En principe, la vacance du poste de président de la République a été déjà réglée «en haut lieu». La nature ayant horreur du vide, en particulier en politique, le successeur du président démissionnaire devrait être désigné au plus tard mardi, pendant la réunion des deux chambres du Parlement en session extraordinaire. L'ordre du jour pour les parlementaires est simple : appliquer l'article 102 de la Constitution et désigner, selon ses dispositions, le chef de l'Etat qui doit pendant 90 jours gérer la période de transition et préparer l'élection présidentielle. Sauf que celui qui devra être constitutionnellement nommé n'est pas le bienvenu pour le peuple, ni pour l'opposition. S'il sera désigné envers la volonté populaire et les critiques des partis d'opposition, qui ont réclamé sa démission, tout autant que celle du président du Conseil constitutionnel, la situation ira fatalement vers une impasse, voire un blocage des institutions du pays et, au-delà, l'amorce d'une crise politique profonde. Ce n'est pas en tout cas un tel scénario que soutiendraient les militaires qui bataillent depuis le 22 février pour éviter autant le débordement des manifestations populaires que pour favoriser une solution rapide à la crise politique née de la volonté de Bouteflika de briguer dans un premier temps un 5ème mandat, puis de prolonger le 4ème mandat. L'arrivée de Bensalah à la tête de l'Etat, même pour une courte période, n'est ni souhaitée, encore moins tolérée par la rue et l'opposition, alors que l'ANP est obligée d'explorer des voies de contournement de l'article 102. Difficile mais pas impossible. La solution viendra de M. Bensalah et, au delà, dans une autre démission, celle du président du Conseil constitutionnel, qui devrait combler la vacance du poste de président de la République. L'article 102 est clair là-dessus : «en cas de conjonction de la démission ou du décès du président de la République et de la vacance de la présidence du Conseil de la nation, pour quelque cause que ce soit, le Conseil constitutionnel se réunit de plein droit et constate à l'unanimité la vacance définitive de la présidence de la République et l'empêchement du président du Conseil de la nation. Dans ce cas, le président du Conseil constitutionnel assume la charge de chef de l'Etat dans les conditions fixées aux alinéas précédents du présent article et à l'article 104 de la Constitution». Cette «5ème colonne» de l'ère Bouteflika sera difficile à déboulonner, à moins d'une forte vague de «dégagisme» qui viendra de là où on l'attend le moins. A moins que la solution de la nomination d'un président de la République intérimaire n'intervienne des rangs du Parlement même. Pour le moment, toutes les forces politiques sont piégées, et bien piégées, par la Constitution remaniée de 2016. A moins de la contourner et, à ce moment, il y a des sacrifices «patriotiques» que certains doivent faire pour que la situation politique évolue vers une sortie de crise rapide.