En attendant de connaître la position définitive des autorités algériennes sur une question dont elles se seraient volontiers passées, eu égard à leur très fragile légitimité, la cession des actifs d'Anadarko au français Total suscite toujours la grande attention et met le gouvernement dans une très inconfortable posture. Les fragilisées autorités du pays n'avaient vraiment pas besoin de se retrouver prises dans le feu de la transaction qui, il faudrait le souligner, a défrayé la chronique économique internationale depuis qu'elle en a eu vent lorsque, au début du mois de mai, les Français de Total révélaient le contenu d'un accord leur offrant la latitude de prendre le contrôle des actifs africains d'Anadarko, alors que celui-ci était encore en attente de savoir s'il allait être effectivement racheté par Occidental Petroleum (OXY) qui faisait face à la rude concurrence de Chevron pour cette acquisition. Selon plusieurs publications économiques internationales, un monumental bras de fer a opposé les deux américains, Chevron et Occidental Petroleum, pour le rachat d'Anadarko pour lequel le premier avait, au début du mois d'avril dernier, mis sur la table 33 milliards de dollars avant que le second mette KO tout son monde en offrant, vers la fin du même mois, 38 milliards de dollars pour se payer les actifs d'Anadarko en Algérie, en Afrique du Sud, au Ghana et au Mozambique. En plus de la carence en légitimité dont jouit le gouvernement Bedoui, autorisé en principe à ne gérer que les affaires courantes, la mauvaise posture des autorités algériennes dans cette transaction «internationale» découle également du fait que les Américains d'Anadarko étaient considérés parmi les partenaires les plus privilégiés de Sonatrach depuis plus de deux décennies comme l'illustrent les 25 % du million de production moyenne par jour du brut algérien assurée par Anadarko et qui, du coup, va désormais passer sous le pavillon de Total. Les Français qui, le 5 mai dernier, avaient annoncé l'accord conclu avec OXY de s'octroyer contre 8,8 milliards de dollars les actifs africains d'Anadarko. Le ministre de l'Energie, Mohamed Arkab, cité par l'agence officielle APS la semaine dernière notait que Sonatrach userait des moyens à sa disposition pour "préserver ses intérêts" dans le cadre de cette transaction. Ce à quoi le patron de Total, Patrick Pouyanné, avait répondu qu'il était tout à fait normal que les autorités de chaque pays producteur souhaitent avoir un dialogue avec leurs principaux partenaires et c'est ainsi que «dans ce cadre-là que nous allons avoir ce dialogue très prochainement avec les autorités algériennes», a-t-il expliqué lorsqu'il avait été interpellé par un actionnaire. L'occasion en tous les cas de s'expliquer avec le ministre de l'Energie, Mohamed Arkab, qui a été pris en flagrant délit de rétropédalage lorsqu'il déclarait que l'Algérie ne permettrait pas la cession avant de concéder «nous allons tout faire pour préserver les intérêts de l'Algérie» pour, ensuite, ne pas écarter l'idée du recours au droit de préemption pour enfin se résigner et assurer que l'Algérie visera à assurer «un bon compromis» dans cette cession qui renforcerait la position du groupe français dont le P-dg déclarait au moment où avait été rendu public, le 5 mai dernier, l'accord passé avec OXY allait permettre à Total de tirer parti de son expertise dans le GNL en opérant un projet majeur au Mozambique et dans l'offshore profond au Ghana, et cela permettra également au groupe français de «devenir des opérateurs d'actifs pétroliers majeurs en Algérie dans lesquels nous sommes déjà partenaires». Azedine Maktour