Depuis dimanche, l'Algérie amorce une nouvelle étape dans la lutte contre la propagation du coronavirus. Une phase 3 qui «confine» les deux tiers de la population active du pays pendant une période de 8 à 12 semaines, notamment celle activant dans des domaines où la présence des masses est exponentielle. Le sport ne sera plus à l'arrêt jusqu'au 5 avril, mais bien plus longtemps. La gravité de la situation induite par le Covid-19, qui a déjà fait plus de 201 cas positifs parmi lesquels 19 personnes sont décédées, a poussé les pouvoirs publics à durcir les mesures de prévention. Désormais, l'autorité publique ne tolérera plus aucun écart, le confinement devenant obligatoire. Si l'activité économique est substantiellement ralentie, les autres secteurs de la vie sociale le sont davantage. Le sport en particulier, où les compétitions sont à l'arrêt forcé depuis le 17 mars, au lendemain des six premières rencontres des 22e et 23e journées des deux Ligues professionnelles (1 et 2). La LFP, qui avait annoncé le jeudi 12 mars le programme de mise à jour (MCA-PAC) ainsi que celui de 4 journées de championnat durant le mois d'août, a fini par «rendre les armes» devant l'autorité publique incarnée par le MJS, qui décidera du report des compétitions sportives et de la fermeture des structures d'accueil jusqu'au 5 avril. Une date qui était (déjà) sujette à polémique, l'épidémie n'étant alors qu'à ses débuts en Algérie et les voyants n'étaient pas au rouge. Depuis dimanche, ils le sont et les instances du sport, comme les clubs et leurs employés (athlètes et autres) doivent s'y adapter. Vendredi, le président de la FAF, qui s'adressait à la famille du football, assurait qu'il n'était pas question de déclarer une année blanche, emboîtant ainsi le pas à son président de la Ligue de football professionnel. MM. Zetchi et Medaouar avaient-ils des certitudes quant à une maîtrise rapide du fléau pour se lancer dans des prévisions pour le moins fantaisistes ? Si le patron de la Fédération a pris des «gants» en avançant que quelle que soit la décision de la réunion du bureau fédéral, programmée hier et repoussée à la fin du mois, elle prendra en considération l'avis des autorités (sanitaires et publiques), mais aussi de toute la famille du football, celui de la Ligue de football professionnel a surtout les modalités techniques pour boucler la saison estimant que sa structure a réfléchi à un nouveau calendrier pour boucler le championnat et la coupe en programmant les matchs «à huis clos». Une projection qui s'effiloche dès lors que l'on constate que le délai initial (5 avril) fixé pour la reprise est désormais obsolète du fait des nouvelles mesures décidées par le gouvernement sous l'injonction du président de la République. Retour sur terre en septembre ? La grande certitude est que la situation sanitaire ne sera pas raisonnablement maîtrisée avant le mois de juin (le Brésil, à titre d'exemple, l'annonce pour juillet). Ce qui engendrera une multitude de conséquences liées au calendrier, mais également à la forme compétitive des athlètes. Impossible, selon les spécialistes de la préparation physique, de compter sur un retour à l'état normal pour des sportifs qui se suffisent actuellement d'un travail (étudié certes) individualisé. «L'entraînement collectif et, surtout, la compétition sont les meilleurs alliés des compétiteurs», assurent-ils à l'unisson. Cela suppose un arrêt effectif immédiat avant un retour progressif au travail de régénération et de préparation intensive. Ceci dans le cas d'une décision de geler définitivement la compétition jusqu'en septembre. C'est scientifiquement parlant la plus plausible des prévisions. Economiquement, les ligues et les clubs seront ruinés et, sportivement, les compétiteurs souffriront d'abord pour maintenir leur ligne puis durant la reprise de la préparation et de la compétition. Si ce scénario tient la route, une hypothèse se dessine dans le cas «Algérie» : les journées des deux challenges nationaux et les derniers matchs de l'épreuve populaire seront renvoyés à début septembre. L'Algérie du football a déjà connu un tel chambardement lors de la saison 1991-1992, après que l'état d'urgence eut été décrété suite à l'insurrection du FIS. Le championnat, remporté alors par le MC Oran (devant l'USMH), s'était arrêté à l'occasion de la 25e journée disputée le 18 juin, il a repris le 3 septembre (26e journée) et a été bouclé le 21 octobre (30e journée). Le 26 octobre, soit cinq jours plus tard, le nouvel exercice (1992-1993) a été lancé. L'épreuve populaire, qui a vu le sacre de la JSK face à l'ASO Chlef, subira le contrecoup de cette programmation, dans la mesure où l'édition 93 n'a pas eu lieu, la saison de la D1 s'étant également vu reportée jusqu'au 21 octobre 1993. Voici pour l'histoire que nombre de nos «experts» ont probablement oubliée. Et l'histoire ne peut être qu'un éternel recommencement ! 27 ans plus tard, une crise sanitaire planétaire impose aux footballeurs, à tous les sportifs, une «rallonge» préjudiciable à leur carrière. En Algérie, où les intérêts sont nombreux mais plus étroits, le sujet effraie mais pas pour les raisons que l'on souhaite. Le championnat à blanc ne sera pas décrété et autant Zetchi que Medaouar sauveront la face. Et les «bons» élèves comme les «mauvais» auront leurs notes de fin de cycle. Les plus méritants bénéficieront des «bourses africaine et arabe» et les recalés referont leurs classes en «amateurs». La «nouvelle pyramide» sera-t-elle mise en berne ? C'est l'autre facette de la «crise» qui pourra impacter la réflexion des membres du bureau fédéral et de toute la famille du football, lorsqu'il s'agira de décider d'un report des compétitions à septembre prochain. La FAF, après concertation avec la «base», a retenu une nouvelle pyramide pour les compétitions nationales impliquant le sommet de l'élite professionnelle et les ligues. Lorsqu'il a été adopté en septembre 2019 par l'AG de la FAF, les initiateurs du projet ont fait remarquer que ce dernier sauvera le professionnalisme en réduisant le nombre de clubs «pros» à 18 et aidera le football amateur à avoir les mêmes chances que celui dédié aux professionnels. Avec une ligue professionnelle à 18 clubs, deux groupes amateurs en Ligue 2 (Centre-Est et Centre-Ouest) et une division «amateurs» à six groupes régionaux. En outre, un palier régional, subdivisé en 2 sections (R1 et R2) comprenant chacune des groupes de 16 clubs a été créé, en sus d'un niveau «wilaya» dans lequel est prévu un groupe «Honneur» pendant que le palier «Pré- Honneur» reste assujetti au nombre d'équipes engagées. Une pyramide qui risque d'avoir du sable dans ses travées. Du moins pour les trois paliers supérieurs. Un «soulèvement» des mal-classés des championnats professionnels (Ligues 1 et 2) n'est pas exclu. Chacun d'entre ces clubs dont la saison 2019-2020 fut un cauchemar va justifier les raisons de son mauvais classement par sa situation financière et, pis, par l'acharnement de la LFP à les priver de leur «droit» au recrutement (sic). Si l'on considère le championnat définitivement arrêté, le classement fera de la paire des mal-classés en Ligue 1 (NAHD-NCM) et celle de la Ligue 2 (USMH et JSMB) les principales victimes. Cette hypothèse de déclarer la fin des championnats, récompenser les meilleurs et sanctionner les plus faibles) avait fait un court chemin avant d'être balayée d'un trait par la sortie de Zetchi et Medaouar. Elle a été abandonnée car tout simplement dangereuse et porteuse de conflits, voire de violence. Terminer le championnat en septembre et lancer la nouvelle saison juste après constituerait une sortie honorable pour les deux responsables qui avaient annoncé qu'ils ne postuleraient pas à un second mandat à la tête de la FAF et de la LFP respectivement (peut-être qu'ils échangeront les postes). A l'autre condition de trouver une parade s'agissant la mise en place de la nouvelle pyramide laquelle sera plus longue en Ligue 1 (34 journées au lieu de 30) et interviendra dans un contexte international très particulier : en l'occurrence une année 2021 qui sera marquée par le déroulement de la CAN du Cameroun et la suite (ou le début) des qualifications pour le Mondial-2022 sans oublier les challenges interclubs, arabe et africains. S'il est possible de sacrifier (une fois n'est pas coutume) la Coupe d'Algérie, la FAF et la LFP sauront-elles mettre entre parenthèses la participation de nos «illustres» clubs aux épreuves régionales et continentales, ou vont-elles abandonner, du moins momentanément, le lancement de la nouvelle pyramide des compétitions, quitte à faire des mécontents parmi la «confrérie» d'Ali Baâmeur ? M. B.