Le chanteur kabyle Oulahlou réagit à son tour au crime atroce qui a été perpétré par la foule de Larbaâ-Nath-Irathen le 11 août dernier contre la personne de Djamel Bensmaïl, accusé à tort de pyromanie. L'un des chanteurs kabyles les plus emblématiques du répertoire engagé vient de diffuser une chanson en hommage à Djamel Bensmaïl, jeune artiste miliani venu en Kabylie pour participer à l'élan de solidarité nationale contre les feux meurtriers qui ravageaient la région, lynché, poignardé et brûlé par une foule qui l'accusait d'être à l'origine des incendies. L'auteur du très populaire «Pouvoir assassin» a décidé de saluer la mémoire de cette victime expiatoire et dénoncer le crime abject à travers une chanson en arabe, ce qui est inédit dans son répertoire. La vedette de la funk kabyle choisit un style chaâbi moderne, délibérément festif, pour célébrer Djamel Bensmaïl, musicien, chanteur, artiste-peintre et passionné de volontariat, qui respirait la joie de vivre et l'altruisme. Dani Dani est donc une chanson qui prend à contre-pied l'atrocité et l'innommable du crime et leur oppose la beauté et la fraîcheur qui caractérisaient Djamel Bensmaïl. Le clip tourné dans un studio d'enregistrement commence par une photo de la victime parée de sa guitare et enchaîne sur un Oulahlou, également armé de son instrument fétiche, entonnant une chanson au rythme vivace introduite de manière classique par un premier couplet de louanges à Dieu et son prophète et de réjouissance à l'idée d'une «belle soirée aux rythmes d'el Meya et du Zidani». Le refrain, quant à lui, emprunte aux registres mélancoliques sur la solitude et la nostalgie d'une époque révolue. La chanson se poursuit avec l'évocation de souvenirs en compagnie de l'être aimé, de la jeunesse et des joies d'antan. Puis Oulahlou enchaîne avec un regard sombre sur la situation actuelle tout en avouant l'impuissance de ses rimes face aux tragédies successives, avant d'entrer dans le vif du sujet en évoquant Djamel Bensmaïl : «Les vils et les oppresseurs nous ont brûlés vifs et ne t'ont pas épargné, Djamel, que Dieu ait ton âme.» Si le nouveau titre d'Oulahlou a été apprécié par le plus grand nombre depuis sa diffusion sur internet avant-hier (plus de 76 000 vues sur YouTube en 24 heures), certains commentateurs tantôt malveillants, tantôt moralisateurs, se fendaient de critiques acerbes à l'encontre du chanteur. Les uns lui reprochent en effet d'évoquer la mémoire d'un défunt à travers la musique alors que la seule chose à faire est de prier pour lui et diffuser du Coran pour le salut de son âme ! D'autres s'élançaient dans une responsabilisation collective de la Kabylie, Oulahlou y compris... S. H.