Défaillances spectaculaires sur le marathon féminin, contre-performances en série sur la marche, athlètes en colère : inconvénient prévisible de l'organisation des Mondiaux d'athlétisme au Qatar, l'écrasante chaleur n'a pas manqué de faire polémique dès les premiers jours de compétition. «On nous prend pour des cons !» Le principal coup de gueule est venu du champion du monde 2017 du 50 km marche, le Français Yohann Diniz, d'autant plus remonté contre la tenue de l'évènement à Doha que la chaleur handicape essentiellement les participants aux épreuves sur route, la climatisation assurant une température d'environ 25 degrés dans l'enceinte du Khalifa stadium. «Je suis énervé. Dans le stade, on aura des conditions normales mais le hors-stade, le marathon et la marche, n'ont pas été considérés. Là, on est pris pour des cobayes. ça me fait chier et je regrette d'être là. On va commencer et finir dans des conditions dantesques», s'est-il insurgé jeudi. Deux jours plus tard, Diniz n'a même pas pu finir. Le Français a abandonné dès le 16e kilomètre, vaincu par la chaleur (environ 30 degrés et 75% d'humidité) malgré un départ donné à 23h30 locales dans la nuit de samedi à dimanche. Ceux qui sont allés au bout de la course ont fait ce qu'ils pouvaient: l'épreuve a ainsi été remportée par le Japonais Ysuke Suzuki en 4 h 4 min 20, à plus d'une demi-heure du record du monde du Français (3h32:33). Même constat chez les dames avec la victoire de la Chinoise Rui Liang en 4 h 23 min 26, loin du chrono de référence de la Russe Klavdiya Afanasyeva (3h57:08). Massacre Au total, quatorze abandons ont été enregistrés parmi les 46 partants chez les hommes (6 sur 23 chez les femmes), égalant le triste «record» des Mondiaux datant de 2007 à Osaka, également disputés sous des températures extrêmes. «J'ai promis à ma famille que je rentrerai sain et sauf, j'ai tenu ma promesse en abandonnant, a indiqué le champion olympique slovaque Matej Toth. J'avais concouru à Osaka où j'avais connu les conditions les plus difficiles de ma carrière, mais ici c'est comme s'il n'y avait pas d'air à respirer.» Vendredi, le marathon féminin avait déjà tourné au jeu de massacre, avec des images de défaillances frappantes, de nombreuses athlètes défilant à la tente médicale, les corps épuisés transportés sur des brancards ou en fauteuils roulants. Un record de 28 abandons (sur 68 partantes) avait été là aussi établi, avec un succès de la Kényane Ruth Chepngetich dans un temps inhabituellement lent au haut niveau (2h32:43), sous 32 degrés et 73% d'humidité. Face à cette hécatombe et aux critiques concernant l'attribution des Mondiaux au Qatar, la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) a tenté de rassurer sans vraiment convaincre. «Catastrophe» «Trente athlètes ont été admises au centre médical par précaution, a expliqué l'organisation après le marathon dames. Un petit nombre d'entre elles ont été gardées en observation, et une athlète a été envoyée à l'hôpital avant d'être autorisée à repartir. Le centre médical a été parfaitement efficace. Toutes les athlètes qui y ont été reçues ont été prises en charge dès leur arrivée, la plupart ayant pu partir dans les 20 minutes qui ont suivi.» «Il faut avant tout penser à la santé des athlètes, avait assuré le président de l'IAAF Sebastian Coe avant la début de la compétition. Nous avons pris énormément de précautions». Outre la programmation de nuit, les points d'eau ont été multipliés, des volontaires de la Croix-Rouge ont été postés tous les 200 m et il a été proposé aux coureurs d'ingérer une gélule permettant aux médecins de surveiller en temps réel la température corporelle et de les arrêter en cas d'alerte. Mais il n'y pas que les marcheurs et marathoniens qui portent un jugement sévère sur ces Mondiaux, à l'image du champion du monde du décathlon Kevin Mayer. «On voit tous que c'est une catastrophe, on n'a pas vraiment mis les athlètes en avant en organisant les Championnats ici, on les a mis en difficulté», a déclaré le Français, également inquiet du manque de public dans le stade. «C'est sûr que l'on n'est pas du tout dans les bonnes conditions pour faire des performances».
Finale du 400m haies Une grande première pour Lahoulou Abdelmalik Lahoulou, le hurdler algérien champion d'Afrique en titre, disputera aujourd'hui sa première finale mondiale du 400m haies aux Championnats du monde d'athlétisme qui se déroulent à Doha. Auteur d'une bonne course samedi, lors de la demi-finale, avec un chrono de 48.39, ponctué d'un nouveau record national, Lahoulou s'élancera cet après-midi avec l'objectif de monter sur le podium, même si la tâche sera rude devant le Norvégien Karsten Warholm, champion du monde en titre ou encore le Turc Yasmani Copello, vice-champion du monde à Londres 2017. Premier athlète algérien à décrocher une place en finale de cette épreuve très technique, Lahoulou, champion d'Afrique en titre à Asaba au Nigeria en 2018, avec un chrono de 48.47, espère inscrire son nom en lettre d'or à Doha. Il sera, d'ailleurs, le seul athlète algérien au programme de la journée d'aujourd'hui, lundi, avant l'entrée en lice, mardi, de Billel Tabti, en séries du 3 000 m steeple, tandis que Taoufik Makhloufi sera en piste jeudi sur les qualifications du 1 500 m. Six athlètes algériens, pour rappel, sont engagés aux Mondiaux-2019 d'athlétisme. Il s'agit de Yacine Hethat (800m), Taoufik Makhloufi (1 500m), Mohamed Belbachir (800 m), Abdelmalik Lahoulou (400m haies), Yasser Mohamed-Tahar Triki (triple saut) et Bilal Tabti (3 000 m steeple). «A l'exception de Makhloufi sur le 1 500m et le hurlder Lahoulou, il est difficile de voir nos athlètes rivaliser avec leurs adversaires ou jouer les premiers rôles à Doha», avait déclaré le directeur technique national, Abderrahmane Morceli, avant le début des Mondiaux de Doha Ahmed A. Marathon de Berlin Bekele échoue à 2 secondes du record du monde A 37 ans, l'Ethiopien Kenenisa Bekele a remporté hier le marathon de Berlin en échouant à 2 secondes du record du monde, au terme d'un finish de folie. L'ancien roi de la piste, toujours détenteur des records du monde des 5 000 et 10 000 m, a terminé en 2h 01 min et 41 secondes, à un souffle du fabuleux record établi en 2018 sur le même parcours de Berlin par Eliud Kipchoge (2:01.39), qui n'était pas présent cette année. Bekele devient ainsi le deuxième homme à passer sous la barre des 2h 2 minutes. Chez les dames, sa compatriote Ashete Bekere s'est imposée en 2h 20 min 14 sec, la grande favorite kényane Gladys Cherono ayant abandonné. En tête avec deux de ses compatriotes au 30e kilomètre, Bekele s'est laissé distancer au 31e km, mais est revenu impitoyablement en fin de course et a déposé Birhanu Legese (2h02.48), 2e dimanche et devenu le troisième homme le plus rapide de l'histoire sur le marathon, et Sisay Lemma (2h03.36), 3e. «Je suis très heureux d'avoir réussi ma meilleure performance personnelle, et ce résultat m'encourage pour l'avenir. Mais manquer le record du monde pour 2 secondes, je ne suis pas content», a déclaré Bekele quelques minutes après avoir franchi la ligne d'arrivée. A dix kilomètres du but, Bekele était à près d'une minute des bases du record du monde, mais sa pointe de vitesse, qui a fait de lui l'un des plus grands fondeurs de l'histoire de l'athlétisme (trois titres olympiques et 16 titres de champions du monde sur piste ou en cross), lui a permis de terminer en trombe pour venir titiller le record de Kipchoge. «J'ai un peu ralenti» Jusqu'à présent, l'Ethiopien n'avait pas réussi à entrer dans la légende du marathon comme il l'avait fait sur les pistes. Ce résultat lui ouvre désormais des perspectives nouvelles. Il a expliqué son décrochage du 31e km par une petite douleur à un tendon. «J'ai un peu ralenti pour me relaxer, et ensuite j'ai poussé de nouveau», a-t-il dit, précisant en outre qu'il n'arrivait pas «à 100%» en raison d'une blessure. Malgré le vent et l'humidité, Berlin a confirmé qu'il était le marathon le plus rapide du monde. Les sept derniers records du monde (depuis 2003) ont été battus sur le parcours parfaitement plat de la capitale allemande. Kipchoge, qui avait explosé le record du monde de plus d'une minute l'an dernier (2h01,39), n'était pas là dimanche pour voir Bekele menacer sa marque. Le Kényan de 34 ans, qui vole au-dessus du marathon mondial, prépare pour octobre une nouvelle tentative contre la barre mythique des deux heures, à Vienne. En 2017 en Italie, sur le circuit automobile de Monza, Kipchoge avait réussi la meilleure performance jamais réalisée par un être humain, en 2h 25 secondes... Mais un temps non-homologué.