Au printemps 2012, Djemila Benhabib a effectué plusieurs voyages au Caire et à Tunis. Se mêlant à la population, l'auteure de Ma vie à contre-Coran a pris la température de l'après-printemps arabe saisissant à chaud les préoccupations de toutes ces femmes et ces hommes qui rêvent de lendemains meilleurs. En rencontrant et en discutant longuement avec des citoyens de divers statuts et couches sociales, elle note combien le chemin est encore long pour la liberté, la démocratie et la justice sociale, notamment pour la gent féminine. Au Caire, elle rencontre bon nombre de femmes soumises qui attendent un hypothétique golden boy qui les arrachera à leur vie terne et médiocre. L'obsession du mâle pourvoyeur. En contrepartie, on exige de la femme respect, fidélité et soumission... (page 42). Et quelques lignes plus loin, «prise entre son désir de liberté et ses fantasmes de servitude consentie, Amira cherche son colonel Delmare, son Charles Bovary ou encore son Alexis Karénine...» (p. 43). Elle évoque la pression du harcèlement sexuel masculin sur les femmes, qui, pour se protéger du regard du mâle prédateur, s'emmitouflent sous le voile. «Ce n'est pas tant par piété que par résignation que bien des femmes portent le voile. Elles doivent se résoudre à faire oublier leur corps... un mal profond gangrène la société égyptienne : le harcèlement sexuel... Ce n'est qu'en soustrayant leur corps au regard des hommes que les femmes peuvent envisager d'avancer ou, du moins, essayer de marcher. » (P. 59). Lors de son séjour à Tunis, Djemila Benhabib fait le même constat : les femmes se voilent afin de se protéger d'un voyeurisme masculin excessif «Dans les rues, les femmes ne passent jamais inaperçues. Leurs corps se remarquent, sont scrutés, découpés au scalpel par les regards insistants des hommes. On les examine soit pour les rabaisser soit pour les désirer. A leur passage, on siffle, on fait des commentaires, on chuchote des compliments, on débat de leurs formes, on hurle des psst, psst, ou on laisse éclater des rires sarcastiques.» (P. 132). Née en Ukraine d'une mère chypriote grecque et d'un père algérien, Djemila Benhabib a grandi à Oran. Installée au Québec en 1997, elle signe son premier ouvrage Ma vie à contre-Coran en 2009 (éditions Koukou) suivi en ce début d'année (2013) de L'automne des femmes arabes et Les soldats d'Allah à l'assaut de l'Occident. Djemila Benhabib a reçu le Prix international de la laïcité 2012 décerné par le Comité Laïcité 2012 décerné par le Comité Laïcité République. Sabrinal L'automne des femmes arabes, Djemila Benhabib, Editions Koukou, 2013, 138 P, 400 DA