectivement, ces marchandises auraient transité par ce projet qui bénéficie d'un véritable couloir vert, sous haute protection politique, permettant aux Chinois d'introduire n'importe quoi mais facturé sur le budget, gardé secret, du projet en question. Billets de banque, pétards, fumigènes, ivoire, vins de luxe,… Durant la même période de juin 2015, une seconde affaire, liée à l'importation illégale et la détention de marchandises prohibées, a démarré, toujours à Hammadi, par l'arrestation de six Chinois en résidence illégale en Algérie. Les six individus avaient été présentés devant la justice qui les a inculpés pour séjour illégal. Ils ont été, par conséquent, placés sous mandat de dépôt. Après interrogatoire mené par les gendarmes de Boumerdès, il s'est avéré que ces derniers travaillaient illégalement. Ils étaient en charge de fabrication d'équipement en menuiserie aluminium (portes et fenêtres) pour le compte d'un holding chinois ESCES qui a la charge de réaliser des milliers de logements en Algérie. Le hangar servant d'atelier de production clandestin de portes et fenêtres a été construit par l'entreprise chinoise en question sur le terrain agricole que leur a loué un privé algérien. Notons que ces travailleurs clandestins utilisaient une matière importée de Chine alors qu'à moins de 2 km de ce lieu clandestin, il existe une unité industrielle qui produit le profilé en aluminium. Après quelques recherches, les gendarmes de Boumerdès ont obtenu de la justice le feu vert pour perquisitionner. Ce qui les a menés à une grosse découverte. Ils ont, en effet, trouvé dans ce hangar des conteneurs de centaines de milliers de pétards, des fumigènes, ainsi que 2 500 bouteilles de spiritueux chinois de luxe. Quelques mois plus tard, en décembre 2015 (le Soir d'Algérie du 7 décembre), les gendarmes de la section de recherche du Groupement de la Gendarmerie de Boumerdès avaient mis la main, après perquisition légale, sur un véritable trésor. Dans une villa en location, pas loin de Hammadi, les gendarmes ont trouvé la somme de 1 milliard et 500 millions de centimes en monnaie nationale, 20 kg d'ivoire, 11 152 diverses bouteilles de boissons alcoolisées, 600 cartouches de cigarettes de marque étrangère et un important lot de produits alimentaires (pâtes alimentaires, thé, haricots secs, riz,...). Les gendarmes avaient arrêté trois Chinois âgés de 21 à 53 ans. En clair, la ville de Hammadi finira, un jour ou l'autre, par poser de gros problèmes aux autorités. Abachi L.