Par Boubakeur Hamidechi [email protected] Gr�ce � deux campagnes globalement positives (Coupes d�Afrique et du monde), il partage avec le coach Sa�dane une notori�t� de premier plan : celle du dirigeant sportif le plus cr�dible. Raouraoua est certainement un pr�sident de f�d�ration combl�. Lui qui est revenu aux affaires du football en 2008 apr�s l�indescriptible foutoir dont s��tait rendu coupable son pr�d�cesseur, s�attendait-il � b�n�ficier d�un tel concours de circonstances ? Il est vrai que tout rentra dans l�ordre si vite dans la maison du football, auparavant sens dessus-dessous pour qu�il y soit vraiment � l�origine. Ajoutez � cela le fait que les r�sultats de la s�lection suivirent aussi rapidement et vous avez ce que l�on appelle mystiquement un exemple de la �baraka�. Cette main heureuse qui vous propulse son homme au-devant de la sc�ne. Le hasard ayant contribu� � nous sortir de l�orni�re � la faveur d�une s�rie d�exploits d�une armada d�expatri�s, l�on s�attend d�sormais � ce qu�il r�ussisse un autre challenge autrement essentiel pour le football national. Celui de transformer un effet d�aubaine sportive en catalyseur pour engager la plus p�rilleuse des r�formes de la pratique de cette discipline. Professionnaliser la comp�tition quitte � l�imposer au pas de charge. Se contentant d�audits approximatifs parce que r�alis�s � la h�te, l�on comprend qu�il ait n�glig� cette prudence �l�mentaire si courante chez les bons administrateurs. Press� de battre le fer de l�enthousiasme ambiant et surtout forcer la main des pouvoirs politiques tant qu�ils sont sensibles aux dividendes qu�ils peuvent tirer en termes de propagande, il n�a pas h�sit� � faire faire le grand saut � un championnat jusque-l� mi�vre, m�diocre sans int�r�t et sans attrait pour les puristes qui savent comparer. C�est ainsi qu�avec deux ou trois textes r�glementaires ficel�s en puisant ici et l� et sans r�flexion solide sur les sp�cificit�s de notre cas, l�on fit l�annonce que l�on sait. Puis sans lambiner, l�on tint quelques s�ances d�arbitrage afin de trancher dans l��ligibilit� des clubs et l�on accoucha, la semaine derni�re, d�une liste �tonnamment longue compos�e de 32 associations. Une gageure que cette inflation d�imp�trants au sujet desquels l�on assura l�opinion que leurs capacit�s furent s�rieusement examin�es et que dans l�ensemble ils r�pondaient aux normes. Mais quelles normes ? Or, c�est pr�cis�ment le soup�on de laxisme qui rend discutable l�entreprise elle-m�me. Agr�er en masse 32 soci�t�s par actions (SPA) sans qu�au pr�alable, l�on ait examin� � la loupe le dossier de chacune d�elles voire v�rifier les d�clarations des actionnaires et identifier avec une pr�cision de banquier toutes les capacit�s de tr�sorerie, n��tait-ce pas r�cidiver dans la carambouille que nous a valu une op�ration semblable en octobre 1999. Souvenons-nous, c�est avec la m�me l�g�ret� d�aujourd�hui que l�on op�ra afin d�assigner, � l��poque, � 12 associations le statut professionnel. Avec un nombre aussi impressionnant de clubs et l�engagement de g�rer deux paliers professionnels, l�aventure a de fortes chances de sombrer dans la spirale de l�assistanat. Ce risque-l� n�est pas � �carter car contrairement � ce qu�affirme le duo Raouraoua-Mechrara, le projet qu�ils pilotent n�est pas le premier du genre. Le pr�c�dent dont il est question ne tourna-t-il pas en eau de boudin dont les nuisances sont encore perceptibles � tous les niveaux de la gestion de nos championnats ? En son temps, la presse sp�cialis�e n�avait-elle pas tir� la sonnette d�alarme au moment o� toute une faune de candidats aux fonctions de dirigeants investissait les rouages des clubs ? D�magogues comme l�on ne peut pas l��tre par scrupules, ils forc�rent la main aux pouvoirs publics qui exhum�rent pour leur complaire, une ordonnance jusque-l� rest�e lettre morte : celle du 5 f�vrier 1995. La suite donnera certes raison aux journalistes, mais n�emp�chera pas pour autant la malfaisance de gangrener la totalit� du maillage de la comp�tition. Captation et dilapidation des subventions devinrent les deux mamelles des clubs. En r�sum�, le football connut alors une succession de f�d�rations folkloriques, de gestionnaires de clubs pittoresques mais aussi des raiders rompus � l�affairisme. En somme, un contexte id�al se mettait en place profitable � une g�n�ration spontan�e de dirigeants qui ne re�urent la r�v�lation des stades qu�� travers la rente et le �mercato� des athl�tes. Dans une impunit� quasi-totale, ils continuent � se payer sur la b�te en ponctionnant pour leur compte la transaction des joueurs tout en menant grand train de vie avec l�argent du contribuable qui dote les activit�s. Justement, a-t-on vraiment song� � mettre un terme � cette opacit�, vieille d�au moins 15 ann�es ? L�on assure publiquement que le professionnalisme poss�de par lui-m�me la capacit� de rompre avec les pratiques maffieuses. On peut le croire, mais avec beaucoup de r�serves, car la r�f�rence qui �taye un pareil discours est en elle-m�me un s�same sans pr�rogatives clairement d�finies. La future DNCG (Direction nationale de contr�le de gestion) que l�on nous sort comme un lapin de la ch�chia de nos magiciens sera tenue en haute suspicion aussi longtemps qu�elle d�pendra de la f�d�ration au lieu d��tre un organisme ind�pendant n�ayant d�autres relations qu�avec les institutions d�autorit� que sont l�administration fiscale et les tribunaux. Autrement expliqu�, il faudra parvenir � ce que les f�d�rations et leurs d�membrements (ligue professionnelle entre autres) soient totalement exclus du champ d�intervention d�un tel organisme. Au mieux, elles seraient destinataires des audits et tenus par cons�quent d�appliquer des sanctions sportives telles que rel�gations ou radiations. C�est dire que le monde professionnel du sport ne se limite pas � payer des b�tes de cirque. Il est un vaste domaine du spectacle o� se brassent et s�entrecroisent des int�r�ts qui exigent un contr�le en termes de droit. �tant une question d�entreprise, le club professionnel ne peut pas se soustraire � la transparence dans la gestion. Celle qui concerne, notamment, les tra�abilit�s des fonds manipul�s. L�on nous r�torquera �videmment que l�ensemble de ces pr�occupations ne sont pas ignor�es et qu�elles sont abord�es dans le fameux cahier des charge sauf que l�on omet de nous dire que l�arsenal juridique sur lequel s�appuie tout bon projet est tout � fait inop�rant par rapport � la sp�cificit� de cette activit�. Car contrairement � ce qui s�est fait ailleurs, ce passage au professionnalisme sportif est en train de s�op�rer sur la base d�un attirail de r�glements totalement inadapt�s. Un contre-exemple � notre d�calage, celui du mod�le fran�ais o� le l�gislateur a recadr� juridiquement les soci�t�s sportives � caract�re �conomique de mani�re telle qu�elles puissent � la fois g�n�rer du profit sans ali�ner la fonction sociale qu�elles v�hiculent. La loi Buffet datant de 1997 a, en effet, innov� en mati�re de fiscalit�s au profit des athl�tes en tenant, pr�cis�ment, compte du fait que leurs carri�res sont courtes. � l�inverse, la m�me loi est implacable concernant les proc�dures de faillite jusqu�� sugg�rer que de tels d�lits doivent relever du p�nal s�agissant du sport. Or, existe-t-il un semblable cadre juridique chez nous ? Les initiateurs de l�aventure admettent le retard tout en laissant entendre qu�il sera combl� au fur et � mesure que les structures s�embo�teront les unes aux autres et que s�affinera la formule de la comp�tition. Volontiers optimistes donc, les gens de la FAF et de la �Ligue� sont fermement convaincus que la mutation qualitative de l��lite est �galement possible par la seule vertu des encha�nements pragmatiques. Pour eux, la preuve du bien-fond� de cette aventure se d�cline dans le mouvement. Comme la �marche qui ne se prouve qu�en marchant�, ils pr�chent en quelque sorte une prise de risque, f�t-elle une fois encore co�teuse. Or, cela s�appelle du bidouillage afin de maquiller nos retards. Une op�ration de parrainage politique sous le couvert du sport. D�solant.