« L'Afrique et nous » est un vrai sujet pour les Algériens. Pour des raisons d'espace et d'actualité, restons dans l'Afrique du foot, avec l'ouverture hier de la Coupe d'Afrique des Nations. Le foot n'exprime pas tout dans le rapport d'un peuple avec son appartenance continentale mais il peut en livrer quelques indices intéressants. C'est déjà symptomatique que de poser cette question : y a-t-il une africanité algérienne ? La réponse est plus préoccupante que ce que voudraient les données géographiques, historiques et culturelles. N'ayons pas peur de la réalité : l'Algérie africaine, comme un certain nombre de... revendications, de rêves et d'ambitions est le fait des élites les plus éclairées du pays. Il faut vraiment le chercher pour le trouver, le sentiment d'appartenance à l'Afrique dans ses manifestations populaires. Depuis que la profondeur naturelle et les merveilleuses promesses de destin commun ont été abandonnées au profit d'une appartenance artificielle et idéologisée à outrance, on a eu les résultats qu'on pouvait avoir en l'occurrence. Si les Algériens ne revendiquent pas vraiment cette proximité qui ne les concerne pas outre mesure dans leur existence, cette dernière a quand même servi à les éloigner de la matrice qu'ils ne devaient logiquement jamais cesser de « coller ». On pourrait dire qu'ils devaient l'avoir chevillée au corps mais comme nous en sommes encore très loin dans la vraie vie, il faudra être plus mesuré dans le choix des mots. Voilà qui nous a un peu éloignés du foot mais nous revoilà, justement, pour rester dans le réel. Et le foot, via les médias qui ont pignon sur rue, les télés et radios publiques comprises, nous donne des frissons en l'occurrence. L'Afrique du foot dans ces bouches, c'est « adghal ifriqia » (la jungle africaine)... au Cameroun, au Sénégal, au Congo, au Nigeria. Tous les stades du continent, quoi ! L'Afrique du foot, c'est aussi la « sorcellerie », les « coulisses », le péril physique sur l'adversaire, c'est-à-dire... l'ennemi que nous serions, les arbitres systématiquement corrompus, les responsables ripoux et la victoire du... blanc impossible ! Et puis une nouvelle géographie de la compétition sportive ! En Coupe du monde ou Coupe d'Afrique, il s'agit, quand l'Algérie n'est pas ou n'est plus en lice, de supporter les sélections « arabes ». Allez savoir pourquoi le passionné de foot sétifien ou témouchentois se sentirait plus proche du Qatar que du Mali ! À l'occasion de la CAN, on est carrément dans le pire. Maintenant, on ne prend plus de gants : il y a l'Afrique noire et les... pays du Maghreb et on l'entend dans des bouches qu'on n'attendait pas, comme celle de l'ancien (excellent) joueur Amar Ammour, devenu consultant. Apprécions : les sélections « africaines » éprouvent un certain complexe quand elles affrontent les pays d'... Afrique du Nord !!!! La nausée, Mama Africa. S. L.