La décision prise par le ministère de la Jeunesse et des Sports de faire cesser toutes les activités sportives nationales à partir d'hier, après avoir pris la décision de les autoriser en l'absence du public, intervient dans un contexte particulier. Celui d'une fin de saison où clubs et athlètes sont soit récompensés ou sanctionnés. Fin de la mascarade organisée par certaines instances de notre sport qui ont laissé courir les compétiteurs, alors que le pays et le monde entier font la guerre au coronavirus. L'intervention du MJS qui a décidé de mettre fin au «folklore», est pour le moins salutaire, même si elle est relativement tardive. A défaut d'un bilan sur les cas survenus parmi la population sportive, comme c'est le cas des pays où la crise du coronavirus a fait des victimes parmi les athlètes, entraîneurs, dirigeants et fans du sport, il faudrait reconnaître un certain courage de la tutelle devant les tergiversations de certaines fédérations, comme la FAF, à prendre leurs responsabilités à ce propos. Une mesure «instillée» par petites doses, faut-il préciser, le département de Sid-Ali Khaldi ayant accompagné sa décision par «la fermeture de toutes les infrastructures sportives, de jeunesse et de loisirs, jusqu'au 5 avril», lit-on dans le communiqué officiel rendu public dimanche après-midi. Le ministère assurera ensuite que ces mêmes infrastructures seront ouvertes «pour les athlètes qualifiés aux Jeux olympiques de Tokyo-2020 et ceux engagés dans les tournois qualificatifs, en concertation avec leurs fédérations et les services habilités du MJS». Une précision quelque peu démesurée, sachant que, non seulement les tournois qualificatifs à ces joutes olympiques ont été remis aux calendes grecques, toute activité qui implique un certain nombre de personnes est déconseillée par ces périodes de pandémie. L'Algérie n'a, certes, pas franchi les phases critiques en matière du nombre de cas déclarés positifs, mais une telle perspective n'est plus à écarter. Ces derniers jours, malgré les mesures de prévention, le nombre de personnes suspectées et celles ayant été déclarées positives au coronavirus est en sensible croissance, non seulement au niveau du premier foyer sur le plan national (wilaya de Blida) mais aussi à travers des villes de l'intérieur, comme Guelma ou Mascara. Un arrêt sans frais ? Désormais, l'arrêt momentané des compétitions sportives au niveau national et international impactera la saison 2019-2020 à différentes échelles. Si les pertes économiques induites par ce gel des compétitions nationales ne seront connues qu'à la fin de cette crise sanitaire mondiale, les fédérations, ligues et clubs, dont l'existence dépend en grande partie de la rente publique, vont devoir subir quelques dégâts. Une situation pour le moins énigmatique pour un MSN (Mouvement sportif national) dopé par les finances publiques, mais qui subira de plein fouet les décisions gouvernementales consécutives à la gestion de l'épidémie. On n'est pas loin d'imaginer que le secteur des sports sera l'un des principaux à voir ses ressources financières considérablement revues à la baisse, le budget de l'Etat devant basculer ses priorités vers les «dépenses essentielles». Le manque à gagner provoqué par la fermeture des circuits du sport (stades Opow, salles de sports et de toutes les structures d'accueil des sportifs) ne sera pas le seul à inscrire sur le chapitre «pertes». Les salaires des athlètes, staffs (technique, médical et administratif) et des employés des différentes infrastructures d'accueil vont également grever le Trésor public. Ailleurs, en France en particulier, les autorités publiques ont prévu pendant cette crise sanitaire d'opter, entre autres, pour le chômage partiel, à défaut d'une activité professionnelle réduite à sa plus simple expression ou effectuée à distance (télétravail). Chez nous, le gouvernement a consenti 40 milliards de dinars pour «gérer la crise» mais n'a rien prévu, du moins pour le moment, en direction des travailleurs contraints de se confiner chez eux. Cette réalité est davantage ressentie dans le monde des sports en Algérie où les disparités salariales sont énormes (un footballeur moyen touche 100 fois le SNMG, tandis qu'un champion d'Afrique en boxe a droit à des indemnités insignifiantes liées au titre en sus de son salaire ordinaire). Les clubs de football continueront-ils à payer des joueurs qui n'activent plus sachant que ces mêmes joueurs bénéficient de l'intégralité de leurs avantages malgré un rendement pitoyable et une rentabilité (titres) inefficiente ? Un calendrier à revoir Autant d'incertitudes pèsent sur l'issue des compétitions sportives elles-mêmes. Bien entendu, le MJS a avancé une date pour la reprise des activités sportives, en l'occurrence le dimanche 5 avril, soit exactement après trois semaines de répit. Mais, cette perspective pourrait être reconsidérée dès lors que rien n'autorise à affirmer que l'épidémie sera maîtrisée d'ici trois semaines. Sur un plan pratique, l'injonction ministérielle de mettre en congé forcé les athlètes va d'abord pousser les associations, clubs et fédérations à annuler tout travail de préparation (entraînements et stages). Avant d'envisager un retour à la normale, les techniciens vont devoir ordonner à leurs protégés de suivre un travail d'entretien à domicile, voire dans la wilaya de résidence du sportif si, bien sûr, la logistique (matériels et salles) est disponible. Contrairement aux professionnels d'ailleurs qui disposent de matériels spécifiques à leurs domicile (au minimum un vélo, tapis roulant et barres de musculation voire piscine), nos «professionnels», qui trouvent le moyen de se dérober du travail «réglementaire» au sein de l'équipe, ne disposent généralement pas du moindre équipement dédié au sport à domicile. Outre le déficit physique, certains sportifs auront du mal à supporter moralement ce confinement, eux qui avaient l'habitude de passer du «bon temps» dans les lieux publics. C'est dire l'ampleur des dégâts qu'occasionnerait un arrêt qui pourrait se prolonger au-delà du 5 avril. Des «vacances» que, à titre d'exemple, la LFP d'Abdelkrim Medaouar n'a pas prévues, elle qui a annoncé samedi le programme de ces deux championnats pendant le mois d'avril. Avec, désormais, trois rencontres de mises à jour (MCA-PAC, CRB-PAC et USMBA-ASO), la Ligue 1 qui devait reprendre du service le 1er avril (un vrai «poisson» comme noté dans notre précédente édition) sera de retour, si tout ira pour le mieux, le dimanche 5 avril. Si, donc, tout va bien la première date sera consacrée à l'organisation de deux rencontres de mise à jour (MCA-PAC et USMBA-ASO en l'occurrence) et une seconde le sera également pour tenir la dernière confrontation (CRB-PAC). Cette dernière pourrait avoir lieu trois jours après la tenue de la première mise à jour, soit le 8 avril. La première date qui s'offrirait à la ligue pour faire disputer la 23e journée est, si tout va bien, le 11 avril. Une date qui devait servir au déroulement de la 24e journée du championnat de Ligue 1. Avec un effet de cascade et, si bien entendu tout ira dans le sens de la maîtrise du coronavirus, il faudrait compter un minimum de six semaines pour boucler la saison 2019-2020. Soit un exercice qui s'achèvera au mieux vers début juin, période consacrée à la prochaine date Fifa (1er juin-9 juin). Le «cafouillage» sera davantage plus important si la pandémie du coronavirus n'est pas maîtrisée à la date du 5 avril… Des champions et des relégués tout désignés ? Un scénario-catastrophe auquel des pays où le football est une industrie ont imaginé des solutions, parfois drastiques, souvent détestables pour certains acteurs. Parmi ces solutions, figurent l'arrêt définitif des compétitions et la déclaration d'une saison à blanc. C'est-à-dire un exercice où le champion comme le relégué ne sont pas reconnus comme tels. Pas de récompenses, pas de sanctions, en définitive ? Cette voie a suscité des polémiques dans certains pays d'Europe, en France, en Italie et en Angleterre, où les enjeux financiers sont autrement plus importants. Des dirigeants de clubs ont carrément appelé à considérer le classement actuel comme référence pour le titre, les places européennes et celles réservées aux équipes reléguées tandis que d'autres, à l'exemple du président de l'O Lyon, Jean-Michel Aulas, qui a demandé à la LFP de son pays à tenir compte du classement de la saison dernière (2018-2019) pour distribuer les cartes européennes. «La meilleure solution serait de dire «c'est une saison blanche», ce qui évite à ceux qui sont concernés par le bas du tableau de se retourner contre la LFP et la FFF. Le règlement stipule que c'est à l'issue du championnat que l'on descend d'une division. Une décision différente ouvrirait une brèche juridique qui coûterait très cher. Le plus logique serait alors de dire : «On annule tout et on repart sur la situation du début de saison», déclarait-il dans une interview accordée au journal Le Monde. Une sortie qui a agacé les adversaires naturels d'Aulas mais aussi tout le microsome du football français. Une proposition «indécente», selon le président de l'O Marseille, Jacques-Henri Eyraud. L'on peut aisément comprendre cette levée de boucliers déclenchée dès lors que le club de la cité phocéenne est en avance cette saison sur le club de la Rhône-Alpes au classement général de la Ligue 1 (OM 2e et donc européen alors que l'OL est 7e et donc pas concerné par la LDC). En Algérie, où le débat n'est pas officiellement ouvert au sujet des potentiels champions et des clubs qui descendront en fin de championnats (Ligues 1 et 2 ainsi que les autres divisions), le souci est encore plus accru dès lors que la FAF a décidé l'année d'une refonte du système de la compétition avec notamment une Ligue 1 à 18 clubs, la dissolution de la Ligue 2 et la création d'un championnat amateur à deux groupes de 16 clubs. Outre le nom du champion et celui des équipes (4) qui disputeront les deux compétition interclubs de la CAF, et probablement deux clubs minimum en Coupe arabe, la fin de cet exercice devait voir la rétrogradation de deux clubs de la Ligue 1 vers le second palier et l'accession de 4 parmi l'élite dite professionnelle depuis l'actuelle Ligue 2. Un schéma qui risque fort d'être remis en cause si, par malheur, l'épidémie du coronavirus se prolongeait au-delà du 5 avril impactant fondamentalement la fin de la saison footballistique en Algérie. La LFP d'Abdelkrim Medaouar a-t-elle une solution pour remédier à tout imprévu ? M. B.