De notre envoyé spécial, Karim Aimeur Abdelkader Bengrina, candidat à l'élection présidentielle du 12 décembre, se frotte à une dure réalité du terrain. Il lui est difficile de mobiliser les citoyens dans une campagne électorale inédite dans l'histoire du pays. Des affrontements ont été évités de justesse à El Bayadh, hier vendredi. Cette dure réalité, il l'a vérifiée encore une fois ces deux derniers jours lors d'une tournée qui l'a conduit dans les wilayas de Relizane, Tiaret, El Bayadh et Laghouat où ses meetings se sont déroulés en présence d'une assistance peu nombreuse et sous une haute protection policière, exception faite pour El Bayadh où la salle de la bibliothèque principale de la ville était pleine. Son meeting s'est tenu dans un climat très tendu dans cette dernière wilaya. A l'extérieur, des manifestants pacifiques, encerclés par les forces de l'ordre, l'ont accueilli avec des slogans hostiles aux élections et au système. Mais en sortant, Bengrina a décidé d'organiser une marche dans la ville. Ses partisans ont foncé sur le rassemblement des manifestants et, n'était l'interposition des agents de l'ordre, le pire serait advenu. L'affrontement a été évité de justesse et plusieurs manifestants ont été arrêtés. Dans ces villes, les signes de l'existence d'une campagne électorale sont quasi absents. Même les panneaux d'affichage réservés aux portraits des cinq candidats sont restés tristement vides. Lors de ses meetings dans ces wilayas, le candidat islamiste a peu parlé de son programme électoral, préférant s'attaquer au clan déchu des Bouteflika, à l'opposition démocratique et islamiste, ainsi qu'à ses concurrents Abdelmadjid Tebboune et Azzedine Mihoubi, tout en prenant le soin d'épargner le pouvoir. Très confiant en ses chances de remporter ces élections, Abdelkader Bengrina a affirmé qu'il n'était ni le candidat de l'armée ni celui du Hirak. « Je suis le candidat du Sud, du Nord, de l'Est et de l'Ouest. Je suis le candidat des hommes, des femmes, des vieux, des jeunes...», a-t-il déclaré. A Relizane, où il était dans la matinée de mercredi, le chef du parti El Binaa a animé un meeting dans une salle à moitié vide, encerclée par un dispositif sécuritaire, suivi d'une petite marche dans la ville. Dans son allocution, Bengrina s'est attaqué à l'opposition notamment islamiste, et plus précisément son ancien parti, le MSP. Il s'est engagé à démasquer « ceux qui étaient pour la prolongation du mandat de Bouteflika et le report des élections, en concertation avec la tête de la bande et la France », en allusion à la rencontre entre Saïd Bouteflika et Abderrezak Makri, avant le soulèvement populaire. Il a accusé d'autres partis, sans les citer, de prendre le train de l'opposition à la bande alors qu'ils étaient, selon lui, ses alliés, secrètement pour certains et publiquement pour d'autres. Enfonçant le clou, il a indiqué que ces partis, dont les bailleurs de fonds et les sponsors politiques sont en prison, étaient « des alliés stratégiques de la bande », ajoutant qu'ils n'ont pas le droit de jouer avec la stabilité du pays. « S'ils persistent, on va les dénoncer nommément », a-t-il menacé. Pour l'orateur, les Algériens ont le droit d'avoir des avis différents, entre ceux qui optent pour une transition et ceux qui veulent une solution constitutionnelle mais, a-t-il soutenu, on n'a pas le droit de jouer avec la sécurité et la stabilité du pays. A Tiaret, où il a animé un meeting dans l'après-midi de jeudi dans une salle clairsemée, Bengrina s'est attaqué à deux autres candidats à la présidentielle, à savoir Abdelmadjid Tebboune et Azzedine Mihoubi. Il s'est attaqué également aux anciens responsables qui étaient, a-t-il affirmé, des agents des pays étrangers. « D'ailleurs, une fois en prison, leurs enfants ont fui vers la France ou l'Espagne où ils ont des châteaux et des milliards », a-t-il ajouté, estimant que ce qui importe est comment récupérer l'argent transféré à l'étranger. K. A.