Le recyclage au f�minin dans le domaine de l�artisanat � caract�re �cologique est un cr�neau qui commence � se frayer un chemin. Djerdi Cherifa, 54 ans, retrait�e de la zone industrielle de Skikda, bien que n��tant pas une pionni�re en la mati�re, s�est offert, en d�pit des contraintes �tablies, une place au soleil. Le soleil des travaux manuels qui embellissent, � travers des op�rations clandestines de transformation ou de reconversion d�objets, la d�co des demeures ; ou encore celui des salons pompeux lors de c�r�monies officielles. D�ailleurs, sa d�couverte est � entonner lors des journ�es portes ouvertes organis�es conjointement par les associations El-Wouroud d�Emzedj-Edchiche et Bariq 21, les 10 et 11 juin 2011, � la maison de jeunes de la commune d�Emzedj-Edchiche, une quarantaine de kilom�tres du chef-lieu de wilaya. Dj.Ch�rifa est sortie sous les feux de la rampe il y a de cela trois ans seulement, apr�s avoir pass� 20 ans dans l�anonymat. L�anonymat artisanal s�entend. De son statut de femme au foyer, elle en a fait bon usage. Malgr� la relative exigu�t� des lieux, Cherifa a su en faire un atelier informel. Un espace familial avec un arri�re-fond professionnel. Une recycleuse au foyer est n�e. Ne s�arr�tant pas � la seule satisfaction, avec doigt�, de sa passion, Cherifa s��tait autoproclam�e formatrice. Un groupe d�enfants �g�s de 8 � 11 ans est sa premi�re promotion. La dur�e du cycle correspond � l�ann�e scolaire. Il n�est pas � �carter, vu le succ�s remport�, que le nombre soit revu � la hausse cette ann�e. Bouteilles en plastique et en verre, coquilles d��ufs, troncs d�arbre, vieilles bassines, tuyaux � gaz, vieilles horloges, supports audiovisuels� la liste des mat�riaux utilis�s pour le recyclage est longue. On voit ici que tout ce qui contribue � l�insalubrit� publique ou � emplir les d�vidoirs d�une capacit� moindre par rapport au volume des d�tritus est r�cup�r� pour servir � divers usages (ustensiles de cuisine, objets de d�coration, effets pour mari�e�). Du bon usage du tri s�lectif. Djerdi Cherifa est une bonne conteuse. La narration qu�elle fait concernant son parcours m�rite que l�on s�y attarde. � Comme tous les enfants de mon �poque, je faisais mes poup�es en chiffons moi-m�me, le trousseau de la maison, comme le matelas, l'oreiller, les habits� Enfin, tout ce qui est n�cessaire pour une poup�e. L�armoire �tait faite avec une bo�te d'allumettes et les pinces � linge servaient pour fabriquer la chaise. Les travaux manuels de ce genre nous permettaient de passer nos tr�s longues vacances d��t� loin des senteurs marines et de la chaleur du sable fin de nos c�tes.� Sur cet �pilogue, elle se rappelle sa premi�re �uvre d�art. �Mon premier ouvrage de r�cup�ration, je l�ai r�alis� en 1983. Une coll�gue de bureau avait ramen� de la laine (je me rappelle que les bobines �taient entrem�l�es et de deux couleurs : le jaune et le noir). Au bout d'un moment, elle avait perdu patience et l�a jet�e dans la corbeille � papier. Je l'ai r�cup�r�e et r�ussi � la d�m�ler. R�sultat : un petit gilet jaune avec une bordure noire au crochet a �t� con�u. En signe de reconnaissance, je l�ai offert � sa petite s�ur. Bien avant, je savais que dans quelques foyers skikdis, les mamans et leurs filles faisaient des corbeilles � base d'alfa et sachets en plastique, qui servaient � ranger des fruits ou des l�gumes. C��tait joli. Avec des couleurs bien �tudi�es, on tissait aussi des tapis avec des vieux v�tements qui �taient mis au rebus ou des tomb�es de tissus que l�on r�cup�rait chez les couturi�res.� La carri�re artisanale de Cherifa a �t� suspendue, � regrets, par les �tudes et la vie conjugale. �Trop prise par mes �tudes, le travail et puis les enfants, j��tais oblig�e de mettre de c�t� tout cela, mais avec l'espoir d'y revenir un jour. La preuve, je ne jette jamais les r�sidus quels qu�ils soient. Puis, c�est le d�clic. Je me souviens, c��tait � l�occasion de la c�l�bration du mariage de ma ni�ce. J'avais besoin de petites corbeilles pour les filles d'honneur. Elles devaient pr�c�der la mari�e et parsemer le parterre de p�tales de fleurs. A cette �poque, il n�y en avait pas sur le march�, j'ai d� r�cup�rer quelques petites bassines en plastique, des tuyaux � gaz pour faire l'anse, du tissu satin�, ruban et quelques fleurs, et le tour �tait jou� ! Les bassines ont vu le jour.� Profitant de notre entrevue, Djerdi Cherifa fait un v�u : �Mon v�u le plus cher est d'avoir un atelier o� exposer tous mes travaux et pouvoir sensibiliser petits et grands pour la sauvegarde de notre environnement. Comment g�rer nos d�chets et cr�er des bibelots et autres articles aussi beaux les uns que les autres figurent aussi parmi mes objectifs. Lors de mes expositions, je me rends compte que les gens sont curieux, �merveill�s et avides d'apprendre. C�est dire que c�est un cr�neau qui a de l�avenir.� Djerdi a une fille �g�e de 14 ans. Elle suit les traces de sa maman et compte prendre la rel�ve. Pour preuve, elle a d�j� � son actif plusieurs cr�ations, entre autres une poup�e qu�elle a habill�e d�un costume traditionnel de Skikda. Elle a aussi �rig� une maison � base de carcasses de t�l�phones mobiles, de bo�tes de c�r�ales, de cotons-tiges et d�allumettes. Telle m�re, telle fille. La filiation artisanale est en cours. �Les mus�es pr�servent notre pass� ; le recyclage pr�serve notre avenir.�