Encore une fois, Constantine était au rendez-vous avec la protestation pacifique pour se joindre aux autres wilayas du pays et exiger un changement radical. La proposition d'écarter le Président Abdelaziz Bouteflika n'a pas suffi à calmer la contestation contre le régime. «Nous sommes le peuple et nous n'acceptons personne pour parler en notre nom», confia ammi Saïd, un retraité de 72 ans qui a participé à toutes les marches depuis la deuxième semaine et anime, avec les jeunes de son quartier, les débats en préparant à chaque fois les slogans et les pancartes . Cette fois-ci, il a choisi d'illustrer ses banderoles avec la photo du cheikh Ben Badis avec des messages de plus en plus virulents à l'encontre du régime. Sitôt la prière achevée, c'est une marée humaine qui a envahi, tout d'un coup, les rues de la ville des Ponts scandant des slogans anti-pouvoir : «FLN dégage» ; «Non à la îssaba» ; «Oui pour le changement, oui pour la justice»; «Vous avez spolié le pays» et encore «Djeïch chaâb khaoua khaoua». Ils étaient plus de 100 000 manifestants de tous âges : femmes, enfants, vieillards, jeunes et moins jeunes de tous les profils qui ont brandi l'emblème national et répété des chants patriotiques. «On va gagner, cette caste et ses autocrates doivent partir», dira Dr Benani, un acteur de la société civile constantinoise, accompagné par ses enfants. Il insista : «Nous devons donner l'exemple à nos enfants et leur montrer la voie.» De son côté, Me Naïdja, avocat à la cour de Constantine, précise que sa participation aujourd'hui à cette marche est pour expliquer l'article 102 et les dispositions de loi en soulignant : «A la fin, nous aurons le président du Sénat Bensalah pendant 45 jours et dans le pire, ce sera au président du Conseil constitutionnel Tayeb Belaïz de décider pour nous.» Et d'ajouter : «Et dans ces deux cas de figure, c'est une grosse couleuvre qu'on veut nous faire avaler.» Durant cette manifestation, plusieurs présidents d'associations, de citoyens et autres militants politiques ont pris part à la marche pour dénoncer les tentatives du pouvoir d'infiltrer le mouvement et le faire représenter par de faux représentants et c'était avec une grande fierté que les manifestants sillonnaient la ville parée aux couleurs nationales. C'est l'ensemble des quartiers de Constantine qui se voient envahis par des milliers de vendeurs du drapeau national et autres gadgets censés symboliser l'ardeur et l'amour de la patrie tout au long de la semaine. Ilhem Tir