Par Ali El Hadj Tahar [email protected] Tous les discours des autorit�s fran�aises, anglaises et am�ricaines sur la n�cessit� d�une intervention � �visage africain� et sur une intervention urgente se sont r�v�l�es n��tre qu�une couverture cynique pour pr�parer une action occidentale directe au Mali, le plus tardivement possible, lorsque les mercenaires auront compl�tement achev� leur mission. La France disait vouloir seulement jouer �un r�le de facilitateur. Pas question d'envoyer des troupes au sol�. Le pr�sident Fran�ois Hollande a m�me promis aux m�dias fran�ais qu'il y n'aurait �aucune pr�sence fran�aise sur le terrain� au Mali. Or, selon certaines sources, des troupes sp�ciales fran�aises (environ 200 hommes) �taient sur le terrain malien tout comme celles des �tats- Unis, d�j� pr�sentes au Mali par le biais de l�Africom, avec 400 militaires, et ce, bien avant l�intervention. La diplomatie disait non-ing�rence sans l�accord onusien mais les faits attestaient le contraire. Lors de la conf�rence sur le Sahel, le 27 septembre 2012, l�ex-secr�taire d�Etat �tatsunienne, Hillary Clinton, avait estim� que �seul un gouvernement d�mocratiquement �lu aura la l�gitimit� pour parvenir � une r�solution n�goci�e au nord du Mali, mettre un terme � la r�bellion et restaurer l�Etat de droit�. C�est clair, net et pr�cis. Le gouvernement int�rimaire de Bamako n�avait aucune l�gitimit� � d�fendre son pays, et l�ONU n�avait pas � l�aider. C�est le message que d�codera Ban Ki-moon ou qui lui sera signifi� en clair. Le 11 novembre 2012, les chefs d��tat et de gouvernement de la Communaut� �conomique des �tats de l�Afrique de l�Ouest (C�d�ao) ont ent�rin� un plan d�action qui d�finissait les grands axes de l�intervention militaire dans le nord du Mali afin de restaurer �le r�tablissement de l�autorit� de l��tat sur toute l��tendue du territoire�. L�Alg�rie y a particip� en qualit� d�observateur et r�it�r� sa position sur la question, soit le refus de l�intervention tant qu�existaient encore des chances d�aboutir � une solution pacifique. Le plan d�action d�cide de la cr�ation d�une force, appel�e Mission internationale de soutien au Mali, sous conduite africaine (Misma), charg�e de restaurer la souverainet� de l�Etat malien sur ses territoires. Mais Ban Ki-moon dit vouloir favoriser le dialogue politique tout en estimant qu�une intervention militaire au Mali comportait beaucoup de risques et qu�elle �tait �n�cessaire � un moment donn�, en dernier recours�. Il reporte l�intervention pour l�automne 2012 ! Une mani�re de discr�diter la Misma, en renvoyant son action aux calendes grecques. Ban Ki-moon est la voix des membres du Conseil de s�curit�, dont la France fait partie. En public, elle exigeait une intervention rapide, mais, en coulisses, elle essayait de saborder la Misma pour pouvoir agir selon son propre plan. Le pr�sident de l�Union africaine se dit d��u par ce rapport, que les Maliens trouv�rent incompr�hensible, car leurs malheurs ne faisaient qu�empirer. �L�ONU n�est pas la mieux plac�e pour r�pondre � la menace s�curitaire que cr�ent des groupes terroristes�, affirmait Ban Ki-moon. Alger a suspect� la C�d�ao d��tre un pantin de la France et refus� de marcher avec elle. Or, Paris ne visait pas l�intervention dans un cadre africain mais en solo. Le plus gros perdant dans l�affaire, c�est Alger qui s�est discr�dit� sur tous les plans, au lieu de jouer le r�le majeur qui �tait naturellement le sien. Alger esp�rait amener � la table des n�gociations le groupe Ansar Dine, un groupe de mercenaires dirig� par un opportuniste, et une autre formation tout aussi versatile, le MNLA, qu�elle croit pouvoir arracher aux tentacules fran�aises et qataries ou si vous voulez l�isoler d�Aqmi et du Mujao, ce qui revient au m�me. Mais il se r�v�lera que tous ces groupes avaient un seul et m�me but : amener le bateau n�ocolonial � bon port. Trahison des �lites et faillite des r�gimes En insistant sur le dialogue sans proposer quelque chose de plus palpable pour les Maliens, Alger a commenc� � donner l�impression de ne penser qu�� son pr� carr�, surtout quand elle a parl� de fermer ses fronti�res avec un peuple en danger qui suppliait l�envoi d�une force internationale. Jusqu�au jour o� son pr�sident sera contraint de demander � la France de voler � son secours. Pour imposer leur pr�sence, d�autres pays occidentaux se disent pr�ts � se charger de la r�organisation et de l�entra�nement des forces maliennes, sous mandat de l�Union africaine et de l�ONU. Comme si ses g�n�raux �taient des incapables et que la C�d�ao qui est suppos�e �galement faite pour une coop�ration des pays d�Afrique de l�Ouest dans le domaine militaire ne pouvait pas s�en charger : la nullit� de l�Afrique est totale. Pas m�me capable de former des bidasses ! Pour ne pas para�tre raciste, leurs m�dias ne se posent pas la question : �� quoi ont alors servi les ind�pendances ?� Mais pour arriver � cela, il fallait aussi qu�il y ait de nouveaux otages fran�ais pour justifier l�intervention au plan �humanitaire� et au plan devoir-de-l�Etat-envers-des-ressortissants-fran�ais-retenus- par-des-terroristes. Comme par hasard, il y eut des prises d�otages, puis une tentative de lib�rer des otages en Somalie qui se solde par la mort de l�otage fran�ais (un agent du SDECE) et de deux �l�ments des forces fran�aises d�intervention. Puis il fallait que les terroristes d�cident de franchir la ligne rouge pour aller vers le sud. Alors comme dans un sc�nario, Ansar Dine, Mujao et Aqmi appellent m�me le groupe nig�rian Boko Haram en appui et partirent � l�abordage de la ville de Kona, le 10 janvier 2013, obligeant les autorit�s maliennes � demander l�aide fran�aise. Comme pour r�pondre aux v�ux d�une intervention militaire, encore d�un commun accord et de concert, les mercenaires traversent la ligne rouge, comme s�ils savaient que cela serait le d�clencheur d�une intervention� fran�aise. Ce franchissement est la preuve la plus parlante de leur complicit� avec un commanditaire qui avait besoin non pas d�un mais de plusieurs casus belli. Les �djihadistes� pr�tendaient vouloir cr�er une Dawla islamiya et ils l�avaient sur un immense territoire qu�il aurait plut�t fallu renforcer, bunk�riser, barricader pour pouvoir le pr�server. S�ils voulaient un �Azawad�, ils avaient le territoire qu�ils voulaient. Pourquoi ont-ils fait le contraire de ce qu�ils ont fait en Libye et ce qu�ils font en Syrie o� ils prennent des territoires et les renforcent pour en faire des zones d�exclusion, autrement dit des territoires lib�r�s ? Ils n�avaient donc pas re�u cet ordre. Rien n�explique leur descente vers les villages insignifiants et non strat�giques de Mopti et Kona si ce n�est l�ob�issance � un �agenda�, pour reprendre le mot utilis� par M. Medelci en novembre dernier. Ils savaient que ce franchissement obligerait Bamako � demander de l�aide � ceux qui se disaient pr�ts � en d�coudre avec les m�chants loups ! Une semaine auparavant, Ansar Dine avait promis une tr�ve et l�arr�t des hostilit�s : le hic c�est que les Alg�riens n�ont pas n�goci� avec le chef, l�imprenable renard, Iyad Ag Ghaly, mais avec ses lieutenants, qu�il reniera d�s que des ordres lui viendront d�une autre capitale. Il se peut que la d�cision d�attaquer ne v�nt pas de lui mais d�Aqmi et du Mujao et qu�il n�ait fait que suivre, comme dans une meute. Aqmi est li� � Al-Qa�da, et ses manipulateurs sont ceux qui manipulent la n�buleuse � laquelle il appartient. Al-Qa�da, cette cr�ation am�ricaine, ob�it toujours � ses premiers concepteurs. Comme leurs attaques contre des garnisons � partir du 17 janvier 2012, cette attaque a toutes les caract�ristiques d�une ob�issance � un ordre venant de forces manipulatrices. L�aide de Bamako est demand�e au pays qui faisait le plus de pression pour une intervention, la France, comme lorsqu�en 1986, lorsque le dictateur tchadien, Hiss�ne Habr�, avait sollicit� Paris pour le d�fendre des troupes progressistes de Goukouni Ouada� soutenues par les forces libyennes. L�op�ration Serval suivra l�op�ration Epervier... Pourtant, Hillari Clinton, dans la citation donn�e plus haut, ne reconnaissait pas aux autorit�s de Bamako le droit d�agir l�galement pour l�intervention de la force africaine, Misma que Ban Ki-moon a alors renvoy�e aux calendes grecques. Comment accepte-t-elle qu�elles fassent appel � Paris ? Le Mali, un Etat failli (concept de politique internationale), n�a pas le droit de demander secours � l�Afrique et � l�ONU mais � la France. Le sch�ma initial en clair destin� � l�opinion publique et aux avaleurs de couleuvres affirmait le contraire de ce qui �tait �crit dans le sch�ma cod� des puissances atlantiques. Sortant son armada de grande puissance, la France prend brusquement l�initiative de s�engager, seule, pour r�pondre � une situation �d�urgence� cr��e de toutes pi�ces. L�arm�e malienne n�a toujours pas re�u les cargaisons d�armes russes achet�es par le pr�sident ATT qui a �t� d�pos� en avril 2012, afin que le pays ne puisse se d�fendre contre un ramassis de bandits de grands chemins recrut�s par les services occidentaux et qataris. La France jouera le beau r�le de sauveur pour redorer le blason peu reluisant de son pass� colonial. Intervention planifi�e au d�tail pr�s Finian Cunningham �crit : �Dans les heures suivant la sollicitation par le gouvernement malien d�un appui militaire pour contrer l'avanc�e des rebelles du Nord, des avions de combat fran�ais ont commenc� � effectuer des frappes a�riennes vendredi� signifiant par l� que les a�ronefs �taient pr�ts et les cibles d�sign�es. Spontan�ment, les USA et d�autres pays europ�ens apportent leur soutien rapide � Paris bien qu�elle agissait dans un cadre non onusien. La Grande-Bretagne a envoy� des avions cargos RAF CI7 � Paris � partir d�une base dans l�est de l�Angleterre afin d�aider � l�acheminement des troupes, des h�licopt�res, des camions et d�autres �quipements lourds. Washington fournira de la logistique et des communications. Cette situation n��tait-elle pas pr�visible du fait que des drones de surveillance am�ricains et fran�ais �taient en action depuis des mois au Mali et dans les pays limitrophes, certains disant qu�ils ont m�me survol� l�Alg�rie ? Pour Finian Cunningham, la rapidit� et l'�tendue de l�intervention fran�aise attestent de leur inscription dans le cadre d�un �plan bien rod� d'intervention par l'ancienne puissance coloniale�. Finian Cunningham ajoute : dans Information Clearing House, 16 janvier 2013 : �Les frappes a�riennes par les avions fran�ais sur au moins six zones-cibles tr�s dispers�es dans le Mali couvrent une distance op�rationnelle de pr�s de 2 000 km d�est en ouest. Ce niveau de coordination indique plusieurs semaines de planification et d�ment l�apparence que le gouvernement fran�ais r�agissait de fa�on impromptue � une demande soudaine d�aide des autorit�s maliennes align�es sur Paris.� Donc les Fran�ais savaient-ils qu�Aqmi et Ansar Dine allaient attaquer ? Plus �trange encore : le gouvernement fran�ais a affirm� qu�il avait obtenu l�autorisation par l�Alg�rie du survol de son territoire, sans qu�un pr�sident ou un ministre ait �t� vu � Alger� On obtient l�autorisation de survol d�un pays par t�l�phone ? Le sc�nario pour une intervention africaine se mue aussit�t sans mandat de l�ONU en intervention fran�aise, apparemment, pr�par�e de longue date, puisque tout �tait pr�t m�me le d�tail du survol du ciel alg�rien, obtenu en derni�re minute, ou lors de la visite de Hollande � Alger ou m�me une semaine avant l�intervention par� Hamad, en contrepartie d�un soutien pour un quatri�me mandat. Finian Cunningham conclut dans : Information Clearing House, 16 janvier 2013 : �En effet, telle est la chor�graphie soigneuse de ce d�veloppement militaire saillant que l'on pourrait dire que les Fran�ais se sont finalement donn� eux-m�mes le feu vert pour ex�cuter un plan qu'ils avaient fait m�rir depuis plusieurs mois. Ce plan n'est rien de moins que la reconqu�te n�ocoloniale de son ancienne colonie dans une r�gion de l�Afrique de l'Ouest d�importance strat�gique.� �Cette op�ration durera le temps n�cessaire�, a pr�cis� Fran�ois Hollande, ajoutant que la France intervenait �dans le cadre de la l�galit� internationale�. Or, il n�en �tait rien. La r�solution 2085 autorise le d�ploiement d�une �force africaine� �sous conduite africaine�, pas fran�aise. Mais les choses se sont pass�es autrement, justement parce qu�aucune partie n�a voulu agir. Agir �tait pourtant simple : d�bloquer les cargaisons d�armes maliennes retenues dans les ports d�Abidjan, de Conakry et de Dakar, sous pr�texte que le gouvernement n��tait pas l�gitime. Un sabotage international a eu raison de l�arm�e malienne qui �tait elle-m�me, comme toute arm�e, capable de faire ce travail, de donner des martyrs en l�honneur du pays. On a pr�f�r� l�humilier. Or, les �bienfaiteurs� ne veulent toujours pas effacer la dette malienne, ni m�me donner des moyens humanitaires au moins aux populations qui se sont r�fugi�es dans les pays voisins, eux aussi sans ressources : Tchad, Niger et Mauritanie. A.E.T.