L'un des plus vastes mouvements diplomatiques jamais enregistré depuis ces deux dernières décennies est en cours. Le chef de l'Etat cherche à mettre en place une diplomatie «offensive», adaptée aux situations auxquelles fait ou est appelé à faire face le pays... Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Dans ce genre d'événements, car s'en est un, il y a différentes facettes qui permettent d'appréhender le pourquoi de cette décision et le moment choisi pour la rendre effective. À ce stade, nous sommes face à de grandes annonces principalement axées sur deux points. Le premier est naturellement lié à la mise en place d'un groupe composé de sept personnes chargées de missions très sensibles. Le choix s'est porté sur des diplomates ayant de longues années de pratique derrière eux, beaucoup dans le milieu les qualifient de poids lourds de la diplomatie algérienne car ayant à leur actif de longues années d'exercice à travers différentes capitales du monde. Des missions attribuées à trois d'entre eux retiennent particulièrement l'attention. Le lourd dossier du Sahara Occidental et des pays du Maghreb a été ainsi attribué à Amar Belani, ex-ambassadeur d'Algérie à Bruxelles et auprès de l'Union européenne. Le choix de l'homme, surnommé la bête noire du Maroc, est logique, presque naturel compte tenu de ses connaissances dans le dossier du Sahara Occidental. Successivement ambassadeur au Pakistan, en Grande-Bretagne, en Grèce et au Maroc, Ahmed Benyamina a été chargé des questions de sécurité internationale. Vient ensuite le chargé de la diplomatie économique, Abdelkrim Harchaoui qui occupait précédemment les fonctions de ministre des Finances puis du commerce. Sa nomination s'est faite dans le prolongement de l'une des missions principales que s'est fixé Tebboune, à savoir la relance économique. Leila Zerrougui, Boudjemaâ Delmi, Taos Haddadi-Djellouli et Noureddine Aouam ont, quant à eux, été respectivement chargés des grands partenariats internationaux, des questions africaines, de la communauté nationale établie à l'étranger et enfin des pays arabes. Les sept envoyés spéciaux nommés travailleront sous l'autorité directe du ministre des Affaires étrangères, une bonne chose en soi, expliquent des spécialistes car «il y aurait eu chevauchement des dossiers si décision avait été prise de les rattacher directement à la présidence de la république». Ce qu'il faut savoir, est que ces sept diplomates occupent des postes nouveaux en quelque sorte. Jusqu'à l'heure, tous les envoyés spéciaux nommés par l'Algérie accomplissaient des missions ponctuelles, mais la fonction d'envoyé spécial devient permanente cette fois dans le nouveau déploiement mis en place. Dans un commentaire, l'agence de presse officielle (APS) indiquait hier que cet «ajustement a vocation à renforcer la capacité d'interaction et d'influence de la diplomatie algérienne et la démultiplication de la présence de l'Algérie et l'efficacité de son action sur la scène régionale et internationale, ainsi que sur les questions globales et transversales». Les sept envoyés spéciaux seront chargés d'accompagner le MAE, «notamment en matière d'analyse et d'anticipation dans la perspective tracée par le chef de l'Etat concernant une diplomatie réellement dynamique, en mesure de disposer de capacités d'initiative sur les grands dossiers régionaux et internationaux, et de s'inscrire dans une logique d'influence pour conforter le rôle de l'Algérie en tant que puissance médiane productrice et exportatrice de paix, de stabilité et de sécurité». Abdelmadjid Tebboune a pris également une autre décision, celle de lancer un très vaste mouvement qui touchera plus de 70 postes diplomatiques et consulaires. Il va sans dire que cette décision revêt un caractère extrêmement important dans le secteur. Ce genre de mouvement a été très longtemps attendu par les professionnels qui ont déploré l'absence d'une valorisation des carrières tout au long de ces vingt dernières années. Les nominations «incomprises», le long maintien des mêmes diplomates aux mêmes postes durant plusieurs mandats, le refus des anciens d'obtempérer aux ordres de la centrale... ont notamment contribué à l'installation d'une atmosphère pas du tout propice au travail dans ce secteur extrêmement sensible. Le fait qu'un remaniement d'une aussi grande ampleur ait été décidé a créé l'ébullition. Depuis deux jours, des informations contradictoires circulent chez les concernés. Des permutations d'ambassadeurs dans les grandes capitales sont évoquées avec insistance, tous les noms avancés sont cependant mis sur le compte de la rumeur pour le moment, puisque la liste définitive n'a pas encore été établie, apprend-on. La liste existante est faite de noms proposés et approuvés pour les dossiers les plus importants. Celle des ambassadeurs et consuls n'est pas finalisée. Elle fera l'objet d'une publication officielle par les services concernés, nous confie-t-on encore. A. C.