Les cris racistes dont a été victime mercredi soir le défenseur franco-sénégalais de Naples Kalidou Koulibaly ont soulevé l'indignation jeudi en Italie et ont entraîné des sanctions rapides et plus sévères qu'à l'accoutumée, avec deux matchs à huis clos infligés à l'Inter Milan. Phénomène récurrent dans le football italien, les cris de singe qui ont visé Koulibaly au stade San Siro donnent rarement lieu à d'autres punitions que des amendes ou des fermetures de stade ou de tribunes avec sursis. La Juventus Turin avait ainsi simplement écopé de la fermeture d'une tribune pour un match, plus un autre avec sursis, et d'une amende de 10 000 euros, en octobre à la suite de chants racistes visant -déjà- le défenseur de Naples. Mais cette fois, l'instance disciplinaire de la Ligue italienne a été rapide et ferme, infligeant à l'Inter deux matchs à huis clos à San Siro. Le club milanais a également été sanctionné d'un huis clos partiel concernant le Virage Nord, où sont installés ses principaux groupes de supporters. Dans son communiqué, la commission de discipline mentionne des «chants offensants à caractère raciste (...) envers Kalidou Koulibaly», mais aussi des «chants insultants à caractère territorial» à l'encontre des supporters napolitains. Elle précise que Koulibaly sera lui-même suspendu deux matchs après son expulsion mercredi. La première journée de suspension est liée à une accumulation de cartons jaunes. La deuxième aux «applaudissements ironiques» qu'il a adressés à l'arbitre. Dans un communiqué publié dans la soirée, l'Inter assure de son côté que «depuis le 9 mars 1908 (la date de création du club), Inter signifie intégration, accueil et avenir» et que le club a toujours «dit non à toute forme de discrimination». «C'est pourquoi nous nous sentons en devoir aujourd'hui, une fois de plus, d'affirmer que celui qui ne comprend pas notre histoire (...) n'est pas un des nôtres», ajoute le club milanais.
Le précédent Muntari Koulibaly a été exclu à un quart d'heure de la fin du match. Le score était alors de 0-0 et Naples a finalement perdu 1-0. Après la partie, l'entraîneur du club, Carlo Ancelotti, a déclaré que la suspension du match avait été demandée à trois reprises, sans succès. Jeudi, l'ancien Messin a reçu le soutien écrit de plusieurs de ses équipiers, mais aussi de Cristiano Ronaldo ou de Mauro Icardi, le capitaine de l'Inter. Le Ghanéen de Sassuolo Kevin-Prince Boateng, victime en 2013 d'actes racistes alors qu'il évoluait à l'AC Milan, a également témoigné sa sympathie à l'international sénégalais, qui avait déjà essuyé des cris de singe à Rome en février 2016, lors d'un match contre la Lazio. Plus récemment, le milieu français de la Juventus Blaise Matuidi avait été victime de faits similaires en janvier 2018 à Cagliari et en décembre 2017 à Vérone. Lors de la saison 2016-2017, le Ghanéen Sulley Muntari, qui évoluait à Pescara, avait quitté la pelouse de Cagliari après avoir été lui aussi la cible de cris racistes. Cela lui avait valu un deuxième avertissement et une suspension d'un match, finalement annulée en appel. Avant eux, l'Ivoirien Zoro, le Nigérian Omolade ou le Camerounais Eto'o avaient, déjà, été la cible d'actes racistes, sans que cela donne lieu à de réelles sanctions.
Un supporter tué Les choses pourraient donc changer cette fois et la préfecture de police de Florence a déjà interdit la venue des supporters de l'Inter samedi à Empoli, pour le dernier match avant la trêve. Les événements de San Siro ont aussi été condamnés par des responsables politiques et sportifs italiens, comme le maire de Milan Giuseppe Sala (centre-gauche), qui a déclaré avoir eu «honte» et a demandé «pardon» à Koulibaly au nom de sa ville. «Nous n'acceptons pas que de tels comportements abiment le football», a aussi déclaré le nouveau président de la fédération italienne Gabriele Gravina, qui souhaite simplifier les règlements pour permettre aux arbitres d'interrompre plus facilement un match. L'émotion était d'autant plus forte en Italie que de graves incidents ont également éclaté en dehors du stade mercredi, provoquant la mort jeudi d'un supporter de l'Inter de 35 ans. Celui-ci a été renversé par un véhicule en marge d'une attaque menée contre des minibus transportant des tifosi napolitains par une centaine de supporters de l'Inter, mais aussi de Varèse et de Nice, selon la police italienne. Le ministre de l'Intérieur et homme fort du gouvernement, Matteo Salvini, a annoncé qu'il convoquerait en janvier dirigeants et supporters de Serie A et B. «Ce n'est pas possible de mourir pour un match de foot», a-t-il dit, sans mentionner les insultes contre Koulibaly.