Le FLN au musée... ... de la boxe ! Des femmes manifestent ! Pas n'importe où. À Kaboul. La capitale de l'Afghanistan sous récent contrôle des talibans. Leurs cortèges fendent les principales artères de la ville. Des pick-up chargés de tangos armés jusqu'aux dents, l'air goguenard les longent, les frôlent et manquent de les renverser. Elles ne bronchent pas. Ne dévient pas d'un pouce leur marche. Ne baissent pas les yeux. Ne cachent pas honteusement leurs pancartes. Bien au contraire, ces femmes les brandissent encore plus haut et fixent dans les yeux les «mâles guerriers», nouveaux-anciens seigneurs du pays. Sortir dans Kaboul aujourd'hui relève de la gageure. Sortir dans Kaboul aujourd'hui lorsqu'on est femme relève de l'héroïsme. Sortir manifester contre les talibans aujourd'hui, à Kaboul, lorsqu'on est femme, relève de l'épique, de l'épopée et du tragique de nos lâchetés d'hommes. Beaucoup d'entre ces femmes qui bravent les intégristes et leur chefs-Mollah auraient pu aller s'agglutiner à l'aéroport de la capitale afghane pour espérer s'échapper dans un avion américain, britannique, australien ou français. Non ! Elles sont restées, loin des bousculades, du piétinement des dignités et des éclats des bombes «musulmanes» et des attentats au nom d'Allah. Non, encore une fois. Elles ne sont pas allées chercher l'oubli dans quelque carlingue du départ. Se sont-elles alors contentées de rester cloîtrées dans la peur glauque de leurs maisons ? Non, encore et encore. Elles ont bravé l'interdit en staccato, les fusils mitrailleurs des «Etudiants en religion» et ont manifesté. Elles ont crié. Elles ont craché à la face des négateurs de la vie leur volonté de ne pas céder sans combattre. Pourquoi je vous raconte tout ça et évoque ici les femmes courage de Kaboul, citadelle des «fous de Dieu» ? Parce que plus je voyais ces images, plus me revenait à l'esprit le zinc d'un bistrot parisien. Une portion de comptoir jonchée de tickets du PMU, de côtes de chevaux bidouillées, de mégots de cigarettes et d'appels téléphonés à la Révolution lointaine, d'encouragements à aller braver la méchante «junte coloniale», flexy couard cocooné dans l'ambiance enfumée et décontractée d'un bar parisien, d'un p'tit bout de nappe posé sur le zinc dans un troquet et sur lequel on dessine sans suer les nouvelles frontières de ses fantasmes mégalomaniaques. Les manifestantes de Kaboul ne dessinent rien dans les nuages de l'exil en pantoufles. Elles pointent et collent in situ leurs visages au bout de fusils prêts à tout moment à cracher la mort. Les révolutions des bouts de zinc, finalement, ne mènent qu'à la gueule de bois des impuissants. Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue. H. L.