Selon le président de l'Ordre des médecins, le déconfinement ne doit en aucun cas se faire de manière soudaine, au risque d'entraîner une deuxième vague encore plus meurtrière. Massiva Zehraoui - Alger (Le Soir) - « Le spectre de la deuxième vague plane toujours », a donc prévenu, hier lundi, le docteur Mohamed Bekkat Berkani , président de l'Ordre des médecins, afin de rappeler aux citoyens que l'épidémie menace toujours la population. Intervenant à la Radio Chaîne 3, il se dit inquiet après avoir constaté « un certain relâchement de la part des citoyens depuis la veille du Ramadhan ». Celui-ci estime que plus les mesures de distanciation sociales sont respectées, plus on ira plus vite vers un déconfinement, bien qu'il estime que ce soit encore trop tôt pour passer à cette étape. Mohamed Bekkat Berkani rappelle que « cette décision appartient au chef de l'Etat », ajoutant que les responsables se basent sur des données épidémiologiques et, de ce fait, prennent en considération le plateau épidémique pour trancher la question. En tant que membre du Comité scientifique chargé de suivre l'évolution du coronavirus, il juge que le déconfinement devra, dans un premier temps, « obéir à des objectifs purement économiques ». Il explique qu'à un moment donné, certaines activités économiques doivent nécessairement reprendre. En revanche, il juge que pour le cas des établissements scolaires, « seuls les examens de fin d'année doivent être sauvés », car gage de la continuité des cursus. Le problème, relève-t-il, c'est que les enfants sont pour la plupart des porteurs sains, et, par conséquent, de potentiels dangers pour leur entourage. « Et on sait très bien qu'il relève de l'impossible de faire respecter à des enfants des mesures de distanciation », a-t-il insisté, ajoutant que pour l'heure, il n'est pas envisageable de revenir à une activité normale dans les écoles. Cela vaut aussi pour les déplacements des citoyens qui doivent, d'après l'intervenant, « être limités du mieux que possible en attendant que les choses se tassent ». Mohamed Bekkat Berkani tient à préciser qu'il n'existe aucun plan bien spécifique au déconfinement. « L'épidémie évolue différemment dans chaque pays », explique-t-il et ce, en fonction de sa prévalence, du nombre de décès, du nombre de nouveaux cas, mais encore des moyens dont dispose chaque pays pour faire face à la propagation du virus. Interpellé sur la hausse du nombre de contaminations au Covid-19 durant ces derniers jours, le docteur Berkani fait le lien avec la reprise de certaines activités commerciales d'un seul coup, après l'annonce du gouvernement. Il fait également savoir que la capacité de dépistage a été augmentée après la décentralisation d'un certain nombre de laboratoires, dans différentes wilayas du pays. Abordant le volet de la refonte du système de santé algérien qui se pose aujourd'hui comme une nécessité absolue, Mohamed Bekkat Berkani a fait remarquer que cette épidémie a mis à nu les défaillances qui entachent le secteur de la santé en Algérie. Il se dira soulagé du fait que le coronavirus n'ait pas touché de plein fouet notre pays, autrement dit-il, « les conséquences auraient été désastreuses ». Ce constat invite, selon lui, à réfléchir sérieusement et « revoir nos réelles priorités en matière de santé publique ». Mohamed Bekkat Berkani évoque à juste titre l'impératif de mettre en place une santé préventive et de la privilégier sur l'aspect curatif. Il soutient que les pays qui ont axé leurs efforts sur la prévention s'en sortent aujourd'hui « à bon compte », citant à titre d'exemple Cuba qui, « en dépit d'un embargo, a réussi grâce à la médecine préventive à faire une médecine de qualité ». Il rappelle que l'Agence nationale de la sécurité sanitaire jouera dorénavant un grand rôle pour réhabiliter cette médecine préventive. « Elle doit essayer de prévoir et de faire de véritables fiches », d'observer la situation et de donner aux politiques et aux gestionnaires de la santé des modes d'emploi et une posture à adopter pour telle ou telle situation. Cette agence devra, selon lui, « dépendre des plus hautes autorités du pays afin d'avoir une politique prospective de la santé », ce qui, en conséquence, nous permettra de faire des économies collectives et individuelles. M. Z.