Réinventer l'esprit insurrectionnel du 1re Novembre pour se réapproprier l'indépendance de l'Algérie, c'est le sens à donner au 37e acte de mobilisation du mouvement populaire correspondant au vendredi 1er novembre 2019. Pour certains parmi les milliers de marcheurs qui ont investi les artères principales de la ville, lieu habituel de la marche, la célébration du 65e anniversaire du déclenchement de la Révolution a commencé la veille. Pour les centaines de citoyens dont beaucoup de jeunes gens et de jeunes filles, la nuit du 31 octobre était synonyme de veillée d'armes. Pour eux, c'était une manière de préparer la protestation du lendemain, à travers une action qui a débuté sur le parvis de l'ex-hôtel de ville où ils sont regroupés pour la désormais célèbre nuit du « Mehraz». Les tintements stridents du pilon se sont confondus avec les slogans politiques anti système sur fond de soutien aux détenus politiques et d'opinion dont on continue à dénoncer l'arbitraire de la détention. «Ya3li !», scandait la foule, invoquant le nom du héros de la Bataille d'Alger, Ali La Pointe, devenu, pour ces jeunes, la figure totémique et symbole de résistance et de sacrifice pour l'indépendance de l'Algérie. Un esprit et une symbolique qui, visiblement, inspirent le courage et la détermination de tous les hirakistes pour qui le Mouvement du 22 février vise une deuxième libération du pays. «Indépendance !», ne cessait-on de crier, dans le rassemblement, stigmatisant le wali, Mohamed Djemaâ et tous les officiels qu'ils assimilent aux résidus du système qu'ils veulent toujours dégager. Le lendemain, c'est-a-dire, hier vendredi, le même scénario, le même spectacle d'une foule plus nombreuse encore, euphorique, déterminée et animée du même esprit d'engagement patriotique et d'une farouche volonté à imposer le changement, s'est répété. Pour le 37e acte du mouvement populaire, une marée humaine s'est déployée sur le parcours habituel de la marche. Compact et serré, débordant sur les trottoirs, le défilé avançait difficilement, reprenant les mêmes slogans et les mêmes cris de colère ciblant le pouvoir. «Le 1er Novembre a toujours été pour moi une date ordinaire qui s'ajoute à d'autres dans le calendrier. C'est seulement aujour d'hui que j'ai compris la portée historique de cet anniversaire et ce qu'il signifie réellement pour les gens qui l'ont vécu à ses débuts», nous avoue Samir, jeune étudiant natif du début des années 1990. Ajoutant : «La ferveur et l'émotion que j'ai ressenties aujourd'hui me changent du spectacle des célébrations soporifiques qu'on nous a toujours montrées à la télévision. Il n'y a pas mieux qu'un 1er Novembre pour prendre rendez-vous avec l'histoire pour une réelle indépendance de l'Algérie », lance encore le jeune étudiant. S. A. M.