Apple devait dévoiler hier lundi un service de vidéo en streaming au cours d'un show en Californie où sont attendues quelques stars d'Hollywood, prêtes à aider la marque à la pomme à venir concurrencer Netflix. Fidèle à sa culture du secret, Apple a laissé depuis plusieurs semaines circuler la rumeur selon laquelle les comédiennes Jennifer Aniston, Reese Witherspoon ou le réalisateur de plusieurs épisodes de «Star Wars» J.J. Abrams devraient être présentes à l'événement organisé au siège du groupe, dans la Silicon Valley. «Il semble évident qu'ils vont lancer un nouveau service dans la vidéo», confirme Avi Greengart, analyste spécialisé dans les technologies. Reste à savoir combien va coûter le service et comment Apple va être en mesure de se distinguer dans un marché de la vidéo en streaming déjà très peuplé, et où il arrive assez tard, surtout par rapport à Netflix, de loin de leader du secteur avec 140 millions d'abonnés. «Visiblement, Apple dépense beaucoup en contenus originaux», le nerf de la guerre indispensable pour attirer les abonnés, ajoute M. Greengart. L'enjeu est de taille pour Apple, pressé de trouver d'autres relais de croissance que son iPhone, qu'il écoule encore par dizaines de millions chaque trimestre, mais dont les ventes ont baissé fin 2018, dans un marché du smartphone largement saturé. Et c'est dans les services qu'Apple semble chercher un nouveau souffle : sur les trois derniers mois de 2018, le chiffre d'affaires tiré des services («cloud», Apple Pay, iTunes, Apple Music...) a affiché une hausse de 19%, à presque 11 milliards de dollars. Outre des moyens financiers gigantesques, Apple a une force de frappe incomparable, avec 1,4 milliard d'iPhone ou d'iPad en circulation dans le monde, sur lesquels il pré-installe ses services. Apple a déjà un pied dans la vidéo, via iTunes (achats à la pièce) ou Apple TV, qui permet l'accès à des plateformes tierces, ou encore avec une émission culte comme «Carpool Karaoke», mais c'est encore timide. Il a pour l'instant essentiellement annoncé la signature d'un contrat avec la papesse de la télé américaine Oprah Winfrey. Il va donc lui falloir frapper fort pour damer le pion aux concurrents actuels ou futurs sur un marché en plein boom. Disney est en particulier très attendu avec sa plateforme Disney+ prévue pour cette année, de même que WarnerMedia, ex-Time Warner racheté par l'opérateur télécom AT&T. Il faut aussi compter avec YouTube (Google), très populaire, et qui propose accès gratuit et payant. Malgré l'omniprésence de Netflix, les nouveaux entrants comptent sur le fait qu'il y a encore de la place sur le marché, à mesure que les consommateurs changent leurs habitudes, privilégiant les abonnements directs à des plateformes à la demande au détriment des traditionnels bouquets satellite et câble. Selon l'Association américaine du cinéma (MPAA), le nombre de souscriptions dans le monde à ce type de plateformes a cru de 27% entre 2017 et 2018 pour atteindre 613,3 millions, dépassant pour la première fois le nombre d'abonnements au câble (556 millions, en baisse de 2%). Reste à savoir ce qu'Apple va proposer comme contenu sur sa plateforme. D'autant que WarnerMedia ou Disney arrivent sur le marché forts de catalogues impressionnants : tout le catalogue télé ou cinéma de Warner, ainsi que les programmes de HBO (Game of Thrones) pour le premier; le catalogue Disney, mais aussi les contenus récupérés de 21st Century Fox, récemment acquis, pour le second. Au menu notamment, les lucratives franchises Star Wars ou des superhéros Marvel. Daniel Ives, analyste chez Wedbush Securities, estime du coup qu'Apple aurait besoin, pour devenir un acteur majeur du marché, d'acheter une entreprise qui produit films, séries ou émissions, comme CBS ou Sony Pictures. Outre ce service de streaming, Apple devait annoncer lundi un service d'abonnement à des titres de presse.