[email protected] Pitoyable, cet homme grima�ant, tra�nant son petit gar�on qui, criant � tue-t�te, r�clame une sucette. - Mon ch�ri, tu en as d�j� pris deux, ce n�est pas bon pour tes dents. Hurlant de plus belle et tapant des pieds, notre ch�rubin est d�cid� comme toujours � avoir le denier mot. Le papa, d�sarm�, comme toujours, ne r�siste pas. - D�accord, calme-toi, mais cette fois ce sera la derni�re. L�enfant s�che alors ses larmes, arbore un sourire narquois, serre la main de son papa et se dirigent tous deux vers un kiosque pour choisir la friandise. - Je veux une sucette au citron. Le vendeur est d�sol� de ne plus en avoir et propose d�autres parfums. -Il m�en reste � la fraise, � la framboise, au chocolat et � la vanille. - Non, je veux une au citron. Le p�re, contenant ses nerfs, essaye d�expliquer � son fils que toutes les sucettes sont aussi bonnes, quel que soit leur go�t. L�enfant n�en d�mord pas et s�accroche � sa sucette au citron. Il tire son papa par la chemise et grommelle : - Allons voir d�autres marchands, ils en ont s�rement. - Ce n�est pas possible, tu vas �tre en retard � la cr�che et moi � mon travail. Le gamin sort alors sa seconde �arme� de persuasion. Il s�assoit parterre et refuse de se relever s�il n�a pas sa sucette au citron. Le p�re, rouge de honte devant les regards ahuris des passants, tente de raisonner son ch�rubin. Ce dernier hurle, se d�bat et roule sur l�asphalte. Le papa panique. Il l�implore devant l�attroupement de quelques badauds qui s�y mettent eux aussi en jouant aux psychologues. Rien n�y fait. Le p�re d�cide de se r�volter, et, prenant sa voix la plus s�v�re, intime l�ordre � son fils de se lever et �tout de suite� l�enfant, rus� comme un renard, sort du fond de ses entrailles un cri strident qui d�sarma le papa. Sans mot dire et sentant sa d�faite, il s�accroupit, caresse les cheveux de son avorton et lui murmure � l�oreille : �D�accord mon b�b�, l�ve-toi, ne crie plus et nous allons chercher ta sucette au citron.� L�enfant d�un bond se met debout, et ne cache pas sa victoire. Le paternel d�un pas d�cid� �cume les kiosques � la recherche de la denr�e rare. Au bout de la cinqui�me tentative, il trouve enfin son pr�cieux bonbon. Soulag�, il paye le marchand. Il est press� de quitter les lieux. L�enfant d�un air sournois, contemple sa sucette, la soup�se puis, sto�que, lance : �Papa, enfin de compte j�ai chang� d�avis, le jaune de cette sucette ne me pla�t pas, je pr�f�re celle � la framboise.� Le p�re, sorti de ses gonds, arrache la sucrerie � son enfant, la remet au vendeur et de son air le plus monstrueux lui dit : �Tu n�auras plus de sucette, Sors vite d�ici, nous allons �tre en retard.� Le fils ne reconnaissant plus son p�re, tremblant comme une feuille, baisse la t�te, ravale ses larmes et le suit, incapable de sortir le moindre son de sa petite bouche. Quant au p�re, �tonn� par lui-m�me, ne r�alise pas encore son exploit. Il r�p�tera dans son for int�rieur : �Hourrah ! j�ai gagn� !� Ne dit-on pas qu�un �enfant g�t�, est un enfant rat�.