Devenu plus qu'indispensable en ces temps de pandémie de Covid-19 pour nombre de personnes à risques, le vaccin antigrippal se fait rare. Cette indisponibilité touche aussi bien les structures sanitaires publiques que les officines. Pourtant, l'Institut Pasteur d'Algérie écarte toute idée de pénurie. Où se trouve la faille ? Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Lancée en novembre dernier, la campagne nationale de vaccination contre la grippe saisonnière peine à atteindre sa vitesse de croisière. Faute de disponibilité du vaccin, aussi bien dans les structures publiques de santé que dans les officines, les citoyens n'arrivent pas à se faire vacciner. Pourtant, cette piqûre est plus qu'indispensable pour les personnes âgées et celles ayant des pathologies chroniques afin de se protéger des complications de la grippe. La vaccination permet, par ailleurs, d'éviter l'engorgement supplémentaire des hôpitaux en ces temps de pandémie de Covid-19. Ce constat de rareté du vaccin est confirmé par le président du Syndicat national des pharmaciens d'officine (Snapo), Messaoud Belambri. «En raison des conditions sanitaires actuelles, la demande du vaccin antigrippal a été, cette fois-ci, plus importante que les années précédentes. Elle était prévisible puisque tout le monde conseillait de se faire vacciner contre la grippe saisonnière afin d'éviter une aggravation dans le cas d'une contamination au coronavirus. L'organisme peut ainsi se renforcer et mieux se défendre», dit-il. Malheureusement, poursuit-il, «dès le lancement de la campagne vaccinale, les quantités reçues par les pharmaciens n'étaient pas équivalentes à celles des années précédentes». Selon lui, beaucoup d'officines n'ont pas pu accéder au vaccin antigrippal. «La majorité des pharmacies ont eu des quantités très limitées qui varient entre cinq et dix doses au maximum. Rares sont celles qui ont eu des quantités importantes de 50 à 100 doses. Ce sont généralement des officines à grand chiffre d'affaires, les mieux implantées», précise-t-il. Belambri déplore, à cet effet, que les pharmacies ne soient pas toutes traitées à égalité. «Cette discrimination entre les officines se répercute sur les citoyens qui n'auront pas accès au même niveau de soins et de protection», fait-il remarquer, avant de noter que 80% des pharmacies sont «mal situées» ou «situées dans des zones enclavées et isolées», et «n'ont pas un grand chiffre d'affaires». Insistant sur la rareté du vaccin antigrippal, il rappelle que la première dotation des officines a été effectuée au lancement de la campagne de vaccination contre la grippe le 3 novembre dernier. «La seconde dotation qui a eu lieu à la mi-novembre est pratiquement passée inaperçue alors que le troisième quota a été distribué il y a deux jours, mais il reste tout de même en quantités très limitées», détaille-t-il. Il souligne, d'ailleurs, que ce ne sont pas tous les grossistes qui proposent le vaccin antigrippal. «La majorité des grossistes n'ont pas pu avoir le vaccin», dit-il encore. Pourtant, l'Institut Pasteur Algérie (IPA) assure que le vaccin contre la grippe est bel et bien disponible. «Nous disposons encore de quantités à l'Institut Pasteur et nous continuons de répondre à la demande. Nous sommes en train de fournir les hôpitaux et lundi dernier, une opération de distribution a concerné les grossistes», précise Mme Zoulikha Semaï, directrice de l'approvisionnement à l'IPA. Elle rappelle que, jusqu'à présent, l'IPA a enregistré une demande de l'ordre de 1,8 million de doses. Selon elle, même si aucune demande supplémentaire n'a été exprimée en ce moment, l'IPA est prêt à s'approvisionner encore pour répondre à d'éventuels besoins. Quant à l'indisponibilité du vaccin dans les officines, elle précise que l'Institut Pasteur Algérie travaille exclusivement avec les grossistes. «Nous n'avons pas de visibilité sur le réseau des officines», dit-elle. La directrice de l'approvisionnement à l'IPA affirme, par ailleurs, qu'en raison de la pandémie de Covid-19, il y a eu un engouement cette année sur la vaccination contre la grippe saisonnière. «Habituellement, ce sont les personnes âgées de plus de 65 ans et celles présentant des maladies chroniques qui se font vacciner contre la grippe. Cette année, même les personnes ne présentant pas de pathologies particulières et des personnes plus jeunes ont exprimé le souhait de se faire vacciner. C'est bien qu'on ait enfin pris conscience de l'importance de la vaccination et que les gens veulent se protéger contre la grippe, ce qui réduira considérablement la pression sur les consultations des hôpitaux suffisamment occupés par la Covid-19», explique-t-elle. Le vaccin antigrippal toujours pas remboursable ! Outre le prix du vaccin contre la grippe saisonnière qui a doublé cette année, son non-remboursement par la Sécurité sociale a également surpris les «chanceux» bénéficiaires de cette vaccination. En effet, plusieurs patients se sont vu rejeter leur ordonnance par la Cnas (Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés). Mais pourquoi le vaccin de cette année n'est pas remboursé ? Selon le président du Snapo, ce produit n'est pas à ce jour introduit sur la liste des médicaments remboursables. «Seul le comité du remboursement médical a donné son accord lors de sa réunion le 27 octobre dernier», dit-il. Depuis, l'accord traîne dans certains bureaux administratifs. À lui seul, cet accord ne suffit pas et «doit être concrétisé par un arrêté ministériel et publié dans le Journal officiel afin de revisiter la nomenclature du système Chifa», explique Messaoud Belambri. Le non-remboursement de ce produit met généralement les officines en position «très gênante» vis-à-vis du malade. «Les patients se sont habitués à se faire rembourser ce vaccin d'autant que la vignette apposée sur le boîtier est verte. Certains d'entre eux acceptent mal que ce vaccin ne soit pas encore remboursé», dit-il encore. Ry. N.