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«ll est temps pour qu'une compagnie comme la nôtre entre en compétition»
LES PROMOTEURS DE FLYWESTAF, PREMIERE COMPAGNIE ALGERIENNE LOW COST, AU SOIR D'ALGERIE :
Publié dans Le Soir d'Algérie le 30 - 08 - 2021


Entretien réalisé par Ilhem Tir
L'ouverture du secteur aérien aux investisseurs privés algériens, après 18 ans, a reçu l'aval des hautes autorités du pays.
La rencontre, tenue le 28 juillet dernier, du ministre des Transports avec une dizaine d'investisseurs potentiels dans le secteur de l'aérien a inauguré une nouvelle ère ainsi que le choix d'encourager le développement de compagnies aériennes privées en Algérie. En effet, le projet prend forme et la demande d'un accord de principe pour l'obtention d'une concession dans le cadre du projet de création de la compagnie aérienne low cost FlyWestaf (transport des passagers et fret), déposée le 18 août au niveau de la Direction de l'aviation civile et de la météorologie relevant du ministère des Transports, a été acceptée. Dans cet entretien accordé exclusivement au Soir d'Algérie, les 3 promoteurs du projet FlyWestaf, dirigé par Chakib Mohamed Ziani Cherif, commandant de bord sur Boeing 737Ng/Max au Canada et dans différentes Airlines dans le monde et fondateur de FlyWestaf, compagnie aérienne low cost, ont apporté toutes les précisions sur leur compagnie, leur partenariat et leur projet précisant que leurs bureaux seront ouverts en septembre à Alger, alors que leur siège social est prévu à Oran.

Le Soir d'Algérie : Pouvez-vous présenter le projet ?
Capt Chakib Mohamed Ziani Cherif : Le projet West AF est né en 2015 entre le Canada et United Kingdom, après quelques expériences dans des compagnies aériennes en Afrique comme commandant de bord. La question que l'on s'est posée est pourquoi la plupart des compagnies africaines enchaînent les faillites malgré les prix, deux fois plus chers au mille nautique, l'absence d'opérations hivernales comme le Canada où le coût d'exploitation coûte plus cher, le manque de concurrence, le bas coût du travail, le manque de moyens de transport et infrastructures (train, bus), etc.
C'est ainsi que la genèse du projet est née. Pour nous, il ne s'agit pas de copier un modèle économique, car c'est une erreur. Je prends l'exemple du modèle EasyJet qui a été appliqué à Fastjet, en Tanzanie, nous avons vu le résultat... plusieurs restructurations. Le business model FlyWestaf a été travaillé, amélioré, réajusté et les risques identifiés, étudiés, quantifiés, pour arriver à un modèle avec une optimisation maximale. Le nom de la compagnie est voulu pour une meilleure exportation, plus facile pour créer des franchises avec des pays africains à partir de l'Algérie.
FlyWestaf est avant tout une équipe de pionniers fondateurs multiculturelle qui a travaillé sans relâche depuis le début : Chakib Ziani Cherif, Stéphanie Crespin, Richard Powell, Ousmane Nian (qui nous a quittés), Hamish Davidson. Sans oublier l'équipe à l'intérieur de l'Algérie : Ghezal Amor, Mohamed Hafiz, Amine Tibourtine et l'agence MGH à Paris Communication, stratégie de marque et marketing.
Je ne vous cache pas que depuis le développement de la stratégie du BP économique FlyWestaf, le projet était destiné pour l'Algérie.
Votre modèle a été élu meilleur modèle post-Covid-19, pourquoi ?
Nous avons été les premiers à identifier le risque sanitaire. À l'époque, il s'appelait Ebola, alors pour nous il fallait résoudre une équation : ne pas dépendre à 100% des revenus billet passager et créer des revenus auxiliaires.
Le transport aérien commercial est une activité qui demande une expertise technique, financière et sécuritaire. En 2019, c'est avec un grand honneur que notre expertise nous a permis de conseiller Monsieur Adama Barrow, Son Excellence Monsieur le Président de Gambie, pour l'implantation du modèle FlyWestaf LCC (Low Cost Carrier) à Banjul.
Notre business model a été récompensé comme l'une des meilleures start-up pour l'Afrique (par Tony Elumelu, entrepreneur Ship Programme), élu meilleur business model post-Covid-19 par la presse professionnelle internationale (Africa Aerospace et Just African Aviation).
Décrivez-nous votre projet et votre compagnie, FlyWestaf...
FlyWestaf sera une compagnie algérienne de droit algérien, tourné 100% vers le client. Si vous regardez bien notre logo, il y a la signature Algérie en arabe. Elle n'a pas été choisie par pur hasard, c'est l'Algérie qui gagne, surmonte et relève les défis.
Choisir une compagnie aérienne, c'est plus que prendre un avion en 2021. Au-delà bien-sûr des services, de la ponctualité et du prix, d'autres facteurs subconscients ou conscients entrent en jeu, ce qui fait la force de la marque (brand stratégie), ce qui nous a amenés à travailler sur le marketing cognitif et d'autres innovations marketing. En consultant les meilleurs experts mondiaux de la chaîne de valeur de l'aviation des compagnies aériennes, des aéroports et du contrôle du trafic aérien, FlyWestaf a une stratégie pour offrir des performances élevées tout en gérant les risques avant qu'ils ne surviennent.
Chez FlyWestaf, nous avons une devise : tout est connecté (everything is connected). Tout ne se joue pas dans l'avion. Croire encore à cela est une énorme erreur. La meilleure offre se joue sur tout : de la stratégie distribution PSS, au système de paiement, au choix des aéroports, à l'IA (intelligence artificielle) pour la partie digitale, à la gestion des ressources humaines : chez FlyWestaf, un agent de bord est avant tout un agent commercial, jusqu'à la configuration de la cabine de l'avion.
Tout passe par l'optimisation des opérations sol embarquement/débarquement, au cost analysis (analyse de coût) par route et avion. Bref, je ne peux pas tout dévoiler pour des raisons de confidentialité, mais croyez-moi, tout a son importance pour garder une marge net au siège/Nm/kg afin d'avoir un monitoring en temps réel et s'adapter à tout changement qui impacte nos opérations et prévenir les risques.
Êtes-vous disposés à coopérer avec Air Algérie ?
Face à la concurrence étrangère au Nord et au Sud, les compagnies aériennes algériennes doivent être fortes et agressives. Personne ne nous fera de cadeau. À ce sujet, nous sommes disposés à accueillir Air Algérie dans notre capital, toutes les Major Airlines dans le monde ont investi dans des modèles low cost, pourquoi pas Air Algérie...
C'est avec un grand plaisir que nous invitons aussi tous les investisseurs algériens institutionnels ou privés à nous rejoindre pour construire, ensemble, cette Airline que j'espère sera dans le futur un fleuron de l'industrie aérienne en Algérie, avec notre leitmotiv : dépense moins, voyage plus.
Comment avez-vous accueilli l'information relative à l'ouverture du secteur aérien aux investisseurs privés algériens ?
Le rêve devient réalité ! Voilà mon premier sentiment. La concurrence devient de plus en plus féroce, le pavillon national ne peut pas faire face seul aux autres concurrents. Il y a un déséquilibre flagrant entre la concurrence qui dessert l'Algérie face au pavillon national, cela ne peut pas continuer. L'Algérie est un marché en naissance, relié à un autre marché qui est au sud de nos frontières : l'Afrique de l'Ouest. Avant la crise de Covid-19, les études de l'IATA donnaient pour les 20 prochaines années une croissance de 5,7% prévue par an.
L'accord sur l'exploitation du cargo, ratifié par la Zone de libre-échange continentale africaine (Zleca) le 2 avril 2019, vise à augmenter le commerce intra-africain de 52% d'ici 2022 et à supprimer les droits de douane sur 90% des marchandises. Notre pays détient une place de choix pour capter le trafic aérien.
Notre base satellite sera Tamanrasset qui sera pour FlyWestaf son hub secondaire, répondant à la volonté des passagers à destination du Sahel et de l'Europ et selon nos études de marché. Il n'est pas normal que l'Algérie ne capte que 10%, soit 1,5 million de passagers, alors que le marché global Europe-Afrique est de 16 millions de passagers par an. Il est temps qu'une compagnie low cost comme la nôtre, flexible, qui utilise les nouveaux process de l'aviation commerciale, entre en compétition frontale pour capter ces parts du marché. FlyWestaf se battra pour chaque client, parce que chaque client gagné est une création d'emploi direct et de richesse pour l'Algérie.
L'ouverture à la concurrence a également eu un écho sur le plan international. Les demandes de collaboration que l'on reçoit sont juste incroyables et démontrent l'importance de l'Algérie.
Du code share (code partagé) sur la route New York-Alger-New York à l'investissement d'un fonds américain ou private equity dans FlyWestaf passent par le développement de jointures dans d'autres parties d'activité dans le secteur aérien comme MRO (centre de maintenance).
Qui sont vos partenaires ?
M. Richard Powell, co-fondateur : FlyWestaf a des partenaires solides à travers l'Afrique, l'Europe, le Moyen-Orient et l'Amérique du Sud, comprenant des leaders mondiaux du conseil en aviation tels que Lufthansa Consulting avec qui nous avons signé un NDA pour une négociation globale à tous les niveaux du projet. Nous sommes très fiers d'être sollicités par des géants de l'industrie intéressés par notre business model, des experts en infrastructure informatique tels que Huawei pour le développement de nos applications Mobile Airline et Aéroport, des consultants en gestion du trafic aérien et aéroportuaire tels que To70, et des fournisseurs de systèmes de gestion des compagnies aériennes tels que Kiu pour une intégration complète de toutes les opérations.
De plus, nous avons la chance d'avoir à nos côtés de-Havilland qui nous assiste aussi bien du côté de l'exploitation que de la maintenance selon les recommandations des ingénieurs de performance de ce dernier. Sans oublier le cabinet RMGC Solution & Advise à Oran qui s'occupe du volet juridique et technico-financier pour nous en Algérie.
Notre présence dans les nombreux salons avec AviaDev garantit que nous sommes tenus au courant des dernières nouvelles de l'aviation en Afrique et au-delà. Tous nos partenaires ont fait et continuent de faire un travail remarquable.
Est-ce le bon moment de lancer votre compagnie aérienne FlyWestaf ?
M. Hamish Davidson/co-founder : qui dit crise, dit opportunité !!! Si vous attendez le bon moment pour vous lancer, c'est déjà trop tard... La règle : anticipation.
Il est bien connu que le Covid-19 a fait de 2020 la pire année jamais enregistrée pour l'industrie du transport aérien dans le monde. Le nombre total de passagers ayant chuté de plus de 60% à 1,8 million par rapport à 2019. Selon l'IATA, l'impact a été le plus important sur les marchés internationaux qui ont diminué de plus de 75% tandis que la demande intérieure a chuté de près de 49%. La région Afrique a subi la troisième plus forte baisse du trafic de passagers de 68,5% derrière le Moyen-Orient et l'Europe. À son apogée, les deux tiers de la flotte mondiale de transport aérien commercial ont été cloués au sol car les frontières ont été fermées et des quarantaines imposées. Le chiffre d'affaires mondial prévu pour 2021 est de 255 milliards de dollars, ce qui représente une amélioration significative par rapport à 2020, mais reste bien en dessous des niveaux de 2019. Au cours des derniers mois, nous avons vu des développements positifs avec une augmentation des vols entre l'Amérique du Nord et l'Asie vers l'Europe et des voyages intérieurs européens affichant de bons gains. Les programmes de vaccination que les gouvernements ont mis en œuvre aspirent à une normalisation prochaine du trafic aérien et un retour à la normale. On s'attend à ce que bien que le trafic transfrontalier national et court-moyen-courrier continue d'augmenter, le niveau élevé de la demande internationale long-courrier d'avant Covid-19 ne devrait pas rebondir au même rythme.
En ce qui concerne spécifiquement les compagnies aériennes africaines, les exploitants d'aéroports ont contribué à 9 milliards de dollars au PIB de la région avant Covid-19 et l'industrie du transport aérien a été le catalyseur du développement du secteur du tourisme de la région, qui, en 2018, a contribué à 44 milliards de dollars au PIB.
L'Afrique était considérée par de nombreux analystes comme la seule région au monde qui offrait le plus grand potentiel de croissance pour son industrie aéronautique, en particulier l'ouverture à la concurrence de pays à forte valeur de marché comme l'Algérie, qui se trouve comme un pivot sur trois gros marchés.
Alors que certaines statistiques ont montré que l'Afrique est l'une des régions connaissant la plus forte baisse de la demande de passagers dans certaines zones principalement nationales, il existe une demande croissante pour le retour du transport aérien régulier. Cela ouvre la porte à de nouveaux entrants qui n'ont pas subi la crise, pour se développer sur ces marchés. Ce qui est clair, c'est qu'avec des possibilités aussi élevées d'expansion du transport aérien, les modèles d'exploitation obsolètes utilisés par de nombreuses compagnies aériennes deviendront rapidement une chose du passé et devront être mis à jour ou remplacés par des structures d'exploitation modèles plus dynamiques avec un œil attentif sur les performances économiques et la poursuite des actions visant à réduire les coûts du siège au kilomètre.
Les nouveaux entrants qui ont développé de telles structures d'exploitation dès le départ seront bien placés pour capitaliser les lacunes laissées par leurs prédécesseurs et profiteront de la chute des taux du leasing dry lease (location d'avion seul). L'Algérie sera considérée dans les prochaines décennies comme une terre d'opportunités pour l'industrie de l'aviation avec un chiffre d'affaires qui pèsera quantitativement dans le PIB. L'Algérie est une terre de défi incontestablement.
Le mot de la fin...
Le projet ne serait pas complet sans RSE (Responsabilité sociale de l'entreprise). Nous accordons une importance capitale à nos collaborateurs, afin d'offrir les meilleures conditions de travail, de formation et de développement dans la société. Des mécanismes sont prévus pour fidéliser nos collaborateurs. Je termine avec une note d'avenir, notre responsabilité dans la société algérienne.
Je prends un exemple : le 5 juillet de chaque année, FlyWestaf donnera la chance à des enfants qui n'ont jamais eu l'occasion de prendre l'avion de faire un vol local pour faire naître le rêve dans les yeux de nos enfants, parce que tout commence par là.
I. T.


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