�tre papa ou maman de jumeaux n�est pas une sin�cure. Entre biberons, couches et angoisse permanente, pour �tre � la hauteur de la demande, une organisation sans faille doit �tre mise en place. Saliha, maman de Amina et Nawel �A l�annonce de la naissance de mes jumelles, mes sentiments �taient partag�es entre euphorie et crainte. Je ne savais pas � quoi m�attendre.� �C�est difficile lorsque nous sommes futurs parents de jumeaux de visualiser ce que sera le quotidien avec deux b�b�s du m�me �ge, d'autant plus lorsque ce sont les premiers !� r�sume cette maman de trois filles dont les jumelles. �D�s le d�part, je me suis dit que la seule solution est que je sois � cheval. Et cela m�a r�ussi. Mais il faut dire qu�apr�s la naissance de mes jumelles, je ne voulais plus avoir d�autres enfants�, rel�ve cette fonctionnaire. �Ce qui m�a le plus surprise, c�est qu�apr�s avoir annonc� la venue prochaine de mes jumeaux, j�ai �t� submerg�e de conseils �manant de parents qui n�ont jamais �lev� des jumeaux, mais qui connaissent toujours quelqu�un qui a eu des jumeaux. A les �couter, �lever des jumeaux �tait une t�che ais�e. Vu mon exp�rience, je dis que c�est totalement faux. Chaque famille doit s�organiser � son rythme et d�velopper ses propres rep�res. Le tout est de ne pas �tre tout le temps stress� �, confie pour sa part, Souhila, gyn�cologue, maman de jumelles. �Le tout est de ne jamais se laisser d�border. Et surtout accepter l�aide des parents et amis lorsqu�elle vous est propos�e.� Fifi, maman de faux jumeaux (une fille et un gar�on) �Mes enfants sont n�s en pleine guerre de Lib�ration nationale, c��tait au mois de mai et le premier jour de l�A�d El-Fitr. A l��poque, nous n�avions pas les commodit�s d�aujourd�hui : pas de couches jetables, pas de st�rilisateur, pas de lingettes, ce n��tait pas de tout repos, d�autant que mes enfants �taient n�s � 8 mois. Ma fille Narimene pesait 700 g et son fr�re Sid-Ahmed 1,5 kg. En ce temps, les couveuses �taient rares. La couveuse, je l�ai fabriqu�e moi-m�me avec les conseils de m�decins et de sages-femmes. J�ai envelopp� mes enfants dans du coton card�, bien cal�s dans leur berceau et dans une chambre bien chauff�e. Chacun avait ses vitamines � prendre, c��tait des gouttes qu�ils buvaient � des heures fixes et � des dosages diff�rents. Pour l�anecdote, un jour, submerg�e et surtout fatigu�e, car � notre �poque les maris ne mettaient pas la main � la p�te, je faisais tout toute seule et il fallait que le d�jeuner soit pr�t � midi, mon mari rentrait manger � la maison et reprenait le travail � 14h comme tous les travailleurs de l��poque, c��tait la course contre la montre, les �poux ne se contentaient pas d��ufs sur le plat, ils exigeaient de la bonne cuisine. Et bien un jour, bouscul�e par le temps, et stress�e car midi approchait et le d�jeuner n��tait pas encore pr�t, j�ai failli me tromper de dose dans le traitement. Croyez-moi, j�ai eu vraiment chaud. J��tais affol�e quand ils r�clamaient le biberon la nuit. D�s que l�un commen�ait � pleurer, l�autre le suivait, il faut faire tr�s vite et avoir plus d�un tour dans son sac. Moi, je pr�parais tout avant de me mettre au lit, la thermos d�eau bouillante, les doses de lait et les biberons. Je rangeais tout sur la table de nuit et je n�attendais pas qu�ils pleurent ; d�s qu�ils commencent � gigoter, je pr�pare le premier biberon � la lueur de la veilleuse en faisant attention � ne pas r�veiller le papa. Au bout de quelque temps, j��tais capable de pr�parer les biberons les yeux ferm�s. Et le lendemain, il fallait se lever aux aurores pour pr�parer le petit-d�jeuner du papa et m�occuper de mes deux autres enfants, El-Hadi qui avait 4 ans et Samia pas tout � fait 2 ans. Ils ont �t� choy�s et bien �duqu�s. �Apr�s la naissance de mes jumelles, je ne voulais plus avoir d�autres enfants.� �duqu�s. Sid-Ahmed aimait beaucoup sa s�ur, il la prot�geait des gar�ons et ne voulait pas qu�on s�y approche, par moments, il l��touffait. Il lui r�p�tait souvent : �Narimene si un gar�on t�emb�te, je voudrais que tu me le dises, je suis l� pour te prot�ger des mauvais gar�ons.� Narimene a fait des �tudes sup�rieures tout comme son jumeau ainsi que leur fr�re et s�ur (Samia, El- Hadi et les trois autres qui sont venus apr�s), aujourd�hui, ils sont tous mari�s. Certains sont grands-parents sauf Sid-Ahmed qui a �t� rappel� � Dieu dans un tragique accident de la route, il avait alors 26 ans. Quand il est n�, j�avais vraiment peur de le perdre car il �tait plus fragile que sa jumelle il s�en est tr�s bien sorti pourtant. A six mois, il est devenu un gros b�b� adorable, mais il a �t� ravi � l�affection des siens trop jeune. Des ann�es apr�s sa mort, Narimene refusait de f�ter son anniversaire, c��tait trop dur pour elle et pour toute la famille. A chaque heureux �v�nement, nous ressentons un pincement au c�ur. Il manquera toujours � l�appel. J�ai 83 ans aujourd�hui, et je ne m�en suis jamais remise, mon Sid-Ahmed me manque toujours.� Qui est qui ? �Au d�but, j'avais l'angoisse de ne pas savoir les diff�rencier : m�me s'ils se ressemblent physiquement, je peux les distinguer facilement � leurs gestes, leurs mimiques�, raconte Salima, maman de jumeaux �g�s de 20 mois. �Mais l�un a un grain de beaut� sur la fesse l�autre non�, ajoute-t-elle en souriant. �Des jumeaux, ce n'est pas courant, donc nous ne passons pas inaper�us lors de nos sorties. Et c�est toujours la m�me question : �Ce sont des vrais, des faux ?�, raconte pour sa part Farida. �L��ducation des jumeaux est une formidable exp�rience pour les parents, l�entourage et les jumeaux eux-m�mes. Le tout est de savoir la vivre.� Pour Farida, c�est leur scolarisation qui a jou� un tournant dans leur vie : �J'�tais inqui�te pour leur niveau et leur int�gration. Finalement, ils n�ont eu aucun probl�me. Je crois qu'�tre deux, �a les booste pas mal. Ils parlent aux autres �l�ves. Ils ne se sentent pas isol�s, donc je me dis que cela se passe bien.� Paroles de jumeaux �Jusqu�� mon mariage, j��tais toujours coll� � mon fr�re jumeau. Cela me plaisait et ne me g�nais pas. Nous sommes complices et pas fusionnels. Nous avons r�ussi � l��tre par la force des choses sans jamais tomber dans l�exc�s�, r�sume Fay�al, 23 ans. �Nous avons fait des blagues � notre entourage en profitant de notre forte ressemblance. Une fois, je me suis fait passer pour mon fr�re dans ma classe pour voir si la ma�tresse verrait qu�on s�est inter-chang�. Elle ne s�est pas rendue compte. Nous �tions tout fiers de le raconter � nos parents. Nous avons eu la punition de notre vie. Depuis, nous ne l�avons jamais refait�, raconte en riant Fay�al, jumeau de Farid. �Mes parents se sont toujours pos� la question de savoir si nous devions �tre s�par�s ou pas. Moi, je pense qu�il y a un juste milieu.� �Lorsque nous �tions petites, ma maman nous habillait tout le temps de la m�me fa�on. Elle donnait l�impression de jouer � la poup�e. Personnellement, je n�aimais pas cette situation. D�s que j�ai pu choisir mes v�tements et prendre des d�cisions, j�ai chang� de classe au CEM pour ne pas �tre coll�e tout le temps � ma s�ur jumelle. J�aime �tre autonome et mes parents ont mis du temps avant de le comprendre�, raconte Nedjma, �g�e de 23 ans.