Contre toute attente, les Constantinois étaient nombreux à marcher lors de ce deuxième vendredi du mois sacré. Finalement, rien ne les arrêtera jusqu'à satisfaction de toutes les revendications populaires. Carême oblige, la matinée était calme et il n'y avait relativement pas de manifestants aux premières heures de la journée mais dès la fin de la prière, les fidèles très nombreux au niveau des mosquées du centre-ville et des milliers de citoyens se sont donné rendez-vous devant le palais de la culture Mohamed-Laïd Al Khalifa qui symbolisera désormais le Hirak constantinois car, depuis le début du mouvement, c'est devenu le lieu de prédilection des manifestants. Ni le Ramadhan, ni la chaleur accablante, n'ont empêché les Constantinois de sortir une nouvelle fois par centaines en prenant pour cible : le «Gouvernement de bricolage», le FLN, Abdelkader Bensalah et Ahmed Gaïd Salah. Les pancartes, les chants, les slogans étaient unanimes à rejeter les élections du 4 juillet «Makanch intikhabate ya issabate» ou encore «Bensalah : dégage», «Bedoui dégage», «Gouvernelent de bricolage : dégage» ,«Djazaïr horra dimocratia». Et si des protestataires avaient tenu à dénoncer massivement les velléités d'instauration d'une dictature militaire en martelant avec force : «Dawla madania, machi askaria» (Etat civil, pas militaire), «Gaïd Salah dégage !» et «Djoumhouria machi caserna» (Une République, pas une caserne), d'autres étaient d'un autre avis. En plein centre-ville, ils ont contesté une pancarte qui porte atteinte à Gaïd Salah et qui a été saisie et déchirée. Des pancartes «L'armée défend le pays et nous défendons notre armée» étaient très visibles également avec le slogan «Djich Chaâb khawa khawa». La foule avait sensiblement grossi pour prendre vers 15h des proportions de véritable marée humaine déferlant sur les rues Belouizdad et Abane-Ramdane pour arriver une nouvelle fois devant le palais de la culture Al Khalifa où les manifestants répétaient des slogans qui témoignaient de leur profonde détermination à maintenir la pression : «Maranache habssine, koul djemaâ khardjine» (On ne s'arrêtera pas, chaque vendredi on sortira). Lors de la marche d'hier, il y avait de tout. Des banderoles sur lesquelles le portrait d'Ahmed Taleb Ibrahimi accompagnait une revendication sur la conduite de la période de transition par des personnes sans lien avec le régime, ont fait leur apparition. Bien que certains manifestants aient dénoncé le fait que depuis plus d'une semaine, des chaînes de télévision font le forcing pour donner à Ahmed Taleb Ibrahimi l'image d'une personnalité consensuelle au sein du peuple, des sympathisants n'ont pas hésité hier à scander son nom. Les chants patriotiques et autres appels à la démocratie ont enrichi ce treizième vendredi, témoin d'une infaillible détermination malgré la divergence. Ilhem Tir