Blessures de la m�moire est la derni�re �uvre �crite par l�un des pionniers de la litt�rature alg�rienne d�expression arabe, Abdelhamid Benhadouga. Ce recueil de nouvelles s�ach�ve ainsi : �Vers les m�mes ab�mes.� Le ton est pessimiste, une anticipation � la violence qui d�ferle aujourd�hui dans le monde. Dix nouvelles, tr�s bien illustr�es par le calligraphe Hassan Messaoudi, d�crivent le passage de la paix des ann�es 80 � la guerre inutile et tragique des nineties en Alg�rie. Une seule note d�espoir rayonne dans ce recueil : la nouvelle intitul�e Le grenadier de la seguia. Cette derni�re retrace le combat d�un gar�on qui s�acharne � ressusciter un grenadier dont les racines ont s�ch�. La chute de la nouvelle est un happy end dont quatre mots composent la belle calligraphie : �Nous serons le jardin.� La nouvelle intitul�e M�moire trou�e raconte l�histoire d�un homme qui ne devient amn�sique que lorsqu�il s�agit du pr�nom de sa femme. Quelle belle trouvaille pour illustrer les conflits conjugaux de l�esp�ce humaine ! Quel humour ! Ecrit � la premi�re personne du singulier, l�auteur a certainement go�t� aux fruits amers du branle-bas conjugal. Parfois il d�borde de tendresse, il dit � sa femme : �Tu m�es une patrie, � qui appartiennent mon �me et ma vie.� La nouvelle s�ach�ve par un r�ve o� l�amn�sique rencontre un vieillard � qui il raconte ses d�boires. �D�cris-moi ta femme�, lui demande le derwich. L�auteur la compare d�abord � l�or, chose qui fait croire au vieillard que cet homme est pauvre. Il la compare ensuite � un r�gime de dattes. �Tu es donc un affam� �, lui r�plique le derwich. �Elle est amour, mais en plus g�n�reux� est la derni�re m�taphore de l�auteur. Le vieillard lance la r�plique la plus significative de la nouvelle : �Il n�y a rien de plus pr�cieux que l�amour, sinon la libert� !� Le mot est lanc� en arabe �Houria� Eur�ka, s��crie l�auteur, il croit retrouver la m�moire. Il se r�veille et retrouve sa v�ritable femme. Cette derni�re se f�che car elle ne se nomme pas Houria. Apr�s l�amn�sie, vient le tour de l�infid�lit�. Qui est cette femme qui fait r�ver son mari ? L�auteur parle-t-il de la qu�te effr�n�e de la libert� chez l�artiste ? Toutes les nouvelles sont dat�es et � partir d�octobre 88, on entre de plain-pied dans la trag�die. Sur les paroles ouvrez le feu, L��ternit�... et le fusilet R�ve couleur de nuit sont des nouvelles qui d�crivent l�infernal cycle de barbarie qui a r�gn� en Alg�rie durant la d�cennie 90. La nouvelle qui porte le titre du recueil fait parfois un come-back dans l�enfance de l�auteur, pass�e dans El Hamra, un hameau perch� sur les hauteurs sud des Bibans. �J�invoquerai l�horizon lilas couronnant mon village, le temps lointain v�cu l�-bas, mon enfance amoureuse de la lune et des �toiles, les berceuses que me chantait ma m�re.� Mais la m�moire est trop bless�e. Au moment o� il r�dige sa derni�re nouvelle, Tahar Djaout, Abdelkader Alloula et Boucebci ne sont plus de ce monde, ils ont �t� fauch�s par la violence int�griste. �Les uns ont �t� assassin�s, les autres sont sur la liste d�attente.� N� en 1925 � Mansourah, dans la wilaya de Bordj Bou-Arr�ridj, Benhadouga est consid�r� comme le p�re fondateur du roman alg�rien moderne d�expression arabe. Ce recueil de nouvelles est aussi un t�moignage qui d�voile les blessures encore ouvertes de l�Alg�rie contemporaine. Les �crits restent et font face � tous les oublis mais son chant de cygne est une complainte, un lamento. Da Snitra, Bordj-Bou-Arr�rid