Si le titre que nous avons donn� � notre texte ressemble �trangement � celui d'un film de Fred Zinemann, r�alis� en 1953, l'histoire et la trame, par contre, sont tout autre. Les hommes auxquels nous faisons r�f�rence ont �t� les acteurs d�une �poque inoubliable qui ont men� courageusement et solidairement une grande bataille nationale. Ils se sont regroup�s collectivement pour le seul int�r�t de la nation et le plus complet essor de libert� et de grandeur d'un peuple hors du commun. Ces hommes avaient r�ussi le pari d'atteindre des fins partag�es. C'est ainsi que le recours judicieux � la th�orie du choix rationnel dans sa variante �anticapitalisme � a �t� choisi comme mod�le �conomique et social. Le march� ainsi replac� dans le cadre d'une planification centralis�e a produit les effets escompt�s. Ce syst�me mis en place profitait � l'ensemble du peuple. L'enfer du ch�mage, de la pr�carit� et de la fracture sociale �tait banni. P�riode de totale accalmie, le peuple heureux dans son nouvel environnement ne lui est jamais venu � l'id�e de perturber le programme institutionnel. M�me si pour beaucoup de l'h�misph�re Sud, la disparit� �tait manifeste en comparaison aux conditions existantes chez nous. Cependant, le ch�mage massif, voire structurel s�vit toute une vie. Le monde en constante �volution et � l'�gard des d�mocraties nouvelles, l'Alg�rie, consciente du r�le � jouer sur la sc�ne internationale, avait pr�vu de se mettre au diapason et r�former ses institutions pour se frayer un chemin vers la �sociale-d�mocratie�. Malheureusement, le sort en a voulu autrement. Les hommes qui pr�sidaient aux destin�es de ce vaste pays (le plus grand actuellement par sa superficie de tout le continent) n'ont pas eu le temps n�cessaire pour mener � bien leur mission. Quelques d�cennies plus tard, les profondes mutations intervenues dans le passage brusque d'une �conomie centralis�e � une �conomie de marche, de surcro�t d�brid�e, ont cr�� cette sorte d'ar�ne o� tous ceux qui ont quelque chose � gagner se cherchent, se fuient, s'attaquent, se d�fendent, rusent, se violentent, se trompent, se heurtent et s'�crasent dans une soci�t� devenue d�s lors anomique� Comme si les personnes qui doivent gagner sont oblig�es de faire perdre les autres : pour qu��UN� seul vive, il fallait que 1 000 meurent. Le monde opaque des affaires a pris racine dans le pays. Nonobstant les affaires saines conduites par l'Etat et quelques hommes int�gres issus du secteur priv�, les fripons ont fini par d�truire tout ce qui restait du secteur industriel, construit par les mains de la vertu. Devant ce g�chis �conomique et social, la belle �Alg�rie� promue � jouer les premiers r�les, s'est retrouv�e dans une situation de syncope morale et o� tous les syst�mes qui sont venus en remplacement ont fait faillite sur tous les tableaux. Maintenant que nous sommes dans une soci�t� suppos�e �productiviste � et domin�e par les valeurs li�es �troitement � l'emploi et au travail, le taux de ch�mage devrait �tre pratiquement nul sinon relativement acceptable. Au grand dam des g�n�rations nouvelles, la r�alit� prouve le contraire. Lorsqu'on r�pertorie toutes les causes du climat social qui s'emboucane, on ne peut qu'�tre abasourdi par le caract�re d�l�t�re qu'elles pr�sentent et par la disparition progressive des principes de la morale et de l'�thique, dilu�s comme un morceau de sucre dans une tasse de caf�. C�est ainsi que l�on a violent� l�appel du Premier Novembre 1954. Car c'est bien de la violation unilat�rale de cette sorte de clause du contrat social, fondement de tout pouvoir politique, que vient la plus grande partie de nos maux. Pour esp�rer retrouver la dignit� d'appartenir � un pays � l'histoire plusieurs fois mill�naire, il s'agit de rompre avec ce qui a concouru � la catastrophe et s'atteler d'abolir les privil�ges que se sont arrog�s certaines classes de la soci�t� et qui ont pris au fil du temps un caract�re ostentatoire. Il faut revenir � nos premi�res amours : chaque citoyen doit avoir sa place dans la soci�t�. Il ne faut pas, alors pas du tout, que le travailleur ait constamment devant lui, la hantise du ch�mage, synonyme de mis�re et de d�p�rissement. Il n'y a plus d'autre alternative que de pallier l'insuffisance de ce qui reste �d'industrie� par la renaissance des grandes entreprises �citoyennes, les vraies dont M. le pr�sident de la R�publique avait promis la cr�ation, sous forme de grands ensembles, car c'est � l'Etat de reprendre les r�nes, quand cellesci sont l�ch�es par les employeurs en difficult�. C'est � l'�tat qu'incombe la noble t�che d'assurer la protection de tous. Il n'est pas encore trop tard de stopper l'h�morragie en tirant sur le mors du cheval emball�, dans une course effr�n�e dans le mur. Endiguer le ch�mage et finir avec l'exclusion et la hogra, il n'existe d'autre solution que de d�cider d'une autre politique plac�e sous la banni�re de la libert�, de la justice et de l'�quit� qui inverse celle d'une �conomie d�brid�e qui aura longtemps encha�n� sous son joug oppresseur les forces immenses de la nation. Nous esp�rons que les hommes et les femmes qui pr�sideront aux destin�es des institutions apr�s le 10 mai 2012 retiendront cette le�on. Qu�ils soient des revenants, des nouveaux (intellectuels, artistes, sportifs, citoyens lambda...), avec ou sans exp�rience, ils doivent se d�barrasser d'un penchant �ventuel au conformisme, mettre au placard toute forme de concupiscence et surtout de ne pas h�siter d'aller consulter le �peuple� car il est et reste la �nation�, �lev� � titre d'une entit� juridique et politique. Enfin, ne jamais oublier que le pouvoir politique vient du peuple et est transf�r� � des repr�sentants qui l�exercent.