Les Algériens ont été de nouveau appelés à manifester demain à travers l'ensemble du territoire national. Jugé «crucial» par plusieurs acteurs politiques, le rendez-vous alimente depuis plusieurs jours les discussions des citoyens. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Inévitablement, les «invitations» à sortir nombreux dans les rues du pays se multiplient sur les réseaux sociaux à la veille de l'évènement. L'appel, pourtant anonyme cette fois encore, a trouvé grand écho chez les internautes. Sur Facebook, la mobilisation est de mise depuis un moment, mais elle semble déjà dépasser l'espace virtuel. «On se retrouvera le 1er mars», lançaient plusieurs jeunes ce lundi lors de la dispersion du rassemblement auquel avait appelé Mouwatana. Plusieurs d'entre eux ignoraient tout de la situation qui se déroulait place Audin. «Je suis venu acheter des médicaments à ma mère souffrante», confie l'un d'eux, «je n'ai pas pu résister, ces slogans nous interpellent tous». Très vite, ils se joignent au mouvement, crient avec les autres, puis se retirent moins d'une heure après en promettant de revenir vendredi 1er mars. Ils ne sont pas les seuls. A peine lancé, l'appel à rééditer l'exploit du 22 février dernier s'est répandu comme une traînée de poudre. Il a été aussi et surtout entretenu par plusieurs acteurs politiques de l'opposition qui l'évoquent comme le point culminant de la contestation en cours depuis cette date. Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), a annoncé qu'elle sera présente en qualité de citoyenne ce jour-là. «Le vendredi 1er mars pourrait être une journée charnière, a-t-elle déclaré à ce sujet, on verra ce qui va se passer et quels slogans seront scandés». Abderrezak Makri, président du MSP (Mouvement de la société pour la paix), a déjà pris part à la manifestation du vendredi passé, et laisse entendre qu'il se mêlera une nouvelle fois à la foule ce week-end. Opposés au processus électoral en cours, et au cinquième mandat plus particulièrement, d'autres partis, comme le RCD, ont laissé des centaines de leurs militants prendre part aux manifestations qui se sont déroulées. Dans la foule, pas de distinction entre activistes et citoyens ordinaires, cependant. Depuis plus d'une semaine, des milliers de personnes se sont retrouvées ainsi, sans couleur politique ni encadrement émanant d'un quelconque mouvement dans les rues du pays. Le niveau de mobilisation sera-t-il maintenu ce vendredi ? Les Algériens seront-ils aussi nombreux à répondre à l'appel du 1er mars ? Et si oui, les services de sécurité se contenteront-ils, encore une fois, d'encadrer les foules sans verser dans une grande répression ? Jusque-là, instruction semble avoir été donnée de ne pas réprimer au sens réel les manifestants. Ce 22 février, les brigades anti-émeutes avaient visiblement uniquement l'ordre de disperser les manifestations et de les écourter en usant parfois de gaz lacrymogènes contre lesquels elles n'étaient pas elles-mêmes protégées. Aux abords des zones sensibles, telles que la présidence de la République, où les citoyens ont tenté de se rendre, l'important dispositif mis sur place paraissait, par contre, faire montre d'une plus grande disposition à agir en cas de débordement. Lundi dernier, le rassemblement organisé par Mouwatana s'est transformé en véritable manifestation à laquelle ont pris part de très nombreuses personnes non concernées au départ. Dans un premier temps, les policiers ont tenté de faire échouer le mouvement en procédant à de très nombreuses interpellations (plusieurs personnes âgées ont été embarquées) et en se livrant à des intimidations qui ont obtenu l'effet inverse que celui recherché. Face à certaines images qu'ils ne supportaient pas, les curieux ont rejoint la masse contestataire et plus d'un millier de personnes se sont ainsi retrouvées à manifester au centre de la capitale. Débordées, les forces de l'ordre ont uniquement usé de gaz lacrymogènes pour disperser la foule. Ce mardi, et peu de temps après la fin des marches organisées par les étudiants et lycéens, des affrontements ont eu lieu (au centre-ville toujours) entre des groupes de jeunes et des CRS. Dans l'ensemble, toutes les marches organisées à travers l'ensemble du pays se sont également déroulées sans incidents. Un appel au calme avait été lancé par les initiateurs de tous les mouvements en cours et toutes les personnalités politiques ont, elles aussi, mis en garde contre tout recours à la répression. Une fois de plus, les auteurs de l'appel du 1er mars ont insisté sur le caractère pacifique que doit revêtir la protestation ce vendredi, une journée spéciale durant laquelle tout un chacun pourra surtout juger du degré de la contestation en cours. A. C.