Le respect des libertés syndicales en Algérie n'est plus qu'un slogan creux. Les syndicats autonomes, créés ces dernières années en Algérie, butent sur une multitude d'entraves dressées par le pouvoir. Le but : les empêcher coûte que coûte d'activer sur le terrain. Répression, intimidation, interdiction… Les organisations syndicales autonomes font régulièrement l'objet d'un acharnement des autorités qui ne veulent pas d'une autre forme d'activité syndicale que celle exercée par la très officielle centrale syndicale, UGTA. Cette situation est dénoncée par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans son dernier rapport sur les droits syndicaux dans le monde, rendu public hier. «Les très larges pouvoirs d'intervention des autorités pour décréter les grèves illégales n'ont pas suffi à empêcher la présence des syndicats, mais elles ont souvent été réprimées par les employeurs et les autorités», note d'abord la CSI. Citant les différentes atteintes aux droits syndicaux enregistrées en 2010, la Confédération déplore les restrictions à l'exercice syndical, en particulier, dans le secteur public. «La marge de manœuvre des syndicats autonomes dans le secteur public est très sévèrement contrôlée», souligne la CSI dans son rapport, en citant l'exemple de la mise sous scellés de la maison des syndicats, un local loué par le Syndicat national des personnels de l'administration publique (Snapap). La confédération s'est dite ainsi pas du tout convaincue par les arguments avancés par les autorités pour justifier cette fermeture. «Les prétextes avancés pour justifier cette fermeture sont tout simplement mensongers», lance la CSI. Elle relève aussi les entraves auxquelles font face les travailleurs pour créer leurs propres syndicats. «La création des syndicats est entravée par des restrictions excessives et par les interventions du gouvernement. Pour être reconnu, un syndicat doit représenter au moins 20% des travailleurs d'une entreprise et obtenir l'autorisation préalable du gouvernement», rappelle le même rapport. Le même document dénonce aussi le harcèlement contre les responsables syndicaux. «Les multinationales hostiles aux syndicats» La CSI met également l'accent sur la violation du droit à la grève, à travers le recours abusif à la justice pour suspendre les mouvements de grève. «Les grèves légales sont difficiles à organiser. Plusieurs ont été jugées illégales. Des menaces de radiations massives de grévistes et de retrait d'agrément à des syndicats ont été brandies», ajoute-t-on dans ce rapport. La preuve supplémentaire sur le non-respect des libertés syndicales, ajoute l'organisation, est le refus d'agrément des syndicats. «Beaucoup de syndicats n'ont toujours pas été reconnus ou bien leurs noms sont usurpés par des dissidents soutenus par les autorités pour saper leur représentativité», indique la CSI. Poursuivant, elle dénonce aussi l'interdiction de l'exercice syndical au niveau des multinationales et les restrictions faites sur les syndicats autonomes dans le secteur public. «Dans le sud du pays, les nombreuses multinationales présentes ont continué à se montrer hostiles aux revendications des travailleurs. Des sociétés ont interdit aux travailleurs de s'organiser et de militer pour obtenir de meilleures conditions de travail», note la même source. Le rapport de la CSI revient aussi sur la situation du syndicalisme dans le monde arabe, où «le déficit criant de démocratie n'épargne pas le paysage syndical». «Dans la majorité des pays, le système de syndicat unique qui permet aux autorités de contrôler plus aisément l'activité syndicale se heurte aux aspirations grandissantes de démocratie interne notamment chez les jeunes», explique la CSI. Mais, selon le rapport, la donne commence à changer depuis la réussite de la révolution tunisienne. «Les jeunes sont conscients que, quand ils sont libres et indépendants, les syndicats peuvent faire une différence vitale en faveur des processus de changement pour le respect des droits fondamentaux, la justice sociale et l'emploi décent», analysent les rédacteurs de ce document. La CSI est une confédération de centrales syndicales nationales. Elle compte 175 millions d'adhérents, dont 40% de femmes, au sein de 305 organisations affiliées dans 151 pays et territoires à travers le monde.