La liste des candidats à la Présidentielle enfin dévoilée. Au moins, chez nous, y a pas de… … tabou avec le voile ! « Il faut aller jusqu'au bout ! » Moi, je veux bien qu'on aille jusqu'au bout. Mais au bout de quoi ? De ces rues jonchées de « dormants ». De ces habitants d'une principauté « Bantoustan », lovés dans des couvertures, des cartons ou juste une gabardine et sommeillant, tant bien que mal, au milieu des chats et des rats et des cafards, juste pour pouvoir porter un sourire et des tonnes d'espoirs le lendemain, avec les autres dormants, les autres fantômes joyeux de la nuit ? Alors oui ! Allons jusqu'au bout, Hadharat ! Aller jusqu'au bout de quoi ? De l'impossible bout de la détermination sans bout d'un vieillard qui, lui, a fixé un bout à la nuit coloniale, sans éteindre ensuite la lampe de son phare de vigilance ? Alors oui, allons jusqu'au bout, Hadharat ! Aller jusqu'au bout de quoi ? De ces jeunes étudiants plongés dans la fosse aux ténèbres, alors que Si Larbi, un sourire en coin, avait déclaré à un Bigeard ahuri vouloir illuminer demain le ciel d'Algérie de lumières incandescentes ? Alors oui, allons jusqu'au bout, Hadharat ! Aller jusqu'au bout de quoi ? De la Silmya chantée en ode aux vieilles et vieux pleurant de joie sur leurs balcons, les gambettes tremblantes de bonheur, d'avoir pu enfin VOIR ÇA ? Alors oui, allons jusqu'au bout, Hadharat ! A la vérité, aller jusqu'au bout, c'est déjà réduire la grandeur d'une contrée sans bouts, parce que juste immense de ces millions de poitrines offertes au vent, au soleil et au bleu sévère de la ferraille. On ne m'a jamais conté la fable insipide d'une civilisation faite de petits bouts ! Les bouts finissent par tomber, comme un linceul dévoré par les mites. Mais les civilisations restent ! On ne peut pas aller au bout d'un rêve d'espérance, Hadharat ! On dort le soir, sur un bout de carton, pour pouvoir tricoter les chandails qui vaincront les hivers et traverseront les saisons jusqu'à l'été. Dieu qu'il sera alors meilleur de dormir un soir d'été sur un bout de trottoir de ma principauté, Hadharat ! Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue. H. L. P. S. : un moment unique au Sila ! Un moment de communion avec vous, intense ! Mais aussi mes excuses ! A celles et ceux arrivés un peu après 16 heures et n'ayant pu avoir mon recueil L'homme-carrefour et autres histoires d'un pays impossible. Parce que le quota de livres de ce jour s'en trouvant vite épuisé. Confus de n'avoir pu satisfaire la fidélité de nombre d'entre vous. Et surtout penaud face à ce proche d'un détenu de la Révolution du Sourire chargé de ne revenir à la « visite des quinze jours » qu'avec l'ouvrage dans le panier. Je suis triste pour ce vœu non exaucé. Mais promis, jeudi prochain, dernière date pour moi au Sila, ma première signature sera pour toi, Aouissi Mustapha Hocine ! Et pour tous les détenus du Hirak ! Le Fumeur de Thé