Depuis 1962, l�Alg�rie est en chantier, subissant des bouleversements morphologiques d�une grande ampleur, � tel point qu�elle est une exp�rience sociologique grandeur nature. La soci�t� est en pleine restructuration, soumise au processus de formation de classes sociales, formation devenue manifeste depuis que le r�gime a abandonn� l�utopie de l��conomie administr�e. Pour un sociologue, un �conomiste, un politologue, l�Alg�rie est un terrain de recherche id�al qui attend les paradigmes d�analyse pour cerner conceptuellement cette exp�rience tr�s riche. Les sciences sociales, comme nous le savons, n��mettent pas de jugements, positifs ou n�gatifs ; elles essaient cependant de reconstituer les logiques des processus, leurs contradictions par rapport aux repr�sentations des acteurs. J�utiliserais toutefois le mot ��chec� pour le r�gime qui avait promis, d�s les ann�es 1960, de d�velopper l��conomie et de moderniser la culture. L�Alg�rie n�est pas, en 2012, un pays d�velopp�, et sa culture est encore d�chir�e entre des aspirations modernistes utopiques et une apologie du pass� sans aucune conscience historique. Ma communication sera globale, forc�ment sch�matique puisqu�elle touche � la sph�re marchande, aux transformations sociologiques et aux rapports d�autorit� depuis l�accession � l�ind�pendance. L�hypoth�se principale est que le r�gime alg�rien, issu du mouvement national, est l�expression d�une aspiration contradictoire qui le mine et qui l�a men� � se couper de la population. Pour les �lites dirigeantes, la modernit�, saisie principalement � travers son aspect mat�riel, est un moyen pour restaurer la tradition pass�e. Cette contradiction s�exprime clairement dans la pratique de l�administration qui s�oppose � la formation d�un march� national int�gr�, � l��mergence d�une soci�t� compos�e d�individus sujets de droit et � la construction d�un Etat dont la l�gitimit� provient de la volont� des �lecteurs. Le populisme contre l��conomie politique Lorsque le nouvel Etat fut cr�� en 1962, le r�gime avait promis le d�veloppement �conomique et la justice sociale, promesse servant aussi de source de l�gitimit� aux dirigeants qui se r�clamaient de l�h�ritage du mouvement national. M�me si le d�veloppement �conomique n�a pas �t� r�alis�, nous devons convenir que l�engagement avait �t� pris et que des politiques publiques en faveur de la population avaient �t� mises en �uvre pour moderniser le pays. Un seul chiffre suffira � attester de cette farouche volont� de se moderniser : depuis 1967, l�Alg�rie a un des taux d�investissement les plus �lev�s au monde par rapport au PIB. Pourtant, il y a un �chec patent dans la construction d�une �conomie productive satisfaisant les besoins du march� national. Les exportations sont assur�es aujourd�hui � 97% par les hydrocarbures ! L�Alg�rie n�exporte pas de produits manufactur�s parce que les politiques �conomiques suivies � ce jour n�ont jamais eu pour objectif strat�gique de construire un march� national r�gul� par les lois de l��conomie politique pour affronter la concurrence internationale. Il y a comme une confusion dans l�esprit des dirigeants entre ind�pendance politique et ind�pendance �conomique, comprenant celle-ci comme une sorte de syst�me autosuffisant �conomiquement. Or, l�ind�pendance �conomique ne signifie ni autarcie ni retrait de l��conomie internationale, elle signifie plut�t un flux d��changes avec une balance commerciale ext�rieure �quilibr�e ou positive sur la base d�exportations de biens manufactur�s. Il n�est pas possible de se retirer du march� mondial ; il faudrait soit exporter du travail pour financer les importations, soit �tre d�pendant et vivre de l�aide internationale. Je n�ai pas une foi aveugle dans le march� comme les n�olib�raux du Consensus de Washington, mais il faut cependant admettre que le march� est une construction historique qui favorise la cr�ation des richesses si, par ailleurs, il y a un cadre juridique o� la r�partition ob�it � la rationalit� contenue dans les concepts de salaire, profit, taux d�int�r�t, productivit� marginale du capital, etc. Ces concepts de la science �conomique sont inop�rants en Alg�rie alors qu�il y a des biens qui sont produits, il y a des prix, il y a une monnaie, il y a une accumulation de richesses. Cette activit� marchande rel�ve cependant de l�anthropologie �conomique et non de la science �conomique enseign�e dans les universit�s. Ou pour le dire autrement, la logique dominant la sph�re des biens et services en Alg�rie renvoie � une probl�matique physiocratique pr�-ricardienne. Il ne faut pas confondre l��conomie politique du capitalisme fond� sur la cr�ation de la valeur par la force de travail avec la science des richesses provenant de l�agriculture et mati�res premi�res et r�parties par le m�canisme de la rente. L�objet de l��conomie politique porte sur la valeur produite dans le cadre du march� qui soumet la production � la concurrence par le biais d�un syst�me de prix allocataire de ressources rares. Port� par la dynamique de la concurrence, le syst�me de prix Walrasien ajuste l�offre � la demande en s�inscrivant dans la tendance de la baisse de la productivit� marginale des facteurs de production. Or, en Alg�rie, non seulement il n�y a pas de concurrence en raison d�un important secteur �conomique d�Etat, mais l�Etat est le principal entrepreneur avec cette particularit� qu�il n�est pas soumis � la contrainte financi�re. Il se soustrait � celle-ci gr�ce aux revenus tir�s de l�exportation des hydrocarbures, mais aussi gr�ce � la manipulation de la parit� de la monnaie qui lui permet de combler le d�ficit de son budget et le d�ficit chronique des ses entreprises, en �cumant le pouvoir d�achat des revenus fixes. En injectant des sommes mon�taires importantes sans contrepartie de production physique, l�Etat perturbe le syst�me des prix, c�est-�- dire le rapport entre le salaire et le co�t de la vie. Le salaire n�assure pas la reproduction de la force de travail, ce qui d�tourne les jeunes des emplois � revenus fixes. Sans contrainte financi�re, sans raret� des capitaux mon�taires, il n�y a pas de n�cessit� de rationaliser le proc�s de travail sur les crit�res de la concurrence internationale. Les hydrocarbures et la manipulation de la parit� du dinar ont permis � l�Etat-entrepreneur de se dispenser de la rationalit� �conomique et de se soustraire aux pressions du march�. Par ailleurs, depuis le d�but des ann�es 2000, le gouvernement a lanc� une politique ambitieuse d�investissements dans la construction de milliers de logements, d�autoroutes, de barrages et diff�rentes infrastructures� Ce programme �tal� sur plus de dix ans a co�t� des centaines de milliards de dollars et a �t� r�alis� en majorit� par des entreprises �trang�res. En n�gligeant les entreprises nationales ou en ne les associant pas � ces investissements, l�Etat a rat� une occasion d�aider � la formation d�une offre nationale qui aurait eu une opportunit� de s�agrandir en affrontant la concurrence internationale. De ce point de vue, non seulement l�Etat n�a pas de politique pour la formation d�un march� national avec une offre locale, mais il s��rige en obstacle � la naissance d�activit�s productives �touff�es par les biens import�s. Il y a l� toute une �conomie de march�s publics contract�s avec des entreprises �trang�res pr�tes � verser des commissions occultes � des personnages importants de l�Etat. La comp�tition pour la captation de la rente �nerg�tique trouve parfois des �chos dans la presse nationale qui fait �tat de d�tournement de fonds. Les scandales de la r�alisation de l�autoroute Est- Ouest, de la construction d�infrastructures hydrauliques ou ceux li�s � l�importation des c�r�ales, des m�dicaments� portent sur des dizaines de milliards de dollars. Cela participe � la constitution de fortunes colossales en rapport aussi avec la sp�culation favoris�e par les r�seaux client�listes qui ont conquis l�Etat. Cette situation renvoie � la phase de l�accumulation primitive du capital, aliment�e par des pratiques commerciales � la limite de la l�galit�. La corruption, qui handicape le pouvoir d�achat des revenus fixes, se g�n�ralise dans toutes les couches de la population qui cherche � �chapper � la paup�risation. Elle est ainsi un moyen d�ascension sociale dans un pays o� le r�gime, pour acheter la paix sociale, a satisfait � des augmentations de salaires importantes, avec effets r�troactifs, dans la Fonction publique. Il a aussi mis en place une politique de cr�dit � la consommation tr�s volontariste au-del� de ce que peut absorber le march� national. Le r�sultat est la formation d�une masse mon�taire en circulation sans proportion aucune avec les capacit�s de la production nationale. Une grande partie de la demande mon�taire est satisfaite par le secteur de l�importation, chasse gard�e de privil�gi�s qui se sont appropri�s les m�canisme du commerce ext�rieur qui est d�sormais le canal de l�accumulation par excellence. Cette structure de r�partition de richesses explique que les concepts de la science �conomique ne sont pas op�ratoires dans la sph�re marchande en Alg�rie r�gul�e par la rationalit� politique et par le rapport de force au sommet de l�Etat. En effet, la source principale des richesses n�est pas le travail, mais les relations avec le personnel de l�Etat qui est aux commandes de la r�partition de la rente p�troli�re � travers les autorisations d�importations de biens, l�acc�s aux devises et la distribution de terres fonci�res urbaines et p�riurbaines. Si la science �conomique est inop�rante en Alg�rie, c�est parce que la sph�re marchande est d�sarticul�e et n�ob�it pas � ses r�gles propres. L��conomie politique a pour objet la production de la valeur, accumul�e et r�partie � travers un syst�me de prix au c�ur du march�. Celui-ci est un ensemble de techniques de production se d�roulant dans un cadre juridique qui prot�ge la concurrence et la propri�t� priv�e. Les techniques de production perdraient de leur efficacit� si elles �taient s�par�es de leur cadre juridique. Ce qui signifie qu�on ne peut pas importer des �l�ments du march� � une machine par exemple � ou s�attendre qu�ils soient rationnels par eux-m�mes. Une machine en France ou au Japon n�a pas la m�me efficacit� marginale qu�en Alg�rie pour la simple raison qu�elle n�est que l�aspect technique d�un rapport social de production qui structure l�ensemble du syst�me social dans ses aspects �conomiques bien s�r, mais aussi politiques et juridiques. Il n�est pas paradoxal de dire que sans syndicalisme libre, il n�y a pas de syst�me de machine efficace. L�efficacit� de la machine est li�e au taux d�intensit� du travail n�goci� entre les ouvriers et les entrepreneurs. Ce qui est dit de la machine peut l��tre aussi de l�argent. Dix millions de dollars est une somme d�argent en Alg�rie alors qu�en Grande- Bretagne ou en Su�de c�est un capital susceptible de cr�er de la valeur marchande. Cette pr�misse trouve sa confirmation dans la gestion quotidienne des entreprises d�Etat caract�ris�es par l�inefficacit� et le gaspillage. La bureaucratie fait porter la responsabilit� aux travailleurs qu�elle accuse de ne pas �tre productifs, alors que ces derniers ne font que s�adapter � un syst�me politiquement rentable � la bureaucratie d�Etat et aux couches renti�res. S�il est un exemple que le r�gime alg�rien est incompatible avec les lois du march�, c�est l�affaire Khalifa qui a fait perdre � l��conomie nationale des milliards de dollars sans que les responsabilit�s aient �t� �tablies par la justice. Pour fonctionner, le march� a besoin d�un environnement juridique qui prot�ge de la pr�dation le surproduit. L��conomisme consiste � croire que le march� est un ph�nom�ne a-historique et atemporel, alors qu�il est une construction historique � travers laquelle des groupes sociaux sont entr�s en conflit pour d�fendre leurs int�r�ts. Il est surtout un rapport social de production qui ne s�importe pas mais qui se construit. Il faut rappeler que l��conomie politique est une science sociale et, en tant que telle, elle a un objet historique. Ses concepts renvoient � un processus empirico-historique de formation de la valeur cr��e par le travail. C�est de l� que sont apparus les concepts de salaire, profit, taux d�int�r�t, productivit� marginale des facteurs de production (nom que donne la th�orie n�o-classique � la rente), etc., ils renvoient � une probl�matique de mesure de la valeur cr��e par des m�canismes sociaux qui avaient favoris� l��mergence de la bourgeoisie europ�enne au XVIIIe si�cle. Les concepts de l��conomie politique ont �t� con�us pour appr�hender la r�partition des richesses sur la base du rapport de force de l�ordre marchand. La critique de Marx a montr� que cette r�partition �tait injuste pour les cr�ateurs de la valeur, r�tribu�s par le salaire, mais la r�action n�o-classique a repens� l�h�ritage de Smith et Ricardo pour faire du travail non pas la source de la valeur mais un simple facteur de production parmi d�autres, soumis � la loi de la productivit� marginale. L�hypoth�se constitutive de la th�orie n�oclassique � la concurrence pure et parfaite � lib�re une dynamique tendancielle � la baisse des salaires et des profits. Dans le monde irr�el n�oclassique, en cas de concurrence pure et parfaite, le salaire et le profit pourraient �tre nuls. Dominante entre 1870 et 1930, cette approche a contribu� � la crise de 1929, ce qui l�a d�l�gitim� et pav� la voie au keyn�sianisme qui a accompagn� l�Etatprovidence en Europe jusqu�aux ann�es 1970. La crise de l�Etat-providence et la mondialisation ont cependant redonn� de la vigueur � la th�orie n�o-classique qui sert de fondement � la vague n�olib�rale dont la doctrine est contenue dans le Consensus de Washington. Le FMI, la Banque mondiale et l�OMC, ainsi que les think tanks qui leur servent de laboratoires d�id�es pr�nent le d�mant�lement tarifaire et la libre concurrence afin de prendre avantage du bas niveau des salaires dans les pays du tiers monde. L�hypoth�se est que, apr�s le d�ploiement total du capital � l��chelle internationale, le travail se rar�fiera et les salaires augmenteront dans les pays du Sud pour atteindre le niveau des pays du Nord. La th�orie n�olib�rale du Consensus de Washington a �corrig� � la th�orie n�oclassique comme celle-ci avait �corrig� la pens�e de Smith et Ricardo. Son erreur est de r�ifier les concepts et de les isoler de leur environnement sociologique et historique. L�erreur est aussi conceptuelle en g�n�ralisant les lois du march� aux biens non marchands comme la sant�, la s�curit�, l��ducation, les communications, etc., qui sont indispensables au d�veloppement �conomique. Ils constituent ce que Alfred Marshall, �conomiste anglais du d�but du XXe si�cle, appelle �les �conomies externes�. La r�ification des lois du march� consiste � mesurer celles-ci par la productivit� marginale, y compris les services de s�curit� et de sant�. L�utopie n�olib�rale a pour objectif de soumettre tous les aspects de la vie sociale aux lois du march�, y compris dans l�espace domestique o� le p�re, la m�re et les enfants ob�iraient dans leurs rapports � la rationalit� �conomique. Cette d�shumanisation, comme dirait Karl Polanyi, exprime une m�connaissance du march� qui est une organisation rationnelle de production et d��change de biens marchands r�partis � travers un syst�me de prix r�gul� par le profit et le salaire. Si l�utopie n�olib�rale m�conna�t le caract�re historique du march�, � l�autre extr�mit�, l�utopie �tatiste nie les lois du march�, y compris dans la sph�re marchande. L�exemple illustratif est l�exp�rience de l�Union sovi�tique qui a tent� de b�tir une �conomie moderne et productive en dehors des lois du march�. Les populismes du tiers monde, dont le populisme alg�rien, ont aussi �t� hostiles au march� � qui il �tait reproch� de fonctionner en favorisant les riches. Le peuple imaginaire contre la soci�t� r�elle L�Alg�rie essaye depuis 1962 de se d�velopper en dehors du march� et, ce qui est int�ressant, c�est de se demander pourquoi l�Etat refuse les lois du march� ? Si nous examinons les caract�ristiques du mouvement national et la structure id�ologico- politique du r�gime qui en est issu, nous trouverons deux raisons principales � ce refus : -1. L�id�ologie du mouvement national est populiste et n�admet pas les in�galit�s du march� ; - 2. le march� suppose des pouvoirs autonomes du pouvoir ex�cutif, notamment celui des syndicats et du patronat, ce qui conduirait � institutionnaliser les libert�s publiques auxquelles le r�gime alg�rien est hostile. Il y a donc l� des raisons id�ologiques et politiques qu�il s�agit de prendre en compte pour comprendre les motivations des politiques �conomiques men�es en Alg�rie et pour discerner leurs contradictions. Le populisme alg�rien est une utopie qui cherche � �encastrer� la dynamique �conomique dans un cadre politico-administratif qui assure la r�partition �quitable des richesses. Cette utopie s�oppose par cons�quent � la diff�renciation sociale par laquelle les activit�s sociales s�autonomisent dans des champs distincts (l��conomique, le politique, le religieux, etc.), refusant ainsi la formation d�une soci�t� au sens o� donne la sociologie � ce concept. Nous comprenons alors pourquoi le r�gime alg�rien s�oppose simultan�ment � la soci�t� et au march�. Le rejet de celui-ci trouve son prolongement dans l�hostilit� � celle-l�, per�ue comme le lieu des conflits pour les richesses et les honneurs, comme l�espace o� s�expriment des demandes sociales contradictoires et o� naissent les revendications des libert�s syndicales et du pouvoir d�achat. Elle est le foyer des in�galit�s sociales et de l�app�t du gain qui assouvit l��go�sme des puissants. Le d�sordre qu�il y a dans la soci�t� pousse au tumulte politique dont a horreur le populisme qui pr�f�re la s�r�nit� du peuple uni derri�re le chef. Il n�y a pas d�individus dans le peuple, corps homog�ne et compact qui n�a pas besoin du droit pour se reproduire. Le peuple se satisfait de peu, ce qui fait sa force ; il n�est pas port� � l�int�r�t �go�ste et montre des capacit�s de sacrifice pour d�fendre son unit� et son identit�. Il est silencieux, m�me quand il souffre, tandis que la soci�t� est vindicative m�me quand elle ne manque de rien. Depuis l�ind�pendance, l�Etat alg�rien a eu pour base sociale ce peuple imaginaire et non la soci�t� abandonn�e � elle-m�me. Le projet populiste de Boum�di�ne consistait � construire un Etat du peuple pour effacer le caract�re belliqueux de la soci�t� mat�rialiste attir�e par le bien-�tre. Boum�di�ne reprochait � la soci�t� de vouloir consommer avec ostentation et d��tre accultur�e et ne lui pardonnait pas de ne pas se d�barrasser des traces de la pr�sence fran�aise qui aurait souill� l�identit� originelle du peuple arabo-musulman. Le fondateur du r�gime alg�rien confondait modernit� et Occident, s�inscrivant dans un syncr�tisme de modernit� mat�rielle et de culture m�di�vale. Boum�di�ne, en effet, aimait importer d�Occident la technologie industrielle de pointe, mais �tait hostile aux libert�s publiques et au droit par lesquels la soci�t� civile assure l�ind�pendance de ses membres. C�est parce qu�en Alg�rie la soci�t� n�existe pas, ou elle est embryonnaire, que le peuple ne s�est pas retir� dans le discours. Le sens des perspectives historiques aurait voulu que les politiques publiques aident au retrait du peuple dans l�imaginaire des dirigeants pour catalyser le processus de construction de la soci�t�. Or le projet du r�gime alg�rien, de 1962 � nos jours, a consist� � s�opposer � la soci�t�. L. A. (*) Professeur de sociologie � l�IEP de Lyon. (A suivre)