L'Algérie a une nouvelle fois appelé au retrait des mercenaires et des forces étrangères de Libye. Une exigence de la communauté internationale qui tarde à être mise en pratique. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - À moins de 90 jours de l'élection générale prévue en Libye, la question du retrait des mercenaires et des forces étrangères en est toujours au stade des déclarations d'intention. Cette exigence revient pourtant régulièrement depuis la tenue de la seconde conférence de Berlin sur la Libye en juin 2021. L'Algérie fait partie des Etats qui appellent à un retrait rapide et organisé de ces éléments étrangers. Une demande réitérée jeudi 30 septembre par Amar Belani, l'envoyé spécial chargé de la question du Sahara Occidental et des Etats du Maghreb arabe auprès du ministre des Affaires étrangères. Belani, qui participait aux travaux de la réunion ministérielle du Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'Union africaine (UA) consacrée à l'impact prévu du retrait des forces étrangères et des mercenaires de Libye sur le Sahel et l'Afrique, s'est montré insistant sur « la nécessité d'un retrait progressif, organisé et sécurisé, sous l'égide des Nations-Unies et en coordination avec les pays voisins ». Il a notamment mis en garde contre «les retombées d'une circulation non étudiée et incontrôlée des mercenaires et des armes hors du territoire libyen sur la sécurité et la stabilité des pays voisins, la région sahélo-saharienne et toute l'Afrique ». Cette position, l'Algérie l'avait affichée lors d'une réunion des six pays du voisinage libyen qui s'est déroulée les 30 et 31 août à Alger. La question du retrait des mercenaires était au centre de cette importante rencontre régionale. «Le retrait des mercenaires, des terroristes et des forces irrégulières est une question fondamentale qui conditionne le succès des élections. La Libye est la première victime de ces éléments irréguliers et le risque est réel que d'autres pays voisins soient également victimes si le retrait [des mercenaires, ndlr] ne s'effectue pas d'une manière transparente, organisée et sous le contrôle et la responsabilité de la communauté internationale», avait alors déclaré Ramtane Lamamra, le ministre algérien des Affaires étrangères. La crainte d'Alger, c'est que ces individus déstabilisent la Libye durant la phase cruciale des élections générales de décembre prochain ou qu'ils traversent les frontières pour mener des activités terroristes dans les pays de la région. Selon l'ONU, il y aurait actuellement plus de 20.000 mercenaires en Libye, dont 13 000 Syriens engagés par la Turquie pour le compte du GNA et 11 000 Soudanais et Tchadiens dans les troupes du maréchal Khalifa Haftar. Le Tchad semble s'opposer à la dynamique régionale de « récupération » des éléments armés étrangers. À la veille de la réunion d'Alger, Mahamat Idriss Déby Itno, le président du Conseil militaire de transition CMT), avait affiché cette position lors d'une visite à Khartoum : « Recrutés, formés, encadrés, armés et financés par des puissances étrangères, les mercenaires tchadiens et soudanais présents en Libye ne doivent pas être autorisés à quitter la Libye à cause de la grave source de menace qu'ils constituent pour la stabilité et la sécurité aussi bien du Tchad que du Soudan. » Pour ce qui est des forces étrangères, il s'agit essentiellement de militaires turcs dépêchés par Ankara pour encadrer les mercenaires syriens. L'ONU fait également état de la présence de mercenaires russes membres de la société Wagner aux côtés des troupes du maréchal Khalifa Haftar. Moscou n'a jamais confirmé cette présence mais a toujours nié toute proximité de cette compagnie de sécurité avec le Kremlin. Reste maintenant l'essentiel : la réalité sur le terrain démontre qu'aucun programme de rapatriement de mercenaires n'a été adopté. Une situation qui pourrait devenir problématique à gérer dans les semaines à venir. T. H.