Par Sa�d Doumane, ancien d�tenu politique Tel le ph�nix renaissant de ses cendres, le d�ni identitaire dans notre pays refait r�guli�rement surface. La berb�rophobie ancr�e dans les mentalit�s et certaines institutions officielles n�a pas pris fin en 2002 avec la reconnaissance constitutionnelle du fait amazigh. Le d�cor constitutionnel est loin d�avoir arr�t� le processus d�extinction programm� de l�identit� berb�re. Etait-ce son objectif ? Ainsi en 2011, trois d�cennies apr�s le �Printemps berb�re� de 1980, donner un pr�nom berb�re � un nouveau-n� � Tizi-Ouzou rel�ve encore du parcours du combattant. Voil� plus de quatre mois que b�b� Maksen, comme l�appellent affectueusement ses cousins, est venu au monde sans avoir encore d�existence officielle : non inscrit sur le registre d��tat civil de la mairie de Tizi-Ouzou. Ainsi en ont d�cid� les responsables de cette institution dirig�e par une �assembl�e populaire�, d�cision ent�rin�e par un magistrat de la m�me cit�, au motif que le pr�nom Maksen ne figure pas sur la liste du minist�re de l�Int�rieur. M�me en pr�sentant les preuves historiques et scientifiques de ce pr�nom (dictionnaires des pr�noms �labor�s par des universitaires dont celui de K. Na�t Zerrad, professeur de linguistique berb�re � l�Inalco, Paris), lesdites autorit�s s�en sont tenues � leur liste �sacr�e�. Nous sommes ainsi contraints de tenter de justifier de notre existence mill�naire pour �tre admis dans l�Alg�rie d�aujourd�hui ! Retour du refoul�, persistance des �vieilles lunes� antiberb�res, inculture de certaines autorit�s, d�cision discriminatoire ou raciste d�lib�r�e, l�acte est d�une extr�me gravit� parce que commis au nom de l�Etat alg�rien. Qu�un officier d��tat civil ou un pr�sident d�APC aux ordres ou ignorant l�histoire et la culture de leur pays se conduisent de la sorte, passe encore car monnaie courante dans notre pays, mais qu�un magistrat cens� prot�ger les citoyens des inepties et des abus de l�administration leur embo�te le pas, �a devient intol�rable et �a pousse � la r�volte. Quand on sait que des pr�noms saoudiens, �gyptiens, afghans� sont entr�s all�grement dans la nomenclature des pr�noms de notre administration tandis que les pr�noms authentiquement alg�riens sont soumis au bon vouloir de certaines autorit�s ! Cela s�apparente � du racisme officiel. Je m�insurge contre cette injustice et j�introduirai une plainte aupr�s des instances nationales et internationales de d�fense des droits humains et culturels. Faut-il rappeler � ces messieurs pr�pos�s � l�identit� nationale que les ann�es de plomb o� l�identit� amazighe �tait consid�r�e comme une tare nationale sont derri�re nous. Des hommes et des femmes fiers de leur alg�rianit�, qui ne se cherchent pas des origines dans les tribus d�Arabie, se sont dress�s contre le g�nocide programm� de leur histoire mill�naire. La m�re du nourrisson brim� d�s sa naissance s�appelle Kahina ; elle est fi�re de porter le nom d�une femme qui a d�fendu sa terre et l�honneur des siens. Ses s�urs s�appellent Tin-Hinan et Dassine, pr�noms puis�s dans le stock vernaculaire touareg, donc amazigh et alg�rien. Il y a plus de 20 ans, j�ai livr� bataille pour inscrire ces filles � l��tat civil de Tizi-Ouzou, aujourd�hui encore je dois mener un nouveau combat pour inscrire mon petit-fils. Quelle trag�die pour l�Alg�rie et ses enfants ! Au 21e si�cle, il y a encore en Alg�rie des �responsables�, incultes, soumis � leurs parrains id�ologiques ou abusant de l�autorit� que leur conf�rent leurs postes pour tenter de bloquer la r�habilitation de notre patrimoine onomastique, arch�ologique et linguistique. Ces pr�dispositions mentales et politiques rel�vent d�un pourrissement culturel et politique induit par une d�culturation profonde, touchant des pans entiers de nos instituions. Les psychologues appellent cela la haine de soi. Haine de soi �rig�e en principe de gestion �tatique puisque le d�ni identitaire est pouss� jusqu'� l�importation des pr�noms et des anc�tres. Sinon comment appeler cette disposition mentale qui incite � renier ses origines, ses patronymes, sa langue� pour adopter une patrie de rechange ? Ne vous en d�plaise, messieurs les pr�pos�s � l�identit� nationale frelat�e et d�importation, le petit Maksen est alg�rien et berb�re, il est de la tribu des lions ( les A�t Yiraten). De son berceau, il clame son alg�rianit� et son amazighit�, � l�instar de son grand-p�re qui, depuis les ann�es 1970, a subi la prison, la torture, les brimades polici�res et administratives, � l�instar aussi de sa m�re qui, � l��ge de six ans, s�est vu refoul�e de l�a�roport parce que son p�re �tait fich�. Quand Maksen grandira, on lui racontera que son pr�nom a port� atteinte � la �s�ret� identitaire� de l�Etat comme son grand-p�re en 1985 pour avoir assum� publiquement sa berb�rit�.