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Entretien ABDELKADER MESSAHEL, MINISTRE D�L�GU� CHARG� DES AFFAIRES MAGHR�BINES ET AFRICAINES, AU SOIR D�ALG�RIE :
�Au Mali, l�intervention arm�e reste un recours ultime�
Entretien r�alis� par Khedidja Baba-Ahmed [email protected] Des d�clarations sur le Mali nous parviennent journellement de toutes parts. Ces d�clarations se suivent, se croisent et souvent se contredisent. Sur le terrain, si la situation n�est pas pour l�instant explosive, elle est toutefois loin de permettre une lecture claire, ais�e du positionnement des uns et des autres, acteurs directs ou indirects, sur le futur imm�diat du Mali et la gestion de cette crise. Et l�Alg�rie dans tout cet imbroglio ? Acteur incontournable, disent les uns et les autres, l�Alg�rie dit d�fendre sur ce dossier une position caract�ris�e par de la �la constance, de la continuit� et de la coh�rence�. Mais au-del�, quelle est justement cette position ? Quel contenu donne l�Alg�rie au dialogue qu�elle pr�ne et avec quels protagonistes ? Si malgr� tout, le dialogue �chouait et que le Conseil de s�curit� d�cidait d�une intervention arm�e, que ferait alors notre pays ? S�engagera-t-il dans la guerre et si oui, sous quelle forme ? A toutes ces questions, Abdelkader Messahel, ministre D�l�gu� aupr�s du ministre des Affaires �trang�res, charg� des Affaires maghr�bines et africaines, le plus impliqu� aujourd�hui dans ce dossier, nous a r�pondu, allant souvent dans le d�tail et diss�quant chacun de ses arguments. Notre entretien ne s�est cependant pas limit� � la situation au Mali : position de l�Alg�rie sur le Sahara occidental, l�Union du Maghreb arabe (UMA) et l�Union pour la M�diterran�e (UpM) m�ritaient aussi qu�elles soient clarifi�es. Le Soir d�Alg�rie :La situation au Mali est aujourd�hui le th��tre de bouleversements intenses faits de tractations, de modifications de positionnements quasi-permanents des acteurs directs ou indirects dans cette r�gion : Ansar Dine, qui s�est d�clar� pour le dialogue d�une part et d�autre part, le Mouvement national pour la lib�ration de l�Azawad, MNLA, qui se faisaient la guerre, ont sign� r�cemment un communiqu� commun pour le dialogue avec les autorit�s provisoires de Bamako. Le MNLA s�est lanc� ces derniers jours dans des combats contre les islamistes du Mujao pour reprendre des positions accapar�es par les islamistes. Certains va-t-en guerre appellent finalement au dialogue : ces revirements incessants ne laissent aucune place � la clart� de la situation. Pourriez-vous, Monsieur le Ministre, nous dire qu�est-ce qui rend peu claire la situation ? Abdelkader Messahel : La situation au Mali est tr�s complexe. Parfois le manque de connaissance des v�ritables enjeux conduit � ce que les positions des uns et des autres peuvent appara�tre comme fluctuantes. Pour ce qui nous concerne, nous avons fait un travail en direction de tous nos partenaires pour informer de la position de l�Alg�rie, pour expliquer la complexit� du probl�me et, aujourd�hui, nous sommes parvenus, et c�est un fait, � cr�er une certaine convergence de vues. C�est cela le plus important. Ce qui est important d�expliquer, c�est qu�au Mali, il y a une menace qui est non seulement certaine mais elle concerne tout le monde, et qu�il s�agit, en l�occurrence, d�une menace du crime organis� et du terrorisme. Quant � la r�bellion touareg, c�est une r�bellion r�currente : il y en a eu en 1963, en 1990, en 2006 puis en 2011. Cette r�bellion est un probl�me malo-malien. Pour ce qui nous concerne, nous faisons la distinction. Tout ce qui est malo-malien doit �tre g�r� dans le cadre d�un dialogue politique, pacifique. Il faut travailler � expliquer cela et c�est ce que nous avons fait jusqu�� maintenant. Nous avons �t� les pr�curseurs et cela depuis des ann�es dans la d�finition de la menace qui reste le terrorisme et le crime organis�. Nous avons travaill� avec nos partenaires � aider � faire cette distinction et faire en sorte que le MNLA se d�marque des positions ind�pendantistes et qu�Ansar Dine se d�marque du terrorisme et du crime organis�. Dans ce domaine-l�, il y a, incontestablement, une �volution puisque ces deux groupes vont vers le dialogue, un dialogue qui pr�serve l�unit� nationale. Aujourd�hui le MNLA n�a plus de revendication d�autonomie ? Le MNLA a �volu�. Souvenez-vous qu�il a revendiqu� l�ind�pendance. Par rapport au d�but de la crise, on rel�ve chez ce mouvement une �volution tr�s importante. La R�solution 2071 du 12 octobre du Conseil de s�curit� de l�ONU marque, pour tout observateur de la situation au Sahel et les conflits au Mali, un tournant dans la position alg�rienne quant au traitement de cette question. D�une attitude ferme et sans �quivoque de rejet de toute intervention militaire, pr�f�rant l�appropriation du conflit malien par les pays du champ, l�Alg�rie semble, maintenant, se faire une raison de l�in�luctabilit� d�une intervention militaire pr�par�e officiellement par la C�d�ao. Aujourd�hui, l�internationalisation du conflit que redoutait l�Alg�rie et qui r�sulte d�int�r�ts g�ostrat�giques bien compris, semble en marche. Tr�s clairement, Monsieur le Ministre, qu�est-ce qui vous a conduit � rel�cher votre fermet� initiale ? Il y a lieu, je crois, de se d�partir des approches manich�ennes. La crise malienne est, en soi, tr�s compliqu�e et tr�s complexe alors, de gr�ce, �vitons de l�approcher sous le simple prisme du tout militaire ou du tout politique. Partant de l�, laissez-moi vous dire qu�il n�y a eu que de la constance, de la continuit� et de la coh�rence dans la position de l�Alg�rie. Vous vous rappelez que l�Alg�rie a salu� l�adoption par le Conseil de s�curit� de la r�solution 2071 que vous �voquez. Pourquoi ? Parce qu�elle apporte une r�ponse � une sortie de crise au Mali, que l�Alg�rie a pr�n�e, d�s le d�but des �v�nements dans ce pays, plus exactement depuis le 20 mars 2012, lors de la r�union au niveau minist�riel du Conseil de paix et de s�curit� de l�Union africaine, tenue � Bamako, soit avant m�me le coup d�Etat. Cette position a �t� r�affirm�e lors des r�unions de la C�d�ao, auxquelles l�Alg�rie a �t� invit�e, expliqu�e aux autorit�s maliennes, � nos partenaires des pays du champ, � l�Union africaine, aux Nations Unies ainsi qu�� d�autres acteurs-cl�s dans la r�gion. �Une solution politique inclusive qui doit impliquer toutes les populations du Nord du Mali, o� il n�y a pas que des Touareg� Pour tenter de comprendre, quelle est, au juste, cette position que l�Alg�rie, dites-vous, d�fend avec coh�rence et constance depuis des mois ? Elle est cadr�e par des principes, des objectifs, une logique et un mode op�ratoire. Nous l�avons d�clin�e en six points � la r�union extraordinaire de la C�d�ao le 26 avril 2012 � Abidjan (C�te-d�Ivoire). En r�sum�, il s�agit de pr�server l�int�grit� territoriale du Mali, que nous consid�rons comme un �l�ment non n�gociable, de prendre en charge les revendications l�gitimes des populations du Nord dans le cadre d�un dialogue entre les Maliens, et de poursuivre la lutte contre le terrorisme et le crime transnational organis�. A cette fin, l�Alg�rie s�attelle � favoriser l��mergence des conditions favorables � un dialogue, entre le gouvernement malien et les groupes de la r�bellion arm�e qui renoncent donc � toute remise en cause de l�int�grit� territoriale du Mali et qui se d�marquent, sans �quivoque, du terrorisme et du crime transnational organis�. Ce dialogue doit �tre naturellement cr�dible pour assurer une solution politique durable, comme il doit �tre men� avec c�l�rit� pour �viter l�enlisement de la situation. Les �volutions r�centes des groupes rebelles MNLA et Ansar Dine, par rapport � leurs revendications initiales ou � leur positionnement � l��gard du terrorisme et du crime transnational organis�, entrent dans le cadre de ce processus. Sur un autre plan, il est n�cessaire que les autorit�s de la transition au Mali soient unies, et que le gouvernement soit fort et repr�sentatif, afin de pouvoir engager l�Etat malien dans tout dialogue. L�annonce des prochaines assises nationales au Mali, � la fin de ce mois, pour, notamment, mettre en place une commission nationale de n�gociation et pour d�gager une feuille de route, qui m�nera � des �lections g�n�rales, constitue assur�ment une bonne nouvelle et une avanc�e significative vers la solution politique n�goci�e. Il me reste � ajouter que toute solution politique doit �tre inclusive et impliquer toutes les populations du Nord du Mali, o� il n�y a pas que des Touareg. L�Alg�rie reste-t-elle toujours oppos�e � une intervention arm�e au Mali ? L�intervention arm�e reste un recours ultime apr�s l��puisement de toutes les voies du dialogue, ce qui n�est pas encore le cas. L�Alg�rie pr�ne une approche globale pour une solution, qui, pour qu�elle soit durable, doit proc�der d�une bonne analyse de la situation et d�un diagnostic juste. Nous voulons �viter la r��dition de l�exemple de la crise libyenne lorsque nous avons attir� l�attention sur ses cons�quences sur la s�curit� et la stabilit� r�gionales. Aujourd�hui, tout le monde reconna�t que nous avions raison, mais le mal est fait et nous devons y r�pondre. C�est la m�me d�marche et le m�me sens des responsabilit�s qui nous animent aujourd�hui. On peut savoir quand commence une guerre, mais jamais quand et surtout comment elle se termine. C�est pour cela que nous expliquons � nos partenaires que toute intervention arm�e doit �tre conduite avec une d�finition rigoureuse des objectifs recherch�s, des cibles ennemies, des moyens requis, des r�gles d�engagement, et naturellement des co�ts, pour qu�elle soit entour�e des chances de succ�s, comme l�a exig� le Conseil de s�curit�. Il est �vident que toute intervention arm�e doit �tre conduite avec discernement, cibler les v�ritables menaces que sont le terrorisme et le crime transnational organis�. Ces menaces de nature globale ne concernent pas uniquement le Mali ou la sous-r�gion, mais la communaut� internationale dans son ensemble et appellent une coop�ration internationale pour leur �radication, y compris par le recours � la force, conform�ment d�ailleurs � la strat�gie des Nations Unies de lutte contre le terrorisme. Aujourd�hui et au vu du d�veloppement de la situation dans la r�gion, consid�rez-vous avoir r�ussi dans la gestion diplomatique de ce dossier ? Je veux relever dans ce cadre qu�il a �t� dit par certains, au gr� des �v�nements, que la d�marche de l�Alg�rie pour une solution politique n�goci�e est de plus en plus soutenue, l�assimilant � une victoire. Il a �t� �galement soutenu, toujours au gr� des �v�nements, que l�option militaire au Mali se pr�cise, l�assimilant � une d�faite de la diplomatie alg�rienne. Il ne s�agit pas de cela. Ce dont il s�agit, c�est de contribuer � apporter la bonne solution � une situation complexe et grave dans un pays voisin, en tenant compte des nos int�r�ts de s�curit� et ceux de notre r�gion. La seule victoire pour l�Alg�rie, le Mali, la r�gion et la communaut� internationale, est de voir le Mali uni dans ses fronti�res, d�barrass� des fl�aux du terrorisme et du crime transnational organis� et o� les Maliens exercent pleinement leur citoyennet�. Les chefs d��tats-majors de la C�d�ao se sont prononc�s sur le �concept d�op�rations � de la reconqu�te du Nord du Mali mis au point � Bamako par les experts internationaux, africains et occidentaux : composition de la force d�intervention ; niveau de participation des pays de la C�d�ao, financement et moyens militaires dont elle devrait disposer. En fait, il s�agit du plan de reconqu�te du Mali demand� par le Conseil de s�curit� de l�ONU et qui devra lui �tre pr�sent� le 28 novembre prochain, apr�s son adoption par l�Union africaine. Quel est votre positionnement quant � ce plan auquel des experts alg�riens ont pris part ? Pr�sence dans la force d�intervention ? Aide logistique par la mise � disposition d�armes ou de terrains de d�ploiement ? J�ai indiqu� dans ma pr�c�dente r�ponse la position de l�Alg�rie sur les conditions d�une conduite de toute intervention arm�e. Notre participation, en qualit� d�observateur, � la r�union de Bamako sur le concept d�op�rations militaires de la C�d�ao participe d�abord de la coordination que nous menons avec cette organisation, qui est un acteur important dans la crise malienne, ensuite de l�int�r�t que nous portons � toutes les initiatives qui concernent le Mali, et enfin de la demande faite aussi bien par le Conseil de s�curit� des Nations Unies que par le Conseil de paix et de s�curit� de l�Union africaine, d�avoir une concertation permanente avec notre pays, en tant que pays voisin. Dans le contexte actuel, l�Alg�rie, aussi bien que le Niger et la Mauritanie, travaillent � renforcer la s�curisation de leurs fronti�res. Il s�agit d�une t�che tr�s difficile qui n�cessite des moyens cons�quents. Je veux pr�ciser ici que la s�curisation des fronti�res ne signifie pas leur fermeture automatique. Je vous renouvelle encore ma question en vous la pr�cisant : s�il restait seulement les deux mouvements terroristes, le Mujao et Aqmi, sur le terrain et que le Conseil de s�curit� venait � d�cider d�une intervention arm�e, l�Alg�rie interviendrait- elle militairement ? �L�intervention militaire de l�Alg�rie n�est pas � l�ordre du jour� L�intervention militaire de l�Alg�rie n�est pas � l�ordre du jour. Maintenant que le Mali soit accompagn�, nous n�avons pas attendu pour le faire, notamment dans sa lutte contre le terrorisme en s�curisant les fronti�res, en participant � la s�curisation des institutions et �tablissements � Bamako, en renfor�ant les capacit�s de l�arm�e malienne, en partageant le renseignement et en fournissant des �quipements en fonction de nos moyens : voil� la logique de notre contribution � la lutte contre le terrorisme. Ceci proc�de d�engagements bilat�raux et de mise en �uvre des r�solutions 2056 et 2071 du Conseil de s�curit� de l�ONU. Quel r�le joue aujourd�hui le Comit� d��tat-major op�rationnel conjoint, Cemoc, regroupant l�Alg�rie, le Mali, le Niger et la Mauritanie et a-t-il encore un r�le � jouer ? Naturellement que le Cemoc a un r�le qu�il continuera d�assumer jusqu�� l��radication du terrorisme et du crime transnational organis� de la r�gion. C�est � cette fin qu�il a �t� cr��, au m�me tire d�ailleurs que l�Unit� Fusion et Liaison (UFL). Ces deux m�canismes, comme vous le savez, font partie de la strat�gie r�gionale mise en place entre les pays du champ. En plus de la concertation sous-r�gionale au plan politique, ces deux m�canismes visent � assurer une coordination aux plans militaire et s�curitaire pour la s�curisation par chaque pays de ses propres fronti�res. Des critiques ont �t� port�es sur l�efficacit� de ce m�canisme et son utilit�... Des commentaires ont �t� effectivement faits sur la pertinence de la strat�gie r�gionale mise en place entre les pays du champ, et sur l�efficacit� du Cemoc. Le bilan que nous faisons de la mise en �uvre de cette strat�gie est positif. Je crois, par ailleurs, qu�il ne faut pas exiger du Cemoc de r�aliser, en quelques ann�es, dans des conditions difficiles, ce que d�autres organismes similaires ont mis des d�cennies � parachever, en termes de commandement, d�interop�rabilit�, de planification et de conduite des op�rations. Nous n�avons donc pas attendu l��clatement de la crise au Mali et ses r�percussions sur la stabilit� et la s�curit� r�gionales, pour nous engager dans la lutte contre le terrorisme et le crime organis�. Toute l�architecture que nous avons mise en place ob�issait � cet imp�ratif. Au-del� de l�expression de positions politiques, que fait concr�tement l�Alg�rie pour aider le Mali ? Je crois que la contribution la plus pr�cieuse reste le travail effectu� pour favoriser l��mergence et la consolidation d�un consensus international sur la crise au Mali. Il s�agit, selon nous, d�une condition essentielle pour toute conduite viable d�une solution, car ce consensus est de nature � d�gager un m�me agenda qui lie et engage la communaut� internationale et l�ensemble des acteurs. Cet agenda, consacr� maintenant par le Conseil de s�curit� des Nations Unies et par le Conseil de paix et de s�curit� de l�Union africaine, reste la pr�servation de l�unit� nationale et de l�int�grit� du Mali et la poursuite de la lutte contre le terrorisme et le crime transnational organis�. Il ne saurait y avoir d�autres agendas ou encore moins d�agendas cach�s. �5 800 tonnes de mat�riel et 10 millions de $ pour aider le gouvernement malien � conduire une transition de mani�re apais�e� Et plus concr�tement ? Sur le plan bilat�ral, l�Alg�rie apporte, en fonction de ses moyens, une aide au Mali, avec lequel nous partageons, ne l�oublions pas, non seulement une longue fronti�re, mais, �galement, une histoire et une culture communes. Cette aide concerne d�abord le volet humanitaire qui constitue une urgence. L�Alg�rie a achemin� par ses propres moyens, depuis le d�but de la crise, une aide de 5 800 tonnes qui a b�n�fici� aux r�fugi�s maliens en Mauritanie, au Niger et au Burkina Faso, ainsi qu�aux personnes d�plac�es dans le sud du Mali. Notre aide concerne ensuite l�arm�e malienne dans les domaines de la formation, du renforcement des capacit�s, de la fourniture d��quipements et de l��change du renseignement. Cette aide, je dois le pr�ciser, s�inscrit dans la continuit� de nos efforts pour accro�tre les capacit�s des pays de la r�gion � lutter contre le terrorisme et le crime organis�. Notre aide concerne enfin le volet financier, avec une contribution directe de dix millions de dollars am�ricains, pour aider le gouvernement malien � conduire la transition de mani�re plus apais�e. La finalit� de cette aide et de cet appui, qui appellent au demeurant le concours de la communaut� internationale, consiste � renforcer le leadership des Maliens et � conf�rer une centralit� r�elle et effective � leur r�le dans toute sortie de crise. Je veux souligner, � cet �gard, que l�ensemble de ces aides s�inscrit dans le cadre des r�solutions 2056 et 2071 du Conseil de s�curit� des Nations Unies, relatives � la situation au Mali, qui ont demand� aux Etats membres � appuyer le Mali dans cette phase de transition. Poursuivant dans sa strat�gie de �solution politique dans la r�gion�, l�Alg�rie a n�goci� avec le groupe Ansar Dine, un groupe islamiste arm�, install� au Nord du Mali depuis avril 2012 avec les terroristes d�Al Qa�da au Maghreb et le Mujao (Mouvement pour l�unicit� et le jihad). Ce groupe vient de d�clarer qu�il rejetait toute forme de terrorisme et que, par ailleurs, il s�engageait � lutter contre la criminalit� transfrontali�re organis�e. Est-ce cr�dible, venant d�un groupe islamiste arm� et qui a pour projet l�instauration de la Charia � laquelle il ne semble pas renoncer comme il ne semble pas renoncer � ses acolytes d�Al Qa�da au Maghreb ? �L�Alg�rie a toujours �uvr� pour parvenir � d�coupler les groupes touareg porteurs de revendications politiques l�gitimes des groupes terroristes et autres li�s au crime organis� D�abord, l�Alg�rie ne n�gocie pas avec les acteurs internes au Mali. Ils doivent n�gocier entre eux. La solution doit �tre malienne. C�est ce que nous appelons l�appropriation par les Maliens de leur destin. Personne ne peut d�cider � la place d�une Nation de son projet national ou de son avenir. Ce que nous faisons consiste, comme je l�ai dit, � cr�er les conditions favorables � une n�gociation r�ussie et cr�dible entre les Maliens. S�agissant plus pr�cis�ment du groupe Ansar Dine, vous devez savoir qu�il est constitu� de Maliens, de Touareg maliens pr�cis�ment, qui ont pris les armes pour faire valoir leurs revendications. Il s�agissait d�amener ce groupe � renoncer, d�une part, � la violence au profit de la n�gociation, comme moyen de revendication, et de se d�marquer, d�autre part, des groupes terroristes et ceux affili�s au crime transnational organis�, que sont Aqmi et le Mujao. Vous avez lu la d�claration de ce groupe et certainement relev� les r�actions qu�elle a suscit�es au Mali et en dehors du Mali. Le processus de la solution politique n�goci�e est en cours. S�agissant de l�application de la Charia, revendiqu�e par le groupe Ansar Dine, ou la la�cit� pr�n�e par la C�d�ao, il faut avoir � l�esprit que toute composante d�une soci�t� a le droit de revendiquer un projet de soci�t�, naturellement par des moyens non violents. La r�ponse � cette revendication sera apport�e dans le cadre du dialogue entre les Maliens. N�est-ce pas la perspective de plus en plus proche d�une intervention militaire qui a conduit � des d�clarations pour le moins inattendues d�Ansar Dine ? La d�claration d�Ansar Dine est l�. Il faut en prendre acte. Il nous faut composer avec une r�alit� suffisamment complexe. Ne compliquons donc pas encore les donn�es en nous fourvoyant dans les m�andres des tentatives d�explication des intentions des uns et des autres. L�Alg�rie, pour ce qui la concerne, a toujours �uvr� pour parvenir � d�coupler les groupes touareg porteurs de revendications politiques l�gitimes des groupes terroristes et autres li�s au crime organis�. Aujourd�hui, le groupe Ansar Dine qui s�est d�marqu� de l�extr�misme et du terrorisme au m�me titre que le MNLA qui a remis� ses vell�it�s ind�pendantistes sont �ligibles � devenir acteurs dans la recherche d�une solution politique � la crise qui secoue le pays. La patience et la pers�v�rance ont pay� et les d�cantations politiques s�op�rent. On parle d�une strat�gie des Nations Unies pour le Sahel. Cette initiative emporte-t-elle l�adh�sion de l�Alg�rie ? Absolument. L�Alg�rie a marqu� sa disponibilit� � coop�rer avec les Nations Unies pour l��laboration et la mise en �uvre de cette strat�gie, dont est charg� Monsieur Romano Prodi, Repr�sentant sp�cial du Secr�taire G�n�ral des Nations Unies pour le Sahel, qui a effectu� r�cemment une visite dans notre pays. Et l� aussi, je reviens � la constance et � la coh�rence de la d�marche de l�Alg�rie. Vous vous rappelez sans doute que notre pays a organis�, en septembre 2011, une conf�rence de haut niveau sur le partenariat, la s�curit� et le d�veloppement, qui a mobilis� les partenaires en faveur de la r�gion et qui a d�gag� des principes structurants du partenariat recherch�, notamment l�appropriation des pays de la r�gion de la stabilit� et de la s�curit� r�gionales, la compl�mentarit� des strat�gies et approches existantes pour le Sahel et l�indivisibilit� des dimensions de la s�curit� et du d�veloppement. Cette conf�rence, qui a connu une participation massive et de haut rang des partenaires invit�s, a �t� le premier exercice multilat�ral sur le partenariat dans la r�gion du Sahel. La strat�gie des Nations Unies, en cours d��laboration, s�inscrit dans la m�me logique et proc�de du m�me esprit que la Conf�rence d�Alger, tant au niveau du concept qu�au niveau de la d�marche. Que deviennent les diplomates otages alg�riens du Mujao sur lesquels les rumeurs les plus alarmantes ont circul� sans que le silence radio observ� par les autorit�s alg�riennes soit rompu ? Le sort des otages alg�riens demeure au centre de nos pr�occupations et mobilise les appareils de l�Etat en permanence. Je ne peux pas vous en dire plus pour des imp�ratifs de discr�tion, que vous comprendrez ais�ment. �La question du Sahara occidental est un probl�me de d�colonisation qui rel�ve de la responsabilit� de l�ONU� Christopher Ross, l�envoy� personnel du Secr�taire G�n�ral des Nations Unies, a repris son b�ton de p�lerin qui l�a men� au Maroc, dans les territoires sahraouis, en Mauritanie, dans les camps de r�fugi�s � Tindouf et enfin en Alg�rie. Une premi�re interrogation se pose : comment l��missaire de l�ONU, qui avait �t� d�savou� par Rabat en mai dernier � le roi du Maroc consid�rant alors qu�il n�exer�ait pas objectivement sa mission � fait son retour sur cette sc�ne, sans qu�on rel�ve des protestations du royaume marocain ? Il me semble que les autorit�s marocaines sont mieux plac�es pour r�pondre � cette question. Certains commentateurs consid�rent que ce retour, en pleines tractations fran�aises et am�ricaines tendant � faire impliquer Alger dans l�intervention militaire au Mali, aurait �t� consenti en contrepartie de promesses faites au Maroc d�un r�glement de ce conflit, apr�s l�intervention projet�e au Mali, sur la base du plan d�autonomie que le monarque a propos�. Simples �lucubrations de commentateurs ou compromis av�r� ? La question du Sahara occidental est un probl�me de d�colonisation qui rel�ve de la responsabilit� de l�ONU. Le Sahara occidental est, depuis 1965, inscrit sur la liste des 16 territoires non autonomes tenue par le Comit� de d�colonisation des Nations Unies et, donc, �ligible � l�application de la r�solution 1514 de l�Assembl�e g�n�rale de l�ONU portant D�claration sur l�octroi de l�ind�pendance aux pays et peuples coloniaux. De ce fait, le probl�me n�a rien � voir avec la situation qui pr�vaut actuellement dans la r�gion du Sahel et, plus pr�cis�ment, au Mali. Vous n��tes pas sans savoir que, comme l�Alg�rie, la communaut� internationale, ainsi que l�ONU, par le biais de son Secr�taire G�n�ral, n�ont pas cess� de r�affirmer leur soutien � M. Christopher Ross dans l�accomplissement de son mandat. A l�issue de sa tourn�e dans la r�gion et de ses entretiens � Alger, notamment avec le pr�sident de la R�publique et vous-m�me, l�envoy� personnel de Ban Ki-moon a parl� �d��chec des n�gociations Maroc-Front Polisario� d��absence de progr�s notable�, �voquant m�me �l�impasse dans laquelle se trouve la question du Sahara occidental�. Quelles seraient, selon vous, les propositions que ferait Ross dans son rapport au Secr�taire G�n�ral de l�ONU ? M. Ross n�a fait que r�p�ter ce que le Secr�taire G�n�ral de l�ONU a constat� dans ses diff�rents rapports au Conseil de s�curit�. Il faut reconna�tre que la s�rie de rencontres informelles que M. Ross a initi�e, en 2009, pour pr�parer la reprise du 5e round des n�gociations, entre le Maroc et le Front Polisario, n�a rien donn� de palpable et les causes de ce blocage sont clairement identifi�es. La tourn�e que l�envoy� personnel du SG/ ONU vient d�effectuer dans la r�gion donnera, effectivement, lieu � un briefing du Conseil de s�curit�, pr�vu pour le 28 novembre 2012. Les id�es que M. Ross aurait � partager, � cette occasion, avec les membres du Conseil de s�curit� ne s��carteront certainement pas du respect de la l�galit� internationale et du droit du peuple du Sahara occidental � d�cider librement de son sort et du statut final de son territoire, dans le cadre de l�application du principe de l�autod�termination. �La relance effective et ordonn�e de l�UMA est une n�cessit�. L�UMA doit �tre repens�e, int�grer les changements intervenus dans la r�gion et adapter, en cons�quence, ses m�thodes et outils de travail� O� en est-on dans le projet de l�Union du Maghreb arabe (UMA) qui semble enterr� dans son fonctionnement au sommet, alors que, paradoxalement, des commissions techniques et parfois m�me certaines non techniques, continuent � fonctionner ? Peut-on penser reprendre cette institution avec les bouleversements qu�a connus la r�gion : Libye, Tunisie ? Comme vous l�avez si bien relev�, l�UMA, en d�pit de l�absence de rencontres au sommet, continue de fonctionner au niveau des organes subsidiaires et techniques. Ce qui peut �tre consid�r�, en soi, comme un gain. Ces r�unions techniques permettent, en effet, � nos pays de continuer � entretenir leur coop�ration dans les diff�rents secteurs de l�activit� �conomique, sociale et culturelle. Il demeure entendu que la relance du processus d��dification de cette institution est tributaire outre la volont� politique sinc�re de l�ensemble des pays maghr�bins, d�une d�marche pragmatique qui valorise et les int�r�ts communs et les avantages mutuels partag�s. Dans ce cadre, l�Alg�rie, pour qui l��dification de l�Union du Maghreb arabe est un objectif constant de sa politique �trang�re, a pris l�initiative de proposer la d�finition et la mise en �uvre de politiques communes dans des domaines aussi vari�s que la gestion de l�eau, les infrastructures, l�agriculture ou la formation afin de favoriser l�int�gration entre nos pays et, ce faisant, parvenir � la mise en place d�une communaut� �conomique maghr�bine, socle de notre union projet�e. Notre pays ne s�est pas content� simplement de proposer mais il a inscrit ses propres plans d�investissements dans le domaine des infrastructures dans cette perspective maghr�bine, comme en t�moignent l�autoroute Est-Ouest qui va des fronti�res occidentales aux fronti�res orientales, les gazoducs qui alimentent des pays europ�ens et qui transitent par le Maroc et la Tunisie ou encore les projets d�infrastructures routi�res qui traverseront le Sud alg�rien, des fronti�res avec la Libye jusqu�aux fronti�res avec la Mauritanie. La construction de l�Union du Maghreb est au prix de ce pragmatisme dans l�action et la coh�rence dans la d�finition des objectifs d��tapes. Cela dit, les bouleversements que la r�gion a connus ces deux derni�res ann�es ne constituent nullement un obstacle � l��dification maghr�bine. L�Alg�rie met-elle des conditions particuli�res � la reprise de I�UMA et si elles existent, quelles seraient-elles ? Nous estimons que la relance effective et ordonn�e de l�UMA est une n�cessit�. L�Union doit �tre repens�e et int�grer les changements intervenus dans la r�gion et adapter, en cons�quence, ses m�thodes et outils de travail. Cette relance doit naturellement r�pondre aux int�r�ts bien compris de toutes les parties, et continuer de v�hiculer en permanence l�ambition des peuples du Maghreb de r�aliser l�Union, voulue par les g�n�rations de la lutte de Lib�ration nationale. Actuellement, l�Alg�rie travaille avec ses partenaires de l�Union � la pr�paration des conditions de r�ussite d�un sommet, au moment o� les r�unions minist�rielles sectorielles et techniques se poursuivent. �L�Alg�rie souscrit, bien entendu, � la nouvelle orientation de l�UpM� Venons-en, si vous permettez Monsieur le Ministre, � l�Union pour la M�diterran�e (UpM). L�Alg�rie a-t-elle une strat�gie qui situe sa position quant � ce que certains ont appel� l�usine � gaz ? Maintenant que l�initiateur de ce projet mort-n� n�est plus au pouvoir en France et que le gouvernement socialiste semble vouloir donner un nouveau contenu et une nouvelle impulsion, quelle position avons-nous sur ce dossier qui avait vu d�ailleurs une certaine caution alg�rienne par la pr�sence � Paris du Pr�sident Bouteflika lors de sa cr�ation, puis un retrait non officiellement prononc� de ses rencontres ? Depuis son lancement en juillet 2008, l�Union pour la M�diterran�e a, certes, fait face � des crises politiques qui ont mis en difficult� la mise sur pied de ses instances, mais les objectifs de ce projet d�envergure r�gionale gardent toute leur pertinence. Ces objectifs s�inspirent, dans une tr�s large mesure, des principes ayant guid� la coop�ration euro-m�diterran�enne depuis l�adoption de la D�claration de Barcelone en 1995. Le projet de l�UpM ne part donc pas du n�ant et s�appuie sur l�acquis du Processus de Barcelone, qui a �t� pr�serv� et renforc� dans le sens d�une co-appropriation effective du partenariat et d�une flexibilit� en termes de montage de projets, avec l�apport d�un Secr�tariat technique install� � Barcelone. L�Alg�rie a adh�r� tout naturellement � l�UpM et, � l�instar de l�ensemble des partenaires du Sud et du Nord, a apport� sa contribution � la mise en place de son nouveau cadre institutionnel. Elle a d�fendu, notamment, le principe d�un secr�tariat dont le mandat est orient� vers la promotion de projets concrets afin de l��pargner des effets des p�rip�ties politiques dans la r�gion, notamment le conflit isra�lo-arabe qui reste � nos yeux une question centrale du partenariat euro-m�diterran�en. En outre, l�Alg�rie a d�fendu, et obtenu, le principe de la �g�om�trie variable� qui permet de d�velopper des projets entre un nombre restreint de partenaires dans des domaines de partenariat sp�cifiques. Ce principe est de nature � encourager les synergies avec les autres formes de coop�ration existantes dans la r�gion, notamment le 5+5, un cadre informel, plus restreint et souple, qui a investi ces derni�res ann�es, avec l�apport de l�Alg�rie, de nouveaux secteurs d�activit� tels que l�environnement, les �nergies renouvelables et la s�curit� alimentaire. S�agissant de l�aspect op�rationnel de l�UpM, � ce jour, les pays membres ont octroy� le label UpM � onze projets, ce qui permet au secr�tariat d�engager, en collaboration avec les initiateurs des projets et les institutions r�gionales, notamment de l�Union europ�enne, un travail de maturation, de promotion et de prospection de financement. Le plan solaire m�diterran�en, la station de dessalement d�eau de mer de Ghaza, l�Universit� euro-m�diterran�enne sont autant d�exemples qui refl�tent la nouvelle orientation de l�UpM � laquelle l�Alg�rie souscrit, bien entendu.