Le chanteur Mohamed Lamari s'en est allé, hier matin, à l'âge de 79 ans. Il aura marqué la musique algérienne moderne par sa voix puissante et sa générosité sur scène. Décédé lundi matin à l'hôpital militaire de Aïn Naâdja, Mohamed Lamari laisse derrière lui une discographie emblématique de la pop-culture algérienne. Surnommé le ténor de La Casbah, il a eu cependant des débuts difficiles dans les années 1950 dans une scène artistique algéroise où pullulaient des stars mythiques de la chanson. Mais, il finira par s'imposer grâce à une empreinte singulière qui marquera des générations entières. Ses atouts : une voix puissante et un charisme qui se bonifiera avec les années. Véritable monstre de scène, Lamari inventera quasiment une nouvelle posture artistique dans un milieu dominé par le classicisme et l'austérité. Aussi, ses collaborations auront un impact notable sur l'évolution de sa carrière : d'abord avec le compositeur Haddad Djilali puis Mahboub Bati qui signera notamment la mélodie du tube «Ah ya qalbi» tandis que du côté poétique, il interprétera entre autres des textes de Mustapha Toumi dont l'immortel «Che Guevara» (1975). Crooner infatigable et personnage scénique d'une rare énergie, Mohamed Lamari est considéré comme une icône de la musique algérienne et une figure emblématique d'une époque dite «dorée» des arts populaires. Mais au-delà de sa fraîcheur, son jeu de scène détonnant et ses allures de dandy algérois, il demeure un artiste accompli et exigeant qui a su faire bouger les lignes et bousculer la rigidité des codes classiques, ce qui n'a pas manqué de courroucer les conservateurs de l'époque, andalous notamment. Depuis l'annonce de sa mort, les hommages pleuvent sur les réseaux sociaux. Le chanteur Hamid Baroudi salue la mémoire de «The voice» et estime qu'il «a réellement révolutionné la chanson algérienne en lui ouvrant toutes grandes les portes de la modernité. Chanteur incontournable à succès depuis plus de 60 ans, Mohamed Lamari était un show man, une véritable bête de scène; son répertoire immense aux sonorités variées, parcours tumultueux d'une forte personnalité musicale qui a marqué plusieurs générations d'Algériennes et d'Algériens par ses thèmes musicaux, la puissance et la souplesse de sa voix surtout lorsqu'il chantait «Rana H'na» (nous sommes toujours là) qui représente dans ce contexte une métaphore sur le parcours du chanteur qui brillait encore durant plus d'un demi-siècle. Mohamed était sans aucun doute un artiste au sens noble du terme». Mohamed Lamari (1939-2019) devait être inhumé hier après-midi au cimetière d'El Kettar. S. H.