«Le Hirak» marque sa présence à la 24e édition du Salon international du livre d'Alger (Sila). L'offre est certes minime, mais la demande est considérable. Les maisons d'édition nationales sont unanimes à témoigner de l'engouement des lecteurs algériens pour des œuvres qui traitent du sujet sociopolitique de l'heure que vit le pays. Abdelhalim Benyellès - Alger (Le Soir) - Quatre jours après l'inauguration de l'événement culturel national par excellence, le Sila, l'impression qui était dégagée hier, dimanche, autour des maisons d'édition présentes, faisait apparaître un intérêt particulier, suscité par le livre qui traite de la crise politique que vit le pays depuis près de 9 mois. Si par le passé, c'est le livre historique et parascolaire qui était le plus prisé par les visiteurs, pour cette année, c'est l'engouement pour le livre qui traite du Hirak qui a suscité l'étonnement. Le directeur des éditions Chihab, qui en a présenté deux livres, révèle qu'au bout de quatre jours, un titre a été carrément épuisé. Il n'est plus disponible chez l'éditeur. «Nous sommes obligés de lancer une nouvelle impression», nous a déclaré le directeur. Par ailleurs, l'éditeur affirme, non sans fierté, que l'Algérien lit. «Le Salon de cette année a tordu le cou à la rumeur de l'Algérien qui ne lit pas», a-t-il précisé. Et d'ajouter que «nous ne sommes plus à l'ère du manque de lectorat et du manque du livre». Et tout comme son homologue de Koukou Editions, Arezki Aït Larbi, il s'attaque au problème de fond, à savoir l'absence d'une politique du livre. Ce dernier, qui vient d'éditer deux livres traitant du Hirak, tout en signalant au passage la demande importante sur le produit, s'attaque au problème de communication autour du livre, accusant ouvertement les médias lourds. Cependant, il préserve une partie de la presse écrite. «Une infime partie de la presse écrite représente une fenêtre pour la promotion du livre en Algérie», nous a-t-il affirmé. Koukou Editions, qui a présenté deux livres sur le thème du Hirak, projette de lancer un projet «digne d'intérêt», en confiant le thème du Hirak à une équipe de sociologues et d'universitaires afin d'éditer un livre de «qualité». Selon lui, l'heure n'est pas à la production quantitative, avertissant que «cela pourrait déboucher sur des dérapages irréparables» sous l'effet de l'émotion. Bouzid Rafar, manager de Rafar Editions, l'explique si bien en déclarant que «mis à part la rue, on n'a pas encore tout vu». Le directeur de la maison d'édition Frantz Fanon partage presque le même avis en soulignant qu'«il faut attendre pour mieux voir». Pour lui aussi, il est question d'évacuer l'aspect émotionnel du traitement du thème du Hirak. Bouzid Rafar, qui n'a exposé aucun livre sur le Hirak, s'attend, lui, à des révélations fort intéressantes sur l'événement que vit l'Algérie actuellement. «Un bon écrivain ne peut pas forcément produire un bon livre», nous a-t-il déclaré dans un doux euphémisme, citant en exemple un cas présent au Sila, dont il redoute le contenu sous l'effet de «l'émotion». Celle-ci est passagère, alors que le livre est éternel, a-t-il conclu. Reste que tous les éditeurs rencontrés s'attendent à un flux de production sur le sujet du Hirak dans les jours à venir. «Nous préférons que les écrivains se mettent à l'œuvre quand les choses se seront apaisées», s'accordent-ils à reformuler. Enfin, ce qui a été remarqué, hier au Sila, c'est que les maisons d'édition publiques n'ont pas exposé de livre sur le thème du Hirak. A. B.