Par Ammar Belhimer [email protected] Le bras arm� et financier, portevoix de la contre-r�volution et des int�r�ts �trangers dans le monde arabe, vient d��tre repris en flagrant d�lit de violation des droits sociaux fondamentaux. Ce 27 mars 2012, un �ni�me rapport de la Conf�d�ration syndicale internationale (CSI) sur les droits des travailleurs dans les �mirats arabes unis (EAU) dressait le tableau, honteux, de pratiques d�un autre �ge qui s�apparentent au �travail forc�. Le s�v�re r�quisitoire adress� par la CSI � ce qui fait figure de bras arm� et financier de la croisade contre le mouvement de lib�ration national arabe pr�c�dait de peu la r�union du Conseil g�n�ral de l�OMC qui examinait les politiques commerciales des EAU du 27 au 29 mars, � Gen�ve. Une �preuve in�vitable pour tout pays aspirant � acc�der � l�OMC en raison des engagements de cette derni�re � veiller � l�observation des normes fondamentales du travail au niveau international. Le rapport ne va pas par mille et un chemins et n�accorde aucune circonstance att�nuante : il rend les Emirats arabes unis coupables d�enfreindre �toutes les normes fondamentales du travail�. Sharan Burrow, secr�taire g�n�rale de la CSI, a rappel� que, dans cet �mirat, pas un seul syndicat n�est autoris� � exercer librement et �quitablement. L�interdiction de former des syndicats concerne aussi bien les enseignants et les juristes que les ouvriers de la construction. Aussi, les fonctionnaires, les employ�s domestiques et les travailleurs des �services essentiels� tels que la sant�, le transport et l�industrie p�troli�re et gazi�re n�ont pas le droit de gr�ve. �La main-d��uvre �trang�re, qui constitue 70% de la population, subit tout le poids des violations des droits syndicaux. De fait, la l�gislation du travail locale discrimine ces travailleurs embauch�s par le biais d�un syst�me de parrainage, qui les rend vuln�rables au travail forc� et � l�exploitation �, a dit Sharan Burrow. Parmi la main-d��uvre �trang�re embauch�e aux �mirats, il y a notamment des femmes de m�nage et des ouvriers de la construction en provenance de pays d�Asie du Sud comme le N�pal, l�Inde et le Bangladesh, mais aussi de pays arabes voisins, comme l��gypte ou le Y�men. Ces travailleurs et travailleuses sont soumis � des horaires de travail excessivement longs et sont fr�quemment victimes d�abus physiques, psychologiques et sexuels. En 2011, la CSI avait pr�sent� des preuves document�es de violations des droits des travailleurs � Duba�, dans un rapport d�enqu�te intitul� �Golfe : la face honteuse du miracle�. Au-del� des fa�ades �tincelantes de Doha (Qatar) et de Duba� (�mirats arabes unis), le document relate des histoires de migrants qui ne disposent d�aucun droit et vivent dans des conditions inhumaines. �Loin des centres commerciaux climatis�s et des beaux appartements du front de mer, ils vivent, entre hommes seulement, dans des logements surpeupl�s ressemblant � des casernes, situ�s dans des banlieues poussi�reuses qui vont en s��tendant, dont le tristement c�l�bre quartier Sonapur de Duba� et la zone industrielle � la p�riph�rie de Doha.� La zone industrielle en question � un espace coinc� entre une d�charge et un cimeti�re � h�berge � elle seule plus de 150 000 travailleurs migrants dans une banlieue ironiquement appel�e Sonapur, qui signifie �ville dor�e� en hindi. Le m�me rapport poursuit : �Au sein de l�opulence du Golfe, les migrants vivent dans de sordides taudis. Ces hommes ont des journ�es de travail ext�nuantes, souvent sous une chaleur torride, puis ils sont ramen�s � leur logement d�entreprise dans les bus de l�entreprise ; ce qui les attend, ce sont des chambres o� il s�entassent parfois � dix, de la nourriture on ne peut plus simple, des toilettes et des douches souvent rudimentaires et une climatisation qui, dans les rares cas o� elle est pr�vue, est de toute fa�on inefficace face aux temp�ratures estivales qui grimpent au-dessus des 40�C.� Autre forme d�apartheid insoup�onnable : avec trois fois plus d��trangers que de ressortissants nationaux, les autorit�s tiennent � emp�cher que les centaines de milliers de �c�libataires� pauvres ne d�barquent dans les centres commerciaux cossus, les souks pittoresques ou les projets urbains de luxe au bord de la mer. Giovanni Espinal, professeur d�universit� am�ricain charg� d�un programme de formation destin� aux migrants, estime � plus de 200 000 le nombre de travailleurs � faibles revenus qui vivent au milieu du d�dale d�h�tels, d�usines, de hangars et d�ateliers de r�paration de voitures de la zone industrielle. La banlieue, immense, dont la surface �quivaut en gros � celle de 1 134 terrains de football, est pourtant m�connue et cach�e aux yeux du monde. Nombreux sont ceux qui effectuent un travail dangereux, mais ils n�ont qu�une couverture m�dicale d�risoire, voire inexistante. Les travailleurs migrants supportent l�insupportable en �change de la possibilit� de subvenir aux besoins de leurs familles gr�ce � des salaires qui ne sont per�us qu�avec des mois de retard. Escroqu�s par des agents de recrutement sans scrupules, ils d�chantent tr�s vite en d�couvrant que les salaires per�us sont inf�rieurs � ceux n�goci�s avant leur d�part. V�ritable traumatisme pour les migrants qui se retrouvent � lutter pour rembourser les dettes contract�es pour payer leur voyage jusque dans le Golfe. Par ailleurs, les travailleurs n�ont aucune possibilit� d��chapper aux griffes des employeurs qui les exploitent, enserr�s dans un syst�me d�nomm� Kafala en vertu duquel ils sont li�s � des entreprises locales qui se sont port�es garantes. En vertu de ce m�me syst�me, ils doivent avoir une entreprise locale qui se porte garante, pour laquelle ils travailleront pendant toute la dur�e de leur s�jour dans le pays d�accueil. �Ce syst�me revient � les pi�ger dans leur emploi pendant toute la dur�e de leur contrat. Ce n�est que dans des circonstances exceptionnelles qu�ils auront l�autorisation de changer d�employeur pendant leur s�jour�, d�plore le rapport de la CSI. Des obstacles sont �galement cr��s pour les emp�cher de quitter le pays s�ils ne sont pas satisfaits de leurs conditions de vie ou de travail. Les employeurs qui les ont parrain�s retiennent souvent leurs passeports, ou bien refusent de leur donner l�autorisation n�cessaire pour obtenir un visa de sortie. Les critiques internationales � l�encontre du syst�me sont nombreuses et ne m�ritent pas une grande �rudition ou l�humanisme de m�re Th�r�sa pour �pingler les Emirats arabes unis. �Le syst�me de �visas gratuits� ou Kafala (parrainage) cr�e des distorsions sur le march� et peut mener au travail forc� et � la traite des �tres humains�, affirme l�Organisation internationale du travail dans un rapport sur la r�gion publi� en janvier 2011 sans qu�il ne provoque la moindre lueur printani�re arabe. �Les dispositions de la loi sur le parrainage mettent en place des conditions pouvant d�boucher sur des situations apparent�es au travail forc� et � l�esclavage�, d�clare le d�partement d�Etat am�ricain dans son rapport de 2009 sur les droits de l�Homme au Qatar. Ne sachant plus quoi faire devant les mauvais traitements subis ou les arri�r�s de salaires, certains travailleurs n�ont d�autre choix que la fuite. Les femmes travailleuses sont moins visibles, mais il y a des dizaines de milliers de femmes migrantes dans les pays du Golfe, servantes domestiques vivant chez leur employeur, o� elles courent le risque de subir les pires abus verbaux, physiques ou sexuels. Voici un des nombreux t�moignages consign�s dans le rapport : celui de Soraya, une jeune m�re originaire de l��le de Mindanao, dans la r�gion australe des Philippines. �Apr�s un an � s��puiser au travail, sans un seul jour de cong� et sous les injures constantes et parfois les agressions physiques de sa patronne, qui lui a m�me mis une fois les mains dans un four chaud, Soraya, 31 ans, a fui en f�vrier. La goutte qui a fait d�border le vase, c�est quand sa patronne l�a agress�e � coups de chaussure � talon aiguille.� Un fait parlant, comme des milliers d�autres, qui se passe de tout commentaire.