Comment vivre avec son diabète quand on a l'âge de l'insouciance, comment assumer sa différence et, surtout, comment apprend-on à vaincre les privations quand un régime alimentaire est imposé dès le jeune âge. C'est ce que nous tenterons de développer dans cet éclairage. Pour un malade diabétique, les injections d'insuline à vie, la prise récurrente de médicaments, le régime alimentaire et l'hygiène de vie stricts ne suffisent pas. Il lui faut un complément indispensable au traitement médicamenteux : la prise en charge psychologique. Réussir une meilleure adéquation entre le médical et le psychologique, c'est créer les conditions à la fois d'une santé physique et psychique. L'apparition du diabète chez une personne signifie un changement de vie draconien. Pour faire face aux facteurs émotionnels négatifs qui ont des conséquences directes sur la stabilisation de la maladie, le suivi psychologique est un impératif. La survenue, puis la présence du diabète chez un enfant ou un adolescent ne peut être vécue comme une situation banale. L'impact sur la vie familiale, sociale et psychique implique nécessairement des adaptations. Le diabète est souvent vécu comme un bouleversement. Même s'il influence fortement la vie de l'enfant ou de l'adolescent qui ne se résume pas à sa maladie. On dit : «Il a un diabète», plutôt que : «Il est diabétique.» C'est le même enfant, avec une maladie. Un enfant avec un diabète est d'abord un enfant. Cette maladie va durer : on sait la soigner, mais pas encore la guérir. Le diabète : intrus et familier En 1919, Freud introduit la notion «d'inquiétante étrangeté» pour désigner ce sentiment étrange et troublant de malaise que l'on ressent quand ce qui nous était familier devient tout à coup étranger. Pour expliquer ce sentiment, il donne un exemple de sa propre vie, où lors d'un voyage en train il voit un vieil homme entrer dans son compartiment avant de s'apercevoir avec effroi, quelques instants plus tard, qu'il s'agissait de son propre reflet dans la vitre de la porte qui s'était ouverte. Il s'agit d'une expérience déplaisante du fait que l'on ne se reconnaisse pas et qu'en plus cet «étrange nous-même» nous déplaise. Il s'agit d'une forme particulière de l'effrayant, qui provoque une désorientation, une perte de repères : on ne sait plus à quoi s'en tenir, car le familier, ce que l'on a connu depuis toujours, n'est plus fiable. C'est un rapport soudain étrange et étranger à son propre corps qui peut apparaître suite à l'annonce d'une maladie, qui plus est chronique. Une étrangeté qui se révèle au cœur de l'intime, du plus familier. L'inquiétante étrangeté peut aussi être considérée comme une étrange familiarité car cela nous concerne personnellement. L'annonce d'un diabète peut provoquer également, chez la personne qui le déclare, une rupture dans ce que Winnicott appelle le sentiment de continuité d'existence. Notre corps nous donne le sentiment d'exister, il fonde notre identité. Le corps «sain» est silencieux : quand tout va bien, il y a une évidence, une familiarité des ressentis corporels. L'irruption d'une maladie comme le diabète est alors un moment où le corps cesse d'être familier, où il nous devient étranger. Ce qui était familier se transforme en inquiétant, troublant. Cela peut susciter l'angoisse, car on peut passer par un véritable moment de dépersonnalisation : «je ne me reconnais plus comme celui ou celle que j'étais.» L'annonce de la maladie peut ainsi provoquer chez l'enfant une peur, voire une angoisse de ne plus se reconnaître dans les yeux de l'autre, les parents en l'occurrence. «Je ne suis plus comme je l'étais avant dans les yeux de mes parents, m'aimeront-ils encore ?» Il est alors important de prendre en compte ces angoisses, voire de les prendre en charge. Pourquoi le suivi psychologique du diabétique est-il nécessaire ? Parce que le stress, irrémédiablement lié au diabète, aggrave la maladie et entraîne des complications. Le choc ressenti à l'annonce de la maladie (surtout si le diabétique a un parent mort de la même maladie), l'apparition de symptômes dérangeants (faim, palpitations, tremblements...), la modification des habitudes de vie, l'anxiété générée par l'affichage du taux de glycémie et par la survenue des complications, etc. Des études ont démontré que non seulement le stress peut être un facteur de déclenchement du diabète, mais chez les sujets déjà atteints, il a des effets négatifs directs sur l'équilibrage de l'insuline. Lors d'une situation de stress, le corps réagit en sécrétant des hormones : adrénaline, cortisol, glucagon. Ces hormones sont naturellement destinées à provoquer une hausse de la glycémie, dans le but de procurer au corps l'énergie dont il a besoin pour réagir physiquement (fuir ou combattre). Chez les personnes diabétiques, cette hausse de glycémie perturbe l'équilibre de l'insuline, déjà présente en quantité insuffisante ou carrément absente. Le sujet diabétique se trouve encore plus exposé aux complications liées au mal. Heureusement que tout cela peut être évité. Car, au plan psychologique, pouvoir parler de ses difficultés ou de son sentiment de ras-le-bol contribue déjà à réduire le stress. La famille et les amis du diabétique, en étant à son écoute, peuvent à leur niveau permettre de mieux le gérer. Sinon le recours à un psychologue est nécessaire pour éviter le pire. Parce que le diabétique doit organiser sa vie autrement et peut avoir besoin d'aide pour l'éduquer à cela. Chez les enfants, la situation est encore plus délicate dans la mesure où le diabète exige une organisation rigoureuse qui ne fait pas bon ménage avec leur «insouciance». Comment se déroule le suivi psychologique du diabétique ? L'approche du psychologue connaît des variantes et doit être personnalisée en fonction de chaque individu et de son rapport avec la maladie. Mais comme pour le suivi de toutes les maladies chroniques, celui du diabète va s'articuler autour de deux points essentiels : l'acceptation de la maladie et l'éducation à la vie de diabétique. L'acceptation de la maladie La première tâche du psychologue consiste à aider le diabétique à assimiler le choc à l'annonce de sa maladie et à lui éviter la dépression. Il s'agit ici de faire le deuil de son mode de vie antérieure. Le psychologue doit alors créer une relation de confiance avec son patient diabétique, indispensable pour que ce dernier puisse exprimer le plus librement possible les émotions négatives générées par la maladie (colère, peur, culpabilité, honte) afin de dissiper les mécanismes qui pourraient en résulter (révolte, dénégation, pseudo-acceptation...). Attention ici aux solutions médicamenteuses ! Cumuler les anxiolytiques et antidépresseurs aux autres traitements pour soigner à la fois le diabète et la santé psychique n'est pas toujours nécessaire, et peut conduire à de graves dommages. L'idéal serait de trouver les mots justes pour transformer la perception que le diabétique a de sa maladie, d'en accepter la vérité, afin de mieux vivre avec. L'éducation à la vie de diabétique A cette deuxième étape, le psychologue aide son patient à intégrer toutes les informations relatives à sa maladie, à réduire psychologiquement les contraintes liées à celle-ci et à acquérir l'hygiène de vie indispensable à la stabilisation de son diabète. Le patient append à veiller sur lui-même, à acquérir de la constance, de la régularité, de la maîtrise de soi et à développer une personnalité plus encline à la modération. La première tâche du psychologue consiste à aider le diabétique à assimiler le choc à l'annonce de sa maladie et à lui éviter la dépression. Le psychologue va également encourager le patient à se faire plaisir par de nombreuses activités physiques et les loisirs, pour éviter de s'enfermer dans le mal-être, à gérer son stress à travers des techniques de relaxation. Il lui conseillera d'avoir une vie active pour éviter le désœuvrement et l'ennui, facteurs dommageables pour la santé psychique du diabétique. Cet accompagnement psychologique rendra l'effet du traitement médicamenteux contre le diabète plus optimal et permettra d'établir l'équilibre entre la santé physique et psychique du diabétique.
Comment aider son enfant à être autonome L'autonomie est une étape importante dans la vie du petit diabétique. Cela l'aide à avoir confiance en lui, à se sentir moins dépendant des autres et surtout lui donner ce sentiment de ne pas être différent des autres. Apprendre à gérer son diabète se fait pas à pas. Quand le diagnostic est posé très tôt, les enfants grandissent avec et deviennent progressivement autonomes : - Quand l'enfant est au préscolaire, il s'intéresse au traitement de son diabète de différentes manières : en allumant le lecteur, en y insérant une bandelette… - De 6 à 11 ans, il est de plus en plus impliqué dans la gestion de son traitement. Quand il termine ses classes du primaire, il sait contrôler sa glycémie, manipuler sa pompe à insuline s'il en porte une ou préparer l'injection avec son stylo à insuline. Certains commencent même à se piquer. L'apprentissage se poursuit jusqu'à l'entrée au lycée, moment-clé où les parents auront entièrement passé le relais et où l'adolescent doit donc pouvoir être tout à fait autonome. La vitesse d'apprentissage et donc, l'âge auquel l'enfant est autonome, est variable et dépend en grande partie de l'acceptation de la maladie. De plus, quel que soit l'âge de l' enfant, cette prise d'autonomie doit se faire de façon progressive et sans imposer des actes refusés par l'enfant. Faire confiance à son enfant En tant que parent, il peut être angoissant de laisser son enfant se traiter lui-même. Voici quelques conseils pour faciliter le «relais» : - ayez confiance en les capacités de votre enfant et partez du principe qu'il fera toujours ce qui est bon pour lui ; - ne paniquez pas si votre enfant ne maîtrise pas parfaitement ses gestes du premier coup : être autonome ne s'acquiert pas en un jour ! - ne perdez pas de vue l'objectif final : l'autonomie. Laissez votre enfant faire des erreurs, au risque que son diabète soit moins équilibré durant une petite période ; - faites confiance à l'équipe médicale pour prendre le relais et corriger le tir en cas de besoin. Le diabète ne doit pas être source de conflits entre les parents et l'enfant. n Sources internet