Par Mohand Bakir Non M. Farah, il y avait bel et bien � et il y a toujours � trois camps. La crise du syst�me d�Etat alg�rien d�voile l�antagonisme historique entre deux projets de soci�t� ; mais les tentatives de r�ponses, en concurrence pour la solutionner, sont au nombre de trois. Il n�y a pas lieu de confondre les constituants de la crise et ses protagonistes pour assurer la d�fense d�un chef de l�arm�e. Une r�ponse r�trograde, totalitaire et th�ocratique : celle de l�islamisme conqu�rant. Avec ses afghans. Ses capos qui promettaient aux Alg�riens le changement de leurs habitudes culinaires et vestimentaires. Avec son impatience � �riger des potences sur les places publiques, et ses promesses de purification massive et g�nocidaire. Cette r�ponse n�a, d�ailleurs, pas attendu �l�arr�t du processus �lectoral� pour lancer son offensive, Guemmar, apr�s Telegh, Blida et Hassi Messaoud avaient montr�, s�il le fallait, la centralit� de la violence dans cette r�ponse. Elle traduit avec cons�quence le projet th�ocratique qui se promet de cultiver tout ce qu�il y a de conservatisme, d�acha�sme et d�intol�rance dans notre soci�t�. L�autre r�ponse, mar�cageuse, b�tarde, amalgame difforme des incons�quences politiques. Son seul ciment : la sauvegarde de l�oligarchie bureaucratique et la consolidation de sa mainmise sur l�Etat et ses institutions. Concordiste, �ententiste�, sans v�ritable identit� propre, ni islamiste ni moderniste, ce qui la disqualifie de la pr�tention � se poser en projet, elle a longtemps nourri l�illusion qu�elle s�attelait � la modernisation de notre soci�t� et a, en permanence, fait le lit de l�obscurantisme, lui conc�dant l��cole � un Kharroubi valant mieux qu�un Lacheraf � et assurant son ascendant sur la culture et la spiritualit�. Nous avons bien h�rit� du tr�s cathodique El Ghazali et banni Mohamed Arkoun ! La troisi�me proposition de r�ponse, celle de l�opposition d�mocratique : ambitionnant la r�novation et la reconstruction du projet national sur des bases d�mocratiques, r�publicaines, d�ouverture sur le monde et de prolongement de ce qu�il y a de meilleur dans nos traditions. Un projet de construction de la citoyennet� et des libert�s. L�islamisme s�est attel� � l��radication du p�le moderniste et � l�affaissement des institutions de l�Etat r�publicain. Le mar�cage bureaucratique a tout fait pour contenir la r�sistance de la soci�t� dans les limites qui assurent sa propre survie. Que n�a-t-on vu de listes sur les frontons des mosqu�es, l�gitimant par avance la liquidation de notre intelligentsia. Djaout, Boukhebza, Guenzat, Matoub, ou Boucebsi ! L��radication se promettait implacable et syst�matique. Le syst�me, qu�il ait dialogu� � Alger ou � Rome, a travaill� � la marginalisation des forces modernistes. �La�co-assimilationnistes � ou communistes. L�audace a �t� pouss�e jusqu�� les taxer d���radicateurs�, alors que c�est elles-m�mes qui �taient objet d��radication par le terrorisme islamiste ! Cette ligne politique anachronisme a �t� inaugur�e par le silence criminel au sujet de l�attaque de Guemmar, et confirm�e par le brutal barrage oppos� � la d�marche du pr�sident Boudiaf. Le summum de cette politique sera l�accord secret AIS-DRS qui cadre la politique du pays aujourd�hui. Le fait que M. Farah, et les patrons de presse � puisqu�il les implique � avaient besoin, en 1992, de proph�ties pour s�engager dans la d�fense de la patrie t�moigne que, pas plus en 1992 qu'aujourd'hui, ils n�ont une compr�hension et une lecture correcte de la crise qui frappe l�Alg�rie. C�est aussi l�explication de leur candide croyance en le mensonge du d�passement de la crise. M. Farah devrait relire l��dito de Djaout, �La famille qui avance, la famille qui recule �, pour se rafra�chir la m�moire sur la saisissante pr�cocit� du �dialoguisme� du pourvoir. Aujourd�hui, la vraie question c�est de savoir si l�Alg�rie a r�sorb� sa crise et si c�est le cas, dans quel sens elle l�a fait ? Celui de l�islamisation th�ocratique ? Ou celui de la rupture r�publicaine et d�mocratique et de la liquidation de l�oligarchie bureaucratique et des clerg�s islamistes. Reformulons la question : l�intervention de l�arm�e a-t-elle �t� autre chose qu�une option qui reporte le voyage sans retour du pays ? M. B. R�PONSE Quand je dis qu�il y a avait deux camps, je parle du moment pr�cis o� il fallait choisir entre le �voyage sans retour� et l�ultime possibilit� d�emp�cher notre pays de tomber entre les mains des Talibans. Je persiste et signe : il n�y avait pas trois camps. La preuve : les d�mocrates, les r�publicains et tous les citoyens �pris de libert� et de d�mocratie avaient soit directement particip� au redressement de janvier 1992 (Benhamouda n��tait pas un militaire !) soit applaudi des deux mains l�intervention de l�arm�e. Vous faites une confusion entre la r�alit� qui existait en janvier 1992 et qui ne laissait pas beaucoup de choix aux patriotes et tout ce qui est venu apr�s et que nous pouvons consid�rer comme une s�rie de trahisons puisque nous avons parfois l�impression que les sacrifices de Djaout et de tous les autres n�auront servi � rien. Quant aux proph�ties, personne n�en avait besoin. J�ai parl� d�une simple �valuation faite par les gens concern�s qui devaient certainement redouter la violence et la barbarie de ceux qui avaient commenc� � tuer � Guemmar et qui s'entra�naient d�j� dans les for�ts et les plages. La question qu�il faut se poser aujourd�hui serait plut�t : oui ou non, fallait-il passer � l�action tout en sachant que cela provoquerait la mort de beaucoup d�Alg�riens ? La survie de la R�publique valait-elle ces sacrifices, oui ou non ? Ni moi ni les patrons de presse n��tions impliqu�s dans la prise de ces d�cisions. J�ai dit dans l�article que vous citez que c�est � l�histoire de juger les hommes qui ont agi pour le salut de l�Alg�rie r�publicaine. C��tait vu comme �a � l��poque. Enfin, permettez-moi de vous poser une question : �tiez-vous contre l�intervention de l�arm�e ou pour la poursuite du processus �lectoral ? Il n�y pas trois r�ponses...