L'armée fait un véritable forcing sur le plan de la communication afin d'expliciter ses positions par rapport à la grave et inédite crise politique qui frappe le pays depuis le 2 avril dernier. Mais, surtout, sa feuille de route, celle qu'elle préconise pour en sortir, à moindre frais et le plus tôt possible. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Et sur ces questions essentielles, les positions de l'institution sont claires, constantes et immuables : l'organisation d'élection présidentielle, dans les meilleures délais et dans le cadre de la Constitution, et, partant, rejet ferme et sans la moindres des concessions, de toute autre option, à savoir une transition sous quelque forme que ce soit. Rappelés sans cesse et de manière inlassable par le vice-ministre de la Défense nationale et chef de l'état-major, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, les éléments centraux de cette grande feuille de route viennent de faire également l'objet du très officiel éditorial de la revue El Djeïch. Dans son édition du mois de juillet , parue jeudi dernier, l'organe central du ministère de la Défense tranchera, en effet : «L'ANP continuera d'avancer sur la voie qui mènera à la concrétisation de la volonté populaire, conformément à l'engagement qu'elle a pris d'œuvrer à ce que la crise que traverse le pays soit surmontée afin de renouer avec le processus électoral et s'en remettre aux urnes pour l'élection d'un président de la République et de barrer ainsi la route à ceux qui revendiquent une période de transition qui constitue, à n'en pas douter, un choix aventureux qui n'a d'autre finalité que d'ébranler la stabilité du pays et de le plonger dans des futilités, sources de déviations et d'égarements dont il serait difficile de sortir ». Dans cet éditorial, intitulé d'ailleurs « Summum de loyauté envers la patrie », l'armée fera nettement comprendre que cela relève, non pas d'un simple choix anodin, mais d'un devoir national, une véritable mission patriotique qu'elle se charge d'accomplir. Tout en précisant, systématiquement, que l'institution, autrement dit son premier responsable, n'est mue par aucune ambition politique. L'éditorialiste d'El Djeïch écrira ainsi, à ce propos : «Sur cette base, l'attachement aux solutions légales et constitutionnelles conduisant à l'organisation d'élection présidentielle dans les plus brefs délais permettra à notre pays de surmonter la crise conjoncturelle qu'il traverse. C'est là une position de principe qui ne saurait, en aucun cas, être remise en cause et une option nécessaire qu'impose une des règles essentielles de la démocratie. Une démarche qui balisera la voie à l'édification de l'Algérie de demain sur des fondements solides, la conduira vers des horizons plus sûrs et qui démontrera, en même temps, ce que le Haut Commandement de l'ANP n'a eu de cesse d'affirmer, à savoir qu'il ne nourrissait aucune ambition politique, contrairement aux assertions tendancieuses et mensongères de certaines voix ». Aussi, et depuis le début, du reste, l'armée met en garde contre ce que l'éditorialiste d'El Djeïch appelle « Les Don Quichotte », à savoir les partisans de la transition. Les réalisations concrétisées jusqu'à présent par notre Commandement, qu'il s'agisse de la lutte contre la corruption, d'accompagner le peuple, de respect de la Constitution ou d'encouragement du dialogue entre toutes les parties, est en lui-même un acte patriotique grandiose qui reflète le souci de l'institution militaire, de son Commandement et de tous les hommes sincères, de barrer la route à tous les «Don Quichotte» chargés de la mission de proposer des solutions importées et de concrétiser des agendas néfastes enrobés dans des terminologies et expressions douteuses », rappelant à plusieurs reprises les déclarations précédentes du vice-ministre de la Défense, sur cette question, El Djeïch enfoncera encore le clou lorsqu'il assène , toujours à l'endroit des mêmes parties : «En effet, ne font peur aux corrompus que les gens honnêtes, l'alignement du peuple autour de son armée ainsi que la confiance qu'il voue aux héritiers de la glorieuse ALN. Cette réalité fait peur aux forces du mal, aux agitateurs de l'ombre et les rappelle à leur véritable dimension de groupe de voleurs et de mafieux sans aucun honneur ni dignité, prêts à vendre leur pays pour concrétiser des intérêts étroits et satisfaire leurs maîtres et mentors .» Aussi, « notre armée ne craint ni ces méthodes ni ces comportements, encore moins les tours de passe-passe tant qu'elle jouit du soutien du peuple qui a confiance en sa démarche ». Il est, évidemment, clair que l'allusion ici, est faite au noyau dur de l'ancien régime, Gaïd Salah ayant, souvent, évoqué l'existence d'un complot « dont l'origine remonte à l'année 2015 » précisait-il, même. Une « bande » que El Djeïch accuse de vouloir infiltrer le mouvement populaire , tout en lançant des campagnes contre l'institution et son Commandement : « Bien que le travail, la sincérité, le dévouement et la loyauté soient la clé du succès et de la victoire, les mercenaires, les serviteurs zélés et autres pêcheurs en eaux troubles se cramponnent à toute bouée qui pourrait leur éviter d'être emportés par cette marée humaine qui se déverse dans les artères de toutes les villes et contrées du pays ». Se référant aux derniers discours de Gaïd Salah, l'organe central de l'armée assénera encore : « Notre peuple continuera de préserver son unité, sa cohésion et sa haute conscience des manœuvres et complots ourdis contre lui, malgré les tentatives désespérées d'infiltrer ses marches pacifiques légitimes par une poignée de traîtres qui tentent vainement de semer les graines de la discorde et de la division au sein du peuple uni et de porter atteinte aux valeurs de l'Algérie et de sa glorieuse Révolution .» Coïncidant avec la célébration du 57 ème anniversaire de l'Indépendance, la dernière édition de la revue El Djeïch conclut son éditorial sur une note d'espoir, et rendra un vibrant hommage aux martyrs de la Révolution de Novembre, ainsi qu'aux martyrs du devoir national «Enfin, il nous reste à rappeler qu'il incombe aux jeunes générations de notre pays qui n'ont pas eu à endurer l'enfer de la destruction, qui n'ont pas eu à voir les dommages et les massacres perpétrés par les forces du mal et obscurantistes, d'avoir conscience que le recouvrement de la souveraineté nationale et la liberté dont nous jouissons aujourd'hui n'ont pas été ni un cadeau ni le fait du hasard, encore moins la résultante de concessions faites par quiconque, mais qu'elles ont été le couronnement d'immenses sacrifices consentis par les chouhada de la Révolution libératrice et des martyrs du devoir national, de la résistance des moudjahidine de la glorieuse Révolution de Novembre, ainsi que des braves éléments de l'ANP à la mémoire desquels nous nous recueillons et auxquels nous rendons hommage en ces festivités commémoratives du 57e anniversaire de l'Indépendance de l'Algérie». Une manière aussi de rappeler que l'Algérie a payé le prix cher pour recouvrer sa souveraineté et pour préserver son indépendance, sa stabilité et sa sécurité. Un rappel qui n'est vraiment pas de trop, en ces temps de crise… K. A.