Le pays s'apprête à vivre une journée très tendue aujourd'hui. Les deux Chambres du Parlement se réunissent ce matin pour constater la vacance du poste de président de la République. Sauf surprise de dernière minute, Abdelkader Bensalah sera désigné d'office chef d'Etat par intérim, ce qui va à l'encontre des revendications du mouvement populaire qui a appelé à une forte mobilisation de rue durant la journée. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - L'enjeu est de taille et focalise l'attention de tous les Algériens depuis une semaine. Il permettra en particulier de juger et évaluer la démarche dans laquelle s'inscrit Gaïd Salah qui demeure seul maître à bord depuis la démission de Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril dernier. Celui-ci a affirmé à plusieurs reprises que son intrusion sur la scène politique ne devait être perçue que comme une réponse aux revendications populaires. Une semaine auparavant, il avait haussé le ton exigeant l'application immédiate de l'article 102 ce qui a eu pour effet d'accélérer la démission du Président entré un court moment dans un bras de fer sans issue. Dans son dernier discours, le chef d'état-major avait tenu, une fois de plus, à mettre en avant les exigences de la rue pour justifier son intervention. Victorieuse, cette rue s'est mobilisée davantage les vendredis suivants réclamant le «départ de tous», sachant pertinemment que la prochaine étape à franchir est celle de Bensalah. Pour l'heure, et durant toute la semaine, aucun signe démontrant que le processus allait dans ce sens n'a été enregistré d'un point de vue officiel. Un éditorial du quotidien d'Etat El-Moudjahid a cependant attiré l'attention dimanche. «Le peuple a été clair dans ses revendications vendredi, «départ du nouveau gouvernement, départ du trio Bedoui-Belaïz Bensalah, commission indépendante d'organisation des élections et jugement de la bande», écrivait alors le journal tout en estimant qu'un «tel programme n'est ni déraisonnable ni difficile à réaliser» et qu'il n'était pas «impossible de trouver un homme consensuel ayant l'étoffe et le sens de l'Etat pour conduire cette courte transition». Lundi, El-Moudjahid est cependant revenu sur le sujet, en éditorial toujours, mais pour affirmer cette fois que ce ne sont pas «les figures du système qui organisent la transition, elles ne sont là que pour une période très courte et vont disparaître juste après. Pour le président intérimaire par exemple, c'est d'assurer la continuité de l'Etat car il n'est pas candidat à l'élection présidentielle, et celui du gouvernement réside dans l'appui logistique. L'enjeu principal (…) réside dans la mise en place d'une commission indépendante chargée, non pas de la surveillance des élections mais de tout le processus électoral». Changement de programme ? Confusion ? Dans ce contexte marqué par de nombreuses interrogations, les deux Chambres du Parlement ont donc prévu (et en vertu de la législation) de se réunir aujourd'hui au Palais des Nations. C'est la seconde étape de la mise en application de l'article 102 qui devrait, sauf évènement de dernière minute, aboutir à la désignation d'office de Bensalah chef d'Etat intérimaire pour une période de 90 jours. Il se trouve que cette réunion se déroulera en l'absence de plusieurs groupes parlementaires. Le MSP, le RCD, le FFS, le PT puisqu'il a décidé de démissionner de l'APN, et El Adala ont décidé de boycotter cette cérémonie. Dans une déclaration faite à la presse hier, le chargé de communication du FLN a, de son côté, exigé la démission de Abdelkader Bensalah. Les Algériens ont décidé de faire de cette échéance une date importante dans le mouvement de contestation en cours depuis le 22 février dernier, et appelé, de ce fait, à une forte mobilisation durant la journée. Cet appel coïncide avec la manifestation hebdomadaire (les mardis) des étudiants. A. C.