Sous-officier de l'armée française, son grand-père s'était engagé aux côtés du FLN en lutte pour l'indépendance de l'Algérie. Ministre à 58 ans, Arnaud Montebourg, son descendant, présente bien, belle allure – « Quel bel homme ! », dirait le sulfureux Jack Lang – les idées claires dans un terrain politique où il n'est pas aisé d'émerger. Son cheval de bataille dans l'équipe de François Hollande c'était l'alter-mondialisme avec comme substrat la défense du produit « made in France ». Il se lance lui-même dans l'entrepreneuriat une fois libéré de ses obligations gouvernementales, suite à un désaccord politique. De quoi faire la « Une » des journaux à n'en pas finir. C'est la coqueluche. Grâce à son prolongement filial des deux côtés de la Méditerranée, l'homme politique dispose d'une sérieuse carte à jouer. Le facteur subjectif joue pour lui du fait de son ascendance algérienne par sa mère aussi. Ses racines entremêlées, franco-algériennes, sont un atout lui permettant de donner une dimension nouvelle aux relations compliquées entre la France et l'Algérie. Briser un certain ostracisme à l'endroit de ses origines qu'il revendique fièrement est en soi une avancée. Après tout, Gérald Darmanin, l'actuel ministre de l'Intérieur, est lui aussi, pour une part, d'extraction algérienne. « Je m'appelle Moussa », ne cesse-t-il de répéter. Cette permissivité, si elle n'est pas spécifiquement française, crée un a-priori positif, bien sûr dans le cadre de la République française. En cela, c'est un avantage précieux dans la gestion des relations politiques, économiques ou d'un tout autre ordre. Après tout, la très « british » Angleterre a bien un Premier ministre, Boris Johnson, dont les aïeux seraient turcs ! C'est le propre des grandes nations que cette capacité d'assimilation sur la base du mérite et de l'acceptation d'un destin commun. Septime Sévère, berbère, n'a-t-il pas été empereur de Rome, allant jusqu'à fonder sa propre dynastie ? Pour preuve, le fameux Edit de Caracalla qui succédera à son père octroie la citoyenneté romaine à tous les habitants de l'Empire. Réduite au rang de vassal, dès la fin de la Grande Guerre, par les Etats-Unis, la « douce France » reçoit comme un électrochoc la perte du contrat de vente de 12 sous-marins à l'Australie. Suivistes dans toutes les aventures militaires de la puissante Amérique, les politiques français ont du mal à comprendre. N'est-ce pas qu'en affaire les intérêts priment ? Cela est rendu d'autant plus cocasse lorsque c'est suivi d'un changement d'alliance dans un redéploiement politique laissant à la traîne les amitiés d'antan. Arnaud Montebourg, Moussa Darmanin, appartenant à des camps politiques rivaux, pourraient-ils converger vers la recherche d'alternatives innovantes dans les relations franco-algériennes marquées par le poids d'un passé qu'exploitent les lepénistes, les zemmouristes et les anciens de l'« Algérie de papa » ? La pré-campagne présidentielle, déjà enclenchée, fera-t-elle naître un nouvel état d'esprit dans un partenariat « win-win » ? En retrait de la vie politique depuis son départ du gouvernement socialiste, Arnaud Montebourg affirme avec force sa volonté de « remontada » dans un style propre à lui. Saura-t-il imprimer cette dynamique dans les relations franco-algériennes marquées par des rendez- vous manqués récurrents depuis des lustres ? Brahim Taouchichet