�J�ai allum� mon corps pour le voir vivre�, une phrase qui n�en finit pas de r�sonner dans les esprits apr�s la fin du monologue End/Ign�, un texte de Mustapha Benfodil, mis en sc�ne par Kheiredine Lardjam, pr�sent� ce jeudi � l�Institut fran�ais d�Oran. Un texte � qui l�on reconna�t une profondeur remarquable qui synth�tise les actes d�immolation, la corruption, la censure� un texte �crit en fran�ais et adapt� th��tralement et interpr�t� par Azzedine Benamara, qui l�a pr�sent� avec une performance captivante, tant les mots sont forts de sens et souvent crus et touchants. Le d�cor plonge le spectateur tout de suite dans l�ambiance glaciale et morbide de la morgue, avec un personnage attachant, celui de �Moussa, pr�pos� � la morgue de l'h�pital de Balbala, petite bourgade rong�e par l'ennui, les rats et les moustiques. Moussa est surtout le laveur de morts attitr� de Balbala. Sa vie, son �uvre se r�sument aux dizaines de corps dont il a assur� soigneusement la toilette mortuaire, s'�vertuant � rendre un peu de leur dignit� aux cadavres d�chiquet�s par les chiens enrag�s, les accidents de la vie et la violence ordinaire. Un jour, Moussa r�ceptionne le corps calcin� d'un homme sans visage. Un homme dont le visage a �t� enti�rement carbonis�. Dans un geste extr�me, il s'est immol� par le feu sur la place publique. Il s'av�re que cet homme a un nom : Aziz, surnomm� �Tchaklala�. Moussa le connaissait parfaitement�. (synopsis). Dans ce monologue, Moussa essaie de comprendre le geste fatal de son ami � partir de fragments �pars de son histoire tourment�e. Il tente � travers son monologue de pratiquer une sorte d�autopsie de ce village de Belbala qui croule sous le poids de la mis�re et la torpeur. Dans une note de l�auteur, ce dernier explique que �la construction du texte est dict�e par cette obsession de ��ne pas copier le r�el��, de ne pas le transposer brutalement sur sc�ne. Un imp�ratif d�autant plus pr�gnant qu�en jouant avec le feu (au propre comme au figur�), certaines voix ne manqueront pas de crier � la r�cup�ration. A fortiori quand on sait que c�est par un immol�, Mohamed El Bouazizi, que les insurrections arabes sont arriv�es�. A travers son texte, les End/Ign�, l�auteur tente une sorte d�autopsie. �Pas l�autopsie du corps social, dit-il, juste celle d�un corps qui a mal.� Pour le metteur en sc�ne, �affronter le feu plut�t que vivre en enfer, une revendication des jeunes en Alg�rie, constitue le premier message pass� par l�immolation : celui qui s�adonne � un tel acte ne peut plus supporter les conditions extr�mes dans lesquelles il vit. Dans le cas de l�immolation par le feu, l�acte est public. Il d�signe en soi la soci�t� comme responsable. C�est vraiment un ��j�accuse��, un acte de protestation publique. C�est la fa�on la plus voyante de protester quand on ne peut ni parler ni �tre entendu. C�est le cri des opprim�s de toutes natures. Et c�est cette parole que je souhaite questionner au th��tre. Pour cela, j�ai d�cid� de faire une commande d��criture � Mustapha Benfodil. Auteur de th��tre, romancier mais journaliste aussi. Raconter l�histoire de ces jeunes au th��tre est une autre mani�re de leur donner la parole sur une autre place publique : la sc�ne�. Apr�s cette premi�re donn�e � Oran, le metteur en sc�ne compte apporter d�autres arrangements au monologue End/Ign�, qui devra entamer prochainement une tourn�e dans plusieurs pays, afin que la parole �soit donn�e� aux immol�s, aux opprim�s, qui n�ont eu que le feu comme dernier �mot� apr�s avoir perdu tout espoir de jours meilleurs.