Par le Dr Ahmed Benbitour La Nation est en danger et le pays est � la d�rive, sous l�effet de l�accumulation d�un certain nombre de maux qui s�autoalimentent mutuellement, rendant in�vitables l�explosion sociale et l�installation de la violence comme seul moyen de r�glement des conflits entre individus, entre groupes d�individus et entre groupes d�individus et le pouvoir. Apr�s �tude des exp�riences de l�Alg�rie, des pays d�Am�rique latine, de l�Europe du Sud (Espagne, Portugal, Gr�ce), de l�Europe de l�Est et de l�Asie, nous pouvons retenir trois hypoth�ses de travail, fiables : (I) Le r�gime alg�rien travaille � sa propre destruction ; mais avec la rente, le chemin de la d�rive est lent. Du fait de la lenteur de ce processus, lorsque le syst�me se d�truit, il d�truit avec lui toute la soci�t� par un m�lange d�tonnant de pauvret�, de ch�mage chez les jeunes, de corruption et de perte de la morale collective. La perte de la morale collective, c�est une Alg�rie qui perd ses valeurs humanistes les plus pr�cieuses, conna�t un incivisme g�n�ralis�, int�riorise la violence, la pr�dation et la corruption comme un mode de fonctionnement normal. La g�n�ralisation de la corruption � tous les secteurs d�activit�, c�est un cheminement pr�visible qui m�ne au gaspillage des ressources nationales, plus particuli�rement, la fuite du capital humain vers l��tranger et l�exploitation irrationnelle des hydrocarbures. Ce cheminement a commenc� avec la petite corruption au niveau des bureaucrates et des petits fonctionnaires. Ensuite, c�est la grande corruption qui se manifeste par des scandales financiers lors des passations de contrats de r�alisation de projets d�infrastructures, de l�achat des �quipements collectifs et de pr�ts bancaires. C�est alors l�entr�e en jeu de hauts responsables et des �nouveaux riches�. Ils voudront monnayer leur richesse mal acquise par le maintien du pouvoir entre leurs mains. L�acc�s au pouvoir, dans un tel syst�me, est le moyen le plus efficace pour l�enrichissement aujourd�hui et demain. C�est alors l�accaparement de l�Etat. La pauvret�, c�est le manque d�opportunit� pour utiliser sa force de travail et son savoir-faire pour s�assurer d�un revenu d�cent. C�est aussi le manque de capacit� d�acc�s � l��cole et � la sant�. De m�me le manque de s�curit� face � la violence, aux chocs �conomiques, aux d�sastres et aux calamit�s naturelles. C�est enfin, le manque de voix, le manque de pouvoir pour influencer les d�bats et les d�cisions ainsi que le contr�le et l�allocation des ressources. (II) Le changement pacifique recherch� ne peut venir de l�int�rieur du syst�me, ni des institutions officielles enti�rement soumises au contr�le du pouvoir en place (Parlement, partis politiques de l�Alliance ou de l�opposition), ni de la soci�t� civile telle qu�elle a �t� organis�e par le pouvoir (associations satellites transform�es en relais durant les p�riodes �lectorales). Il ne viendra pas davantage via l�agenda gouvernemental actuel (�lections, r�f�rendum, assembl�e ad hoc�). Le changement ne vient de l�int�rieur que dans des situations tout � fait exceptionnelles, o� sont r�unis trois facteurs : (i) une pression forte et croissante de la soci�t� et qui dure (ii) une alliance strat�gique des forces du changement (iii) un �v�nement d�clencheur. (III) La d�cennie 2010-2020 enregistrera la d�rive de l�Etat alg�rien de sa situation actuelle de d�faillance vers une nouvelle situation de d�liquescence. Un Etat d�liquescent est un Etat chaotique, ingouvernable. Face � une telle conviction, le choix est clair : - ne rien faire et subir le changement avec tous les risques de d�rapage, ou bien - pr�parer ce changement dans le calme et la s�r�nit� pour placer le pays dans la voie du progr�s et de la prosp�rit�. Nous avons choisi la solution de la mobilisation pacifique pour le changement. Pour r�ussir le changement, il faut r�unir trois facteurs : - Une pression des citoyens forte, croissante et durable sur le pouvoir en place pour r�clamer le changement du syst�me de gouvernance et pas seulement le changement des dirigeants, - Une alliance strat�gique entre les forces du changement pour construire une capacit� viable de propositions, de n�gociations et de mise en �uvre du changement, - Un �v�nement d�clencheur. Les exp�riences tunisienne et �gyptienne de ce d�but de l�ann�e 2011 permettent de tirer un certain nombre de conclusions qui pourront dessiner les hypoth�ses fiables pour r�unir ces facteurs. Il s�agit de quatre le�ons qui d�finissent quatre hypoth�ses de travail. 1. Des citoyens r�unis avec pers�v�rance en un endroit strat�gique de la ville, sans leaders, sans programme politique pr��tabli et face � des forces de r�pression importantes, sont capables de faire partir les symboles du r�gime et en premier lieu le chef de l�Etat. D�o� la premi�re hypoth�se : quelle que soit l�ampleur des moyens mobilis�s pour imposer l�autocratie, les citoyens sont capables d�amorcer le changement et faire partir les symboles du r�gime. 2. Les dirigeants actuels ne peuvent plus b�n�ficier du paradis de l�exil. Il y avait l�hypoth�se que les dirigeants peuvent quitter le pays en cas de tensions intenables et aller profiter des avoirs qu�ils ont frauduleusement plac�s � l��tranger. Ceci n�est plus possible, ni pour eux, ni pour leur famille, ni pour leurs collaborateurs proches. De m�me qu�ils ne peuvent plus b�n�ficier des soutiens bienveillants des puissances internationales, qui ont fini par comprendre que leurs int�r�ts se situaient du c�t� du peuple et non du c�t� des autocrates. La peur s�est d�plac�e de chez les citoyens vers les autocrates. D�o� la deuxi�me hypoth�se : Les autocrates se trouvent aujourd�hui face � une pression multiple, de la soci�t�, de leurs familles, de leurs collaborateurs proches et des puissances internationales. 3. Les exp�riences tunisienne et �gyptienne ont d�montr� que quelle que soit l�ampleur des gratifications des autocrates en direction des forces arm�es et des forces de l�ordre, celles-ci s�alignent en derni�re instance sur leur peuple et non du c�t� des autocrates. D�o� la troisi�me hypoth�se : les forces arm�es et les forces de l�ordre se rallieront aux forces du changement immanquablement. 4. Les instruments des nouvelles technologies de l�informatique et des communications NTIC (Facebook, internet �) ont jou� un r�le de premier plan dans la mobilisation des citoyens pour le changement et sont accessibles � notre jeunesse en tout temps et en tous lieux. D�o� la quatri�me hypoth�se : les instruments virtuels NTIC sont accessibles � une grande majorit� de notre jeunesse et sont un moyen tr�s efficace de mobilisation pacifique pour le changement. Avec ces quatre hypoth�ses solides parce que construites � partir d�exp�riences v�cues, � savoir la capacit� des citoyens � changer le r�gime, les pressions multiformes exerc�es sur les tenants du pouvoir, la neutralit� positive sinon encourageante des forces arm�es et des forces de l�ordre et l�acc�s facile aux instruments nouveaux de mobilisation, nous savons la voie � suivre pour r�unir le premier facteur du changement : la pression de la soci�t�. Mais il faut bien noter que ces quatre hypoth�ses nous offrent les moyens d�amorcer le changement, mais pas ceux de le r�aliser. Autrement dit, nous savons ce qu�il faut faire pour le d�part des symboles du r�gime, notamment le chef de l�Etat, mais nous n�avons pas encore le mode de gestion du changement. Nous avons la condition n�cessaire pour amorcer le changement, mais elle n�est pas suffisante pour le concr�tiser. En r�alit�, une telle fin de r�gne est tr�s co�teuse pour les autocrates et al�atoire pour le changement. Elle est tr�s co�teuse pour les autocrates : Kadhafi a perdu ses fils dans la bataille, Abdallah Ali Nacer a subi des dommages corporels importants, Moubarak a �t� humili� par une apparition dans une cage, en face des juges. Tous les autocrates ont vu leurs avoirs, ceux des membres de leurs familles et ceux de leurs proches collaborateurs, saisis � l��tranger. Donc pour leurs propres int�r�ts et leur propre sauvegarde, ils n�ont aucun avantage � laisser faire et voir la situation s�curitaire leur �chapper. Elle est al�atoire pour la r�alisation du changement. D�s le d�but, les autorit�s en place, apr�s le d�part du chef de l�Etat, se trouvent devant un enjeu contradictoire : - Aller rapidement vers des �lections pour installer un gouvernement l�gitime capable de mettre en �uvre une strat�gie du changement ; mais, - Elles ont besoin de temps pour r�aliser un accord avec des forces disparates sur les principes de base qui doivent d�finir le nouveau syst�me politique. D�o� le report des dates pr�vues pour les �lections. C��tait le cas aussi bien en Tunisie qu�en �gypte. Plus le temps passe, plus le nouveau gouvernement perd de sa l�gitimit�, plus le danger de s�installer � nouveau dans l�autocratie commence � se r�pandre � travers la soci�t�. C�est alors, le retour � la rue avec des situations de plus en plus chaotiques ! En r�alit�, le d�sir des autorit�s des pays non encore engag�s dans le changement de voir l��chec de la mise en place du changement en Tunisie et en �gypte. Mais il faut bien noter que ces difficult�s ne sont pas inh�rentes au processus du changement impos� par la soci�t�. C�est la faute des autocrates qui n�ont pas su am�nager une voie de sortie, s�curis�e pour eux-m�mes et favorable � la r�ussite du changement dans l�int�r�t du pays. D�o� l�importance de la construction du deuxi�me facteur, � savoir la cr�ation des conditions d�alliance entre les forces du changement pour d�finir une capacit� de propositions, de n�gociations et de mise en �uvre. La construction d�alliance s�impose comme une solution viable, parce que : - Apr�s vingt ann�es de divisions id�ologiques qui nous ont dress�s politiquement, physiquement, moralement et intellectuellement les uns contre les autres, les blessures sont encore profondes et douloureuses au sein de notre soci�t�, - L�incapacit� de courants politiques continuellement divis�s � proposer une alternative cr�dible risque de provoquer la lassitude et la d�motivation d�une population fatigu�e et d�sabus�e. - Les tentatives r�p�t�es de fractionnement, divisions et manipulations de la part de certaines franges du pouvoir, rendent impossible un travail d�union des forces du changement dans le court terme. Il faut, par cons�quent, bien noter que, l�appel � l�alliance ne signifie ni fusion, ni union, mais la mise en commun des moyens de mobilisation pacifique pour le changement. C�est un appel � une coop�ration �gagnant-gagnant�. Les associations et partis participant aux coordinations et alliances conservent leur autonomie. A l�issue de la p�riode de transition, chaque partie sera libre de se lancer seul ou dans des alliances dans les futures comp�titions �lectorales. Quant au troisi�me facteur, � savoir l��v�nement d�clencheur, il est difficile d�en pr�voir l�av�nement avec pr�cision. Les conditions de son apparition sont vari�es. En Indon�sie, l��v�nement d�clencheur est intervenu � la suite d�une gr�ve massive des �tudiants, � la suite de l�augmentation des prix des produits d�riv�s des hydrocarbures � la pompe et donc du co�t du transport ! Les gr�ves ont commenc� dans les universit�s � l�int�rieur du pays ; puis les �tudiants en gr�ve ont converg� vers la capitale. Leur rassemblement par milliers � Jakarta pendant plusieurs jours a fait intervenir le commandement militaire qui a demand� au g�n�ral Suharto de quitter ses fonctions, apr�s 32 ans d�exercice de pouvoir autocrate. En Espagne, c��tait la mort du dictateur Franco. En Tunisie, c��tait l�immolation par le feu du jeune Bouazizi. En �gypte, c��tait l�exemple tunisien qui a servi de d�clencheur � la forte mobilisation. En Alg�rie, cela aurait pu �tre les �meutes du 5 Janvier 2011 ; mais les deux autres facteurs, surtout celui de l�alliance strat�gique entre les forces du changement, n��taient pas r�unis. Face � ces facteurs du changement, le pouvoir s�appuie sur trois ingr�dients : - La d�mocratie de fa�ade et la politique du faire semblant pour plaire aux puissances �trang�res et tromper l�opinion internationale, - Le pari sur la division des forces du changement et la faible mobilisation politique de la population, - L�utilisation de la rente et de la pr�dation pour acheter la population par des concessions et des mesures d�magogiques, en puisant dans les r�serves d�hydrocarbures non renouvelables au d�triment des g�n�rations futures. Mais il faut bien noter que l�autisme du pouvoir d�un c�t� et le m�contentement grandissant de la soci�t� de l�autre, nourrissent la double violence de la rue et des autorit�s, qui font que la situation peut devenir insoutenable � tout moment. D�o� l�urgence et la n�cessit� de construire les alliances strat�giques entre les diff�rentes forces du changement, afin de pr�venir la d�rive et le chaos. C�est l�objectif primordial de notre travail � la mobilisation pacifique pour le changement. Pour les autorit�s en place, le choix est clair : - Laisser faire et vendre des r�formes cosm�tiques et alors, ils subiront ce qu�ont subi les dirigeants de Tunisie, d��gypte, de Libye, de Syrie et du Y�men, en mettant le pays dans le chaos. - Etre partie prenante de la pr�paration du changement en n�gociant avec les forces du changement une feuille de route et un agenda pour la mise en �uvre du changement du syst�me de gouvernance. C�est la concr�tisation d�une p�riode de transition. A. B.Lettre-programme � tous ceux qui ont � c�ur de sauver l�Alg�rie La Nation est en danger. Le pays est � la d�rive, sous l�effet de l�accumulation d�un certain nombre de maux qui s�autoalimentent mutuellement, rendant in�vitables l�explosion sociale et l�installation de la violence comme seul moyen de r�glement des conflits entre individus, entre groupes d�individus et entre groupes d�individus et le pouvoir. Attention ce que j�exprime n�est pas mon espoir, mais des pr�visions avec beaucoup de fiabilit�. Que confirment, d�ailleurs, les �v�nements intervenus dans la r�gion durant cette ann�e 2011. Sans �tre exhaustif, les principaux maux dont souffre l�Alg�rie sont : 1- La perte de la morale collective. Le changement signifie le lancement d�un programme ambitieux d��ducation citoyenne pour passer � une soci�t� qui repose sur des lois et des r�gles saines, o� les individus se font confiance lorsqu�ils interagissent, o� la bonne �ducation et le travail sont des atouts de la r�ussite sociale et individuelle, o� la justice pr�vaut et o� la malhonn�tet�, le vice et la brutalit� sont proscrits comme mode de progression dans la sph�re publique et d�nonc�es et combattues dans la sph�re priv�e. 2-La g�n�ralisation de la corruption � tous les secteurs d�activit�. Le changement signifie l�installation d�un nouveau syst�me de transparence dans la gestion des affaires publiques. Le syst�me sera mis en place graduellement avec le souci maximum de p�dagogie pour permettre � tous de s�y adapter progressivement et � s�y conformer au-del� d�une p�riode de gr�ce suffisante. Ce n�est qu�apr�s la p�riode de gr�ce, clairement affich�e, que des institutions performantes et non des individus, quel que soit leur niveau dans la hi�rarchie de la nouvelle gouvernance, mettront un terme aux d�faillances de ceux qui refusent de se conformer aux nouvelles r�gles de transparence dans la gestion des affaires. La garantie du traitement �quitable sera assur�e pour tous, dans le seul respect de la loi. 3- La pauvret�. Le changement signifie la mise en place d�une v�ritable politique sociale moderne � m�me de mobiliser tous les citoyens autour d�une approche ax�e sur la lutte contre la pauvret�, la pr�servation de l�environnement et la justice sociale. Cette politique sociale n�est pas la charit�. Elle consiste en une strat�gie globale contre la marginalisation en encourageant la participation des pauvres � l�essor �conomique. Elle passe par un investissement massif dans la sant�, l��ducation, les autres services sociaux, afin de lib�rer le gisement de cr�ativit� et de participation �conomique de nos concitoyens compl�tement marginalis�s aujourd�hui. 4-La p�nurie pr�visible des ressources naturelles non renouvelables que sont les hydrocarbures. Le changement c�est une �conomie comp�titive qui assure la protection des individus et un d�veloppement individuel et collectif harmonieux. Le programme de mise en �uvre de cette �conomie s�appuiera sur une politique rigoureuse et efficace de transformation du capital naturel non renouvelable (les hydrocarbures) en un capital humain g�n�rateur de flux de revenus stables et durables. Cette politique comprend notamment la r�allocation d�une partie significative des investissements excessifs actuels dans les infrastructures vers des investissements cibl�s dans le secteur productif de biens et de services, mais surtout des investissements de plusieurs milliards de dollars dans les ressources humaines (�ducation, savoir, comp�tences�), afin de promouvoir une g�n�ration d�entrepreneurs poss�dant la capacit� de leadership, la moralit�, l�intelligence et le jugement, et de former des cadres gestionnaires � tous les niveaux dans les entreprises et l�administration. La rel�ve des cadres dirigeants partant � la retraite doit �tre assur�e en urgence par le biais d�ambitieux programmes de formation et de promotion de la rel�ve, pour compenser la tr�ve remarqu�e pendant deux d�cennies dans la formation des cadres. Cette politique a �t� suivie avec succ�s dans les pays �mergents qui ont connu cette phase de d�veloppement, la Chine notamment. C�est aussi, la constitutionnalisation de l�utilisation des r�serves d�hydrocarbures. Je le r�p�te aujourd�hui. Il faut bien consid�rer que chaque baril ponctionn� sur les r�serves non renouvelables est, au d�part, une perte pour la Nation. Une fois qu�il sort du sous-sol, il ne fait plus partie du patrimoine des g�n�rations futures. 5- La d�rive d�un Etat d�faillant vers un Etat d�liquescent. Le changement, c�est la mise en place d�un syst�me de gouvernance dans lequel les citoyens puissent s�exprimer et sanctionner, c'est-�-dire o� les citoyens ont les moyens d�exiger des comptes de la part de leurs gouvernants et d�en recevoir effectivement. L�ann�e 2011 verra, je l�esp�re, tous les citoyens alg�riens prendre conscience que notre salut en tant qu�Etat et nation ne peut venir que d�un syst�me d�mocratique et d�une forte participation citoyenne aux prises de d�cision, � tous les niveaux. 6- L�isolement diplomatique dans un monde de plus en plus globalis�, d�une Alg�rie d�pass�e et marginalis�e, en queue des classements internationaux dans tous les domaines. Le changement, c�est une nation s�re de ses atouts et capable de d�fendre ses int�r�ts bien exprim�s, bien compris et bien int�rioris�s dans la course mondiale actuelle. Aujourd�hui, la puissance d�une nation se mesure par sa capacit� d�innovation et la qualit� de son syst�me �ducatif et de son syst�me de formation de managers. A ce titre, l�on peut consid�rer que les exp�riences men�es ces vingt derni�res ann�es par des nations comme la Chine, l�Inde ou le Br�sil, v�ritables pays continents, dessinent des perspectives de d�veloppement dans d�autres parties du monde, � travers des groupements sous-r�gionaux tels que le Maghreb. Celui-ci, en raison de son appartenance � une culture et � une civilisation communes � l�ensemble des populations qui le composent, peut s�ouvrir globalement sur le monde en cultivant une relation homog�ne avec les autres pays, au sein d�une organisation ad�quate que nous nous appliquons � mettre sur pied. Par ailleurs, notre orientation maghr�bine- sah�lienne nous offre des opportunit�s et nous impose des obligations. 7- Le risque de dislocation de la Nation et le partage du territoire. Des forces significatives appellent de plus en plus ouvertement � l�autonomie de certaines r�gions, voire le partage du territoire. Il faut s�en inqui�ter s�rieusement. La situation de non gouvernance actuelle conforte la forte probabilit� de vivre en m�me temps la violence sociale et la violence terroriste. C�est alors la trappe de mis�re permanente et la porte ouverte � la dislocation de l�unit� nationale et le danger sur l�unit� du territoire. Dans le cas de l�Alg�rie, et dans l��tat actuel des choses, cela interviendra avec la baisse sensible des capacit�s d�exportations d�hydrocarbures que je situe entre 2018 et 2020. Mais avec le m�lange d�tonnant de pauvret�, de ch�mage chez les jeunes, de corruption g�n�ralis�e et de perte de la morale collective, elle peut intervenir � n�importe quel moment. Le changement, c�est la mise en place d�une p�riode de transition pour la sauvegarde de la Nation et la pr�servation des int�r�ts des g�n�rations futures. Ce sont l�, les sept programmes d�urgence sur lesquels doit se construire le changement. De m�me que les trois dossiers fondamentaux : la refondation de l��cole, la refondation de l�Etat, la refondation de l��conomie. Si le changement de tout le syst�me de gouvernance est sollicit� par la grande majorit� des forces vives, comment le r�aliser ? Avec l�exp�rience tunisienne et �gyptienne, nous avons le mode op�ratoire du d�part des symboles du pouvoir, notamment le chef d�Etat. Il s�agit de quatre le�ons qui d�finissent quatre hypoth�ses de travail solides parce que construites � partir d�exp�riences v�cues, � savoir la capacit� des citoyens � changer le r�gime, les pressions multiformes exerc�es sur les tenants du pouvoir, la neutralit� positive sinon encourageante des forces arm�es et des forces de l�ordre et l�acc�s facile aux instruments nouveaux de mobilisation, nous savons la voie � suivre pour assurer le d�part des symboles du pouvoir. Nous avons le mode op�ratoire pour faire partir les premiers responsables du r�gime actuel. C�est certes, une condition n�cessaire, mais elle est loin d��tre suffisante pour r�aliser le changement. Alors, une fois le d�part des chefs r�ussi, comment faire pour r�aliser le changement ? En r�alit�, le changement se fera en deux �tapes : celle du d�part des symboles du pouvoir en place qui se r�alise dans la mobilisation des masses et particuli�rement la jeunesse, celle de la r�alisation du changement qui n�cessite la mobilisation des comp�tences nationales en symbiose avec les forces de la premi�re phase. Dans cette deuxi�me �tape, la r�ussite du changement passe par la mise en place d�une p�riode de transition et de sauvegarde selon le programme suivant. 1- Organiser une Conf�rence Nationale pour le Changement compos�e des �l�ments du pouvoir capables de saisir l�opportunit� de leur propre sauvegarde et celle du pays d�un c�t� et des personnalit�s ayant une pr�sence de caution au sein de la soci�t� et disposant d�une respectabilit� de l�autre pour le choix d�un Haut Conseil de l�Endiguement de la Crise (HCEC), compos� de 5 � 6 personnes, avec pour mission en trois mois : - Elaborer une feuille de route pour l�endiguement de la crise et la pr�paration du changement du syst�me de gouvernance. - Lancer un grand programme de communication pour expliquer la mission du HCEC avec l�ouverture d�un d�bat � toutes les composantes de la soci�t�. Ce programme de communication n�aura de cr�dibilit� que s�il est pr�c�d� de la lev�e effective et non cosm�tique de l��tat d�urgence, l�autorisation de cr�ation de partis politiques nouveaux pour l�implication de la jeunesse dans le travail politique et l�ouverture du champ m�diatique avec la possibilit� de cr�ation de nouvelles cha�nes de t�l�vision et de radios en dehors du contr�le du pouvoir. - S�lectionner et pr�parer � la nomination les membres d�un Gouvernement pour l�Endiguement de la Crise (GEC) qui aura pour mission, la mise en �uvre des feuilles de route �tablies par le HCEC et la pr�paration du changement sur une p�riode de 12 mois. A la fin de la p�riode de trois mois, interviendra la nomination du gouvernement GEC avec des missions rigoureusement consign�es dans des feuilles de route pour chaque secteur et bien entendu, les sept programmes ainsi que les trois grands dossiers d�j� pr�sent�s plus haut. Il aura � pr�parer pour la fin de la p�riode de sa mission, un r�f�rendum sur la Constitution, des �lections pr�sidentielles anticip�es et des �lections l�gislatives. Les membres du HCEC auront pour mission durant ces douze mois, la mise en place d�un syst�me de contr�le de la r�alisation des missions confi�es au gouvernement GEC. De m�me la continuation des d�bats et des consultations avec toutes les cat�gories de la population pour la r�daction d�un projet de r�vision de la Constitution qui sera soumis � r�f�rendum � la fin de la p�riode des douze mois. Aux tenants du pouvoir, il faut dire : - Le train du changement est en marche ; le freiner ou le retarder ne fera qu�aggraver la situation et en premier lieu votre propre salut. - Le choix est �vident : anticiper la catastrophe ou la subir. - La rente est un moyen de se maintenir au pouvoir qui deviendra bient�t l�acc�l�rateur de sa destruction. - Vous devez reconsid�rer tout le probl�me du changement � la lumi�re des derniers �v�nements dans la r�gion et ainsi pr�parer une sortie honorable. - Depuis le d�but 2011, bien des choses ont chang� et le monde est de plus en plus en �veil ; la peur est pass�e du c�t� des citoyens vers celui des autocrates. - Les r�formes qui n�ont pas �t� r�alis�es en douze ans d�exercice du pouvoir le seront-elles en quelques mois ? - Mais quel est l�homme d�Etat au pouvoir qui est capable de faire entendre raison aux autocrates et leur faire comprendre et accepter la n�cessit� du changement ? Aux forces du changement, il faut dire : - Bien que convaincus de l�in�luctabilit� du changement, les tenants du pouvoir ne veulent pas, n�osent pas ou n�ont pas la force morale pour affronter les int�r�ts puissants qui s�accommodent du statu quo, derri�re les rideaux. - Entre un pouvoir autiste et ferm� � toutes les revendications et des forces vives de la Nation d�cid�es � d�fendre leurs droits � la libert�, le choc est in�vitable. - Le pouvoir s�imagine que par la dilapidation des ressources financi�res, la corruption et une r�pression mieux organis�e, il peut s�assurer des all�geances et acheter la paix sociale. - Il est fort probable que si les autocrates ne se ressaisissent pas � temps pour prendre les devants et rechercher avec les forces du changement, des compromis honn�tes et s�rieux que n�cessitent les circonstances et que commandent les int�r�ts partag�s, la jeunesse maltrait�e, humili�e, menac�e de perdre son �me, embrase tout le pays, � l�image des incidents du d�but de cette ann�e 2011. - Les autocrates semblent vouloir vendre l�id�e que l�Alg�rie est diff�rente des autres pays de la r�gion et que ces revendications r�p�t�es ne sont que des remous passagers. Alors en gagnant du temps, ils pourront conserver toutes leurs positions. C�est le sens qu�il faut donner au dernier discours du pr�sident de la R�publique. - Hier la lutte pour l�ind�pendance s�est appuy�e sur le nationalisme au niveau local et sur la d�colonisation au niveau international. Aujourd�hui, la lutte pour la lib�ration de l�individu s�appuie sur la citoyennet� au niveau local et sur les droits universels � la libert� et � l��mancipation au niveau international. Les temps, les espaces, les environnements sont diff�rents mais les processus sont les m�mes. Hier, c��tait la lutte arm�e pour chasser l�occupant sourd � toute id�e de n�gociation ; aujourd�hui, c�est le combat citoyen pour changer le syst�me autocrate, r�pressif, sourd � toute id�e de dialogue, par une mobilisation pacifique qui s�exprime dans les marches, les rassemblements, les manifestations et les gr�ves. J�appelle tous ceux qui ont � c�ur de sauver l�Alg�rie, quels que soient la position et le lieu o� ils se trouvent, quelle que soit l�institution � laquelle ils appartiennent, � se mobiliser, r�unir leurs forces pour la r�alisation des objectifs trac�s dans cette lettre programme dans les plus brefs d�lais. Nous sommes d�termin�s � aller dans cette direction, d�autant plus courageusement que le peuple ne croit plus en la sinc�rit� des syst�mes de pouvoirs actuels et r�affirme sa conviction que l�heure des r�formes de fa�ade est largement d�pass�e. Plus que jamais, le peuple exige le changement et veut �radiquer les stigmates des malheurs qu�il a endur�s. De fait, tout est d�j� en place pour assurer la fin de partie pour les gouvernants reni�s par leurs peuples. La suite des �v�nements pourra alors s�envisager dans un esprit nouveau, d�ouverture, de justice et de sagesse. Une transition sera instaur�e, comme diverses personnalit�s n�ont pas manqu� d�y faire r�f�rence. L�heure est certainement grave. Cependant le peuple alg�rien, comme il l�a d�j� d�montr�, saura y faire face. Il saura surmonter toutes les �preuves et vivre sa modernit� dans la s�r�nit� et la libert� ! �Et qui atteints par l�injustice, ripostent.� Coran 39-42.