Les opérateurs privés du domaine des énergies renouvelables veulent s'impliquer dans le développement de ce secteur. Ils estiment que le gouvernement fait fausse route en misant sur le «tout technologie». Selon eux, l'engineering financier est le moteur de cette industrie. Rym Nasri – Alger (Le Soir) – Expert en énergies renouvelables, le Dr Mouloud Bakli déplore l'absence d'une «volonté réelle» des pouvoirs publics d'aller concrètement vers la transition énergétique. Il pointe du doigt un nombre d'«obstacles» qui entravent la compétitivité dans le domaine des énergies renouvelables, notamment les taxes qu'il qualifie d'«aberration». «Le prix des matières premières est taxé et leur importation ne connaît aucune fluidité. Toutes ces entraves impactent le prix du kilowatt/h», disait-il, hier dimanche, en marge de la signature d'un protocole d'accord entre cinq opérateurs du secteur des énergies renouvelables, à Alger. Selon lui, le groupe des cinq industriels, Zergoun Group, SPS, Miltech, Ozgun et Nerta Solar Algérie, affiche son ambition de produire 500 mégawatts et 1 000 mégawatts, avec un matériel made in Algeria de grande qualité. D'ailleurs, poursuit l'expert, «ils sont, non seulement prêts à contribuer au programme national du développement des énergies renouvelables, mais aussi à exporter les panneaux photovoltaïques». Insistant sur l'absence d'une synergie entre le privé et le public, le Dr Bakli précise que dans son programme de développement de l'énergie solaire, le gouvernement évoque toujours l'importation, alors que le tissu industriel algérien privé parle déjà d'exportation. «Il y a un décalage ! La preuve : certaines entreprises vont exporter les panneaux photovoltaïques en Afrique, notamment au Soudan et au Sénégal», confie-t-il. Et d'ajouter : «On est en train de s'enliser dans le tout technologie, alors que celle-ci ne représente pas plus de 5% des énergies renouvelables. Certes, il faut maîtriser la technologie, mais le nerf de la guerre, c'est le financement. Il faut savoir ramener des financements et les injecter dans des projets qui vont générer de la richesse et rembourser la dette.» Il fait savoir que les fabricants de panneaux photovoltaïques comptent aujourd'hui sur l'importation d'une grande partie des intrants, mais «nous œuvrons pour que 36% de la valeur de ces panneaux soit réalisée en Algérie». Pour ce faire, il précise que des plans de discussions sont en cours avec des entreprises nationales. S'agissant de la production de l'énergie renouvelable, l'expert recommande, en outre, qu'elle soit d'abord injectée dans le réseau national. «Les études du réseau effectuées par les Allemands et les Italiens ont montré que nous pouvons injecter de grandes quantités dans le réseau national. Aujourd'hui, les zones capables d'accueillir l'énergie intermittente ont déjà été identifiées, dont Djelfa, l'un des meilleurs gisements éoliens en Afrique», dit-il. Et d'expliquer qu'un bon gisement éolien est au-dessus de 6,5 mètres/seconde, alors qu'à Djelfa, la vitesse est au-dessus de 8 m/s, voire au-dessus de 11 m/s parfois. Réactivé, le groupe de réflexion privé Club Energia, dont sont membres les cinq entreprises signataires du protocole d'accord, intervient, par ailleurs, pour apporter sa contribution au programme de développement énergétique national. «Sa mission est de communiquer, challenger et créer des ponts avec le gouvernement», note le Dr Mouloud Bakli. Ry. N.