�C�est la premi�re fois dans l�histoire des peuples qui luttent pour leur ind�pendance que le colonis� porte la guerre sur le sol du colonisateur.� D�claration du G�n�ral Giap, vainqueur de Di�n Bi�n Ph�, au sujet des �v�nements d�Octobre 1961 en France. �Ces Alg�riens, en bravant le couvre-feu d�cr�t� par le gouvernement, prennent le m�tro et le bus comme s�ils prenaient le maquis dans les Aur�s ou dans le Djurdjura.� Le quotidien fran�ais Le Figaro du 18 octobre 1961. Le premier constat que l�on fait � la fin de la lecture du livre (407 pages) de Ghafir Mohamed, dit Moh Clichy �dit� chez les �ditions Enceclopedia, sur le cinquantenaire du 17 Octobre 1961 Droit d��vocation et de souvenance, c�est que l�auteur sort des sentiers battus trac�s par la majorit� des responsables de la famille dite r�volutionnaire s�agissant des �crits sur l��pop�e de Novembre. L�auteur fait sienne la citation du philosophe grec Quintilien �On n��crit pas seulement pour raconter, mais aussi pour t�moigner� pour ne s�astreindre qu�au seul devoir de m�moire. Le militant Moh Clichy ne se donne pas le beau r�le. L�on peut donc ais�ment d�duire que le narrateur des faits d�armes et des drames v�cus par les militants de ce que les historiens ont appel� la 7e wilaya est rest� fid�le � la m�thodologie du FLN historique : Novembre �tant une �uvre collective, l�emploi du �je� est proscrit. Cette honn�tet� intellectuelle a valu � l�ancien responsable de la Super zone de la wilaya 1 (sud de Paris) la reconnaissance de l�ennemi d�hier. Ghafir a �t� en effet honor� par plusieurs mairies de France. Pour revenir au livre de l�ancien responsable de la Super zone de Clichy, d�o� son surnom, cet essai est un v�ritable torrent d�informations. Ce n�est pas un travail d�analyse mais de restitution de la r�alit� qui a jalonn� les ann�es de combat de l�immigration. De ce nouvel �clairage, le r�le important, pour ne pas dire essentiel, de l�immigration ressort distinctement dans la pr�paration et la gestion de la r�volution alg�rienne. Cette communaut� nationale � l��tranger a accompli avec succ�s la t�che d�ouvrir un second front en portant le combat militaire et, surtout, financier et politique dans l�antre de l�ennemi. Il est question du financement � hauteur de 80% du budget de l�ALN par l��migration. Ghafir d�montre sur une partie g�ographique de la F�d�ration de France l�ampleur de ce travail. Faits et documents � l�appui. C�est le g�nie des chefs du FLN qui avaient d�cid� de se battre contre l�ennemi, beaucoup plus sup�rieur � tous points de vue, dans le propre carr� de ce dernier. Moh Clichy, le fils des Ith Yala, a travaill� avec rigueur sous l��il avis� des professeurs Boualem A�doun et Jean Luc Einaudi qui ont pr�fac� cet essai. Le professeur Einaudi a, rappelons-le, produit beaucoup sur les tragiques �v�nements d�Octobre 1961. Arriver � impressionner ces deux intellectuels suppose que le travail est s�rieux et les t�moignages fort cr�dibles. D�embl�e, l�auteur situe le contexte dans lequel a �t� amorc� le d�clenchement, le jour de la Toussaint, par un groupe restreint de jeunes r�volutionnaires, la rupture avec, d�une part , l�ordre �tabli impos� par le colonisateur et, d�autre part, avec les anachronismes paralysants du Mouvement national. Il ne manque pas de rappeler que l��mergence du Mouvement national, depuis la naissance de l�Etoile nord-africaine, cr��e le 20 juin 1926 � Paris, s�est faite sur les bords de la Seine. Il tente de restituer, sans chauvinisme aucun, le r�le essentiel jou� par la communaut� alg�rienne �tablie en France dans le processus fait d�actes de bravoure et de drames ayant pour r�sultat l�ind�pendance du pays. Suivent ensuite les principaux �v�nements politiques enregistr�s en France par les militants de la cause nationale jusqu�au 17 octobre qui a �branl� les certitudes des partisans de l�Alg�rie fran�aise et la conscience de l�intelligentsia de l�Hexagone. Ghafir, en acteur privil�gi� de l�action, a restitu� fid�lement les �v�nements. �Depuis que je le connais, il a toujours t�moign� de ce souci de la v�rit� et de la transmission�, �crit le professeur Einaudi. Effectivement, t�moigner de ce qu�il a vu et v�cu, sans en rajouter, �tait pour Ghafir quasiment une obsession. Pour accomplir ce travail de m�moire, l�auteur a r�uni et d�cortiqu� une documentation riche et fort int�ressante. On peut y lire la d�claration et les noms des fameux 121 intellectuels, la lettre de Jean Paul Sartre adress�e aux magistrats charg�s de juger les porteurs de valises, les psaumes de Kateb Yacine adress�s aux Fran�ais � la suite de la tuerie du 17 Octobre. Sont annex�s �galement les rapports organiques et financiers de la zone dont Moh Clichy avait la charge. On peut y lire aussi des extraits des principales d�clarations du g�n�ral de Gaulle sur les grandes �tapes de la guerre de lib�ration ainsi que les meilleures citations des chefs du FLN (Ferhat Abb�s, Ben M�hidi, Abane, Krim, Boudiaf, Ben Boula�d et Didouche). Le livre contient par ailleurs les sinistres directives de Papon, quelques t�moignages de l��poque accompagn�s de photos. L�auteur se limite � rapporter des faits pr�cis ; en quelque sorte de la mati�re aux historiens acad�miques. R�sultat : un nouvel �clairage sur le travail de la F�d�ration de France (FF) est d�sormais � la port�e de ceux ou celles qui veulent bien en prendre connaissance. L��num�ration des noms, des dates, des chiffres et des lieux donne du cr�dit � ce livre et met � nu ceux qui s�autoproclamaient, � travers les m�dias complaisants du r�gime, chefs de la bataille de Paris. Ce travail de recoupement des faits historiques, auquel avaient �galement contribu�s sur le plan technique Na�ma Kermiche et Nadjib Athmani, se scinde en trois parties. Il s�agit de la pr�paration de la manifestation du 17 Octobre, de sa gestion par la F�d�ration de France et l�impact qu�elle a produit sur le gouvernement et l�opinion publique fran�ais. Un r�le marginalis� S�agissant pr�cis�ment des r�sultats politiques de r�bellion du 17 Octobre, l�auteur rapporte un fait politique organis� dans le sillage de cette action, fait longtemps occult�. Il s�agit d�une gr�ve de la faim observ�e par plus de 15 000 Fran�ais musulmans alg�riens, (FAM) d�tenus dans divers camps en France ainsi que les ministres du GPRA emprisonn�s (Ben Bella, Boudiaf, A�t-Ahmed, Bitat et Khider). Sur instruction de la direction de la r�volution, tout le monde a observ�, entre le 2 et le 22 novembre 1961, la gr�ve de nourriture. De plus, chacun d�eux a envoy� une lettre au pr�sident fran�ais, lui demandant la reconnaissance de l�ind�pendance de l�Alg�rie, la reconnaissance de l�unit� du peuple alg�rien et de l�int�grit� de son territoire ainsi que l�engagement des n�gociations avec le GPRA. Au constat de la d�gradation de l��tat de sant� des gr�vistes, l�ONU est intervenue. Cette organisation mondiale avait, dans sa r�solution du 15 novembre 1961, exig� de la France la reconnaissance, aux gr�vistes, du statut de d�tenus politiques. C�est une victoire politique internationale incontestable arrach�e gr�ce aux militants de la FF. En Alg�rie, on a constamment cherch� � occulter, pour des raisons politiques � la FF pr�conisait la l�galit� pour soutenir le GPRA � le r�le essentiel de l�immigration dans le combat qui a abouti � l�ind�pendance du pays. Ce livre a le m�rite de rappeler quelques rep�res sur ce r�le.