Le représentant du Front Polisario en Europe et auprès de l'Union européenne (UE), Oubi Bouchraya Bachir, a fustigé la France qui, selon lui, «s'interdit de facto de jouer un rôle» dans la résolution du conflit du Sahara Occidental, et a critiqué l'Espagne qui continue de faire fi de sa responsabilité historique vis-à-vis du peuple sahraoui. Dans un entretien accordé au journal La Croix, M. Oubi a regretté la position de l'Espagne qui «se dit officiellement neutre et, ce faisant, se comporte comme des pays dénués de toute relation avec le Sahara Occidental. Or, l'ancienne puissance coloniale a une dette historique. Elle porte une lourde responsabilité morale et juridique dans l'échec de la décolonisation, non seulement vis-à-vis des Sahraouis mais aussi de toute la région». Quant à la France, le diplomate sahraoui a estimé qu'elle se situe résolument aux côtés du Maroc qui défend la prétendue «marocanité» du Sahara Occidental et «s'interdit de facto de jouer un rôle dans la résolution du conflit». Au moment où, au sein de l'Union européenne (UE), l'Allemagne, les Pays Bas, les pays nordiques rappellent le droit international pour résoudre cette question irrésolue de décolonisation, la position de la France «s'est même durcie ces dernières années», a constaté Oubi. La raison pour laquelle, dit-il, le Front Polisario, n'a plus aucun contact avec Paris depuis 2017. Du côté de l'ONU, «personne ne veut obliger le Maroc à payer la facture de la paix», a-t-il affirmé. «Nous avons eu dans le passé des émissaires de très grande qualité, les Américains James Baker et Christopher Ross ou l'Allemand Horst Köhler. Tous les trois ont démissionné». Le problème, selon lui, «ne réside pas dans ce poste d'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU, mais se situe au sein du Conseil de sécurité. Ce dernier se contente de gérer le conflit sans vouloir le résoudre». Or, ce statu quo, c'est-à-dire le blocage de la situation et la consolidation de la colonisation, «a contribué à tarir l'information et à faire oublier ce conflit qui empoisonne pourtant la région du Maghreb depuis des décennies», a-t-il relevé. La reprise de la guerre au Sahara Occidental, il y a près d'un an, le 13 novembre 2020, «va contribuer à nous rendre plus visibles. Nous comptons également sur le nouvel envoyé spécial de l'ONU, Staffan de Mistura, qui va, enfin, remplacer l'ancien président allemand Horst Kohler qui avait démissionné il y a deux ans et demi», a-t-il poursuivi. Une question de souveraineté Pour le Front Polisario, il n'est pas question de faire davantage de concessions. «Il ne peut y avoir une formule avec un gagnant et un perdant. Il faut régler cette question de souveraineté», a-t-il enchaîné, les Sahraouis en ont assez fait dans le passé. En 1991, le Font Polisario avait accepté que le référendum d'autodétermination du peuple sahraoui se fasse sur la base du recensement espagnol de 1974. En 2003, il avait accepté le dernier plan Baker qui avait été validé par le Conseil de sécurité. Ce plan prévoyait quatre à cinq ans de large autonomie avant la tenue du référendum d'autodétermination auquel devaient participer les colons marocains. «Le Maroc a refusé. L'ONU a été complaisante à son égard et a ainsi alimenté son arrogance», a noté le diplomate dans le même entretien. Il a rappelé également qu'en 2007, le Front Polisario, unique représentant légitime du peuple sahraoui, avait proposé un package de garanties pour le Maroc qui prévoyait notamment, après l'indépendance du Sahara Occidental, une régularisation des colons, une exploitation conjointe des ressources naturelles et la sécurité des frontières. Or, d'après le représentant du Front Polisario en Europe et auprès de l'Union européenne (UE), Oubi Bouchraya Bachir, le Maroc refuse toute concession. Il n'envisage qu'«une autonomie» au sein du royaume, ce qui est en contradiction avec le droit international et le droit de la décolonisation. APS