Décidée à la faveur de la levée du gel sur le projet annoncée par le gouvernement, la restauration du tombeau, qui sera supervisée par des spécialistes algériens en coordination avec des entreprises relevant du ministère de la Culture et l'Association des Amis d'Imedghassen, s'est vue allouer un montant estimé à 150 millions de dinars, en plus de 500 000 dollars accordés dans le cadre d'une convention avec les Etats-Unis. Selon Bilal Benaziz, responsable du site d'Imedghassen et représentant de l'Office national de gestion et d'exploitation des biens culturels (OGEBC), le tombeau, évoqué pour la première fois par l'historien Abou Oubeid El Bakri (1030-1094) sous l'appellation de «tombe de Madghous», renvoie à une période importante de l'histoire de l'Algérie «en raison de ses caractéristiques techniques et architecturales marquant la transition entre l'art grec et égyptien». «A partir de là apparaît l'importance de ce monument qui constitue un témoin vivant du brassage culturel de cette époque, en plus de son inestimable valeur historique et esthétique», a ajouté le même responsable, affirmant que ce site est appelé à devenir, après sa restauration, une destination touristique susceptible de promouvoir la culture de la région, dont les vestiges numides éclipsés parfois par certains sites romains. Rappelant que ce monument a fait l'objet de plusieurs projets visant sa préservation, notamment l'étude relative au plan de protection et de rénovation du site et sa région, M. Benaziz a indiqué que la première étape a été achevée, tandis que la deuxième est actuellement à l'arrêt suite à des réserves non levées par le bureau d'études. Cela, en plus du projet de sécurisation et de valorisation conformément au programme de soutien et de valorisation du patrimoine culturel, dans le cadre d'une convention entre l'Union européenne et l'Algérie datant de 2016. La même source a relevé, en outre, que le «tombeau d'Imedghassen a bénéficié, antérieurement à cette opération, de plusieurs rénovations entre 1972 et 1973 dirigées par une commission mixte algéro-italienne dans le but de consolider certaines parties du monument». Pour sa part, Nabil Bertella, enseignant à l'université et membre de l'Association des Amis d'Imedghassen, estime que «le fait proéminent dans ce projet de restauration du tombeau d'Imedghassen, agréé par le ministère de la Culture et des Arts et soutenu par l'Etat, est d'être entrepris par des experts algériens». «L'Association des Amis d'Imedghassen contribuera à ce projet à travers le suivi des travaux ainsi que l'accompagnement des autorités locales et des entreprises chargées par la tutelle de sa concrétisation suivant des méthodes scientifiques permettant de mettre un terme à sa détérioration afin de le préserver», souligne-t-il à cet effet. Selon cet universitaire et membre de cette association qui œuvre depuis plusieurs années à la protection du tombeau, notamment à travers l'organisation du marathon d'Imedghassen, la restauration sera lancée prochainement avec la coopération des autorités locales. Et de préciser : «Suite à la visite de la ministre de la Culture et des Arts sur les lieux, le wali de Batna, Toufik Mezhoud, a décidé de raccorder le site aux réseaux d'alimentation en eau et d'électricité pour faciliter les travaux qui devront durer cinq ans.» «La vulnérabilité du monument s'est accrue ces dernières années ce qui suppose que les interventions programmées sur le site doivent être exécutées avec une attention particulière et une technicité minutieuse en tenant compte notamment de toutes les études et les tentatives de restauration précédentes», a-t-il renchéri. De leur côté, des spécialistes, des acteurs du mouvement associatif et autres experts en patrimoine archéologique considèrent que «ce projet intervient à point nommé et constitue une urgence pour éviter la dégradation d'autres parties du tombeau qui pourraient précipiter son effondrement». Eviter l'effondrement du mausolée A cet effet, l'expert en archéologie et conseiller de la ministre de la Culture et des Arts, Abderrahmane Khalifa, a affirmé que le tombeau d'Imedghassen comporte d'importants dommages au niveau du dôme dont la destruction a favorisé l'infiltration des eaux de pluie en profondeur, y compris dans la chambre funéraire et l'assise déjà fragilisée de ce monument archéologique». Construit au IVe siècle avant J.-C., ce monument est considéré comme le plus ancien site historique et archéologique d'Algérie, a rappelé la même source, assurant que ce site a fait l'objet d'après Kitab El Istibsar datant du XIIIe siècle de l'Hégire d'une tentative de démolition après que les fixations en plomb (pierres de taille unifiées par des crampons en bois enveloppés de plomb) reliant les pierres de l'édifice de la base au sommet ont été enlevées, mais le tombeau a finalement résisté. Erigé sur une petite colline, dans le douar Ouled Zayed (commune de Boumia), à environ 30 km à l'ouest de Batna, le tombeau d'Imedghassen reflète l'architecture funéraire d'un imposant bazina qui représente une tombe royale numide, selon Abdelkader Bitam, chef de service du patrimoine culturel de la direction de la culture. «Certains spécialistes attestent que ce tombeau est celui d'Imedghassen, roi des Amazighs zénètes, alors que d'autres affirment que c'est plutôt le tombeau du roi Syphax», a affirmé par ailleurs la même source. Bâti en grosses pierres brutes minutieusement taillées portant des inscriptions numides antérieures à l'invasion romaine, ce tombeau conjuguant l'architecture égyptienne et grecque a été construit, rappelle le même spécialiste, sous forme d'un dôme d'une hauteur de 19 mètres reposant sur une base cylindrique d'un diamètre de 59 mètres orné de 60 colonnes doriques. «Plusieurs recherches archéologiques ont été menées sur le site entre 1858 et 1867 et d'autres en 1873», a fait savoir la même source, rappelant que le tombeau d'Imedghassen a été classée dans la liste des sites et monuments antiques en 1900. La même source a ajouté que ce site archéologique a été publié dans le Journal Officiel le 23 janvier 1968, avant de proposer en 2002 ce monument classé patrimoine national, au même titre que d'autres tombeaux anciens, à un classement au patrimoine mondial.